HISTOIRE DE LA MUSIQUE : LES PIANISTES DE JAZZ
Artiste à redécouvrir à chaque interprétation (il aimait interpréter les mêmes thèmes dans des versions et des tonalités différentes). Erroll Garner était un magicien de la scène avec ses larges sourires et ses yeux rieurs. Il avait le plaisir de jouer tout simplement. Il maîtrisait toutes les techniques du piano jazz tout en étant autodidacte... Il ne savait pas lire la musique. Homme en contretemps de son époque, Erroll Garner n'intégrera jamais le be-bop et sera ignoré des critiques, mais adulé par le public et les musiciens.
© The Library of Congress (Flickr.com) - Erroll Garner (1948)
L'enregistrement Concert by the Sea de 1955, avec Eddie Calhoun à la contrebasse et Denzil Best à la batterie, compte parmi ses meilleurs albums. D'autres sont très brillants tels que Long Ago and Far Away (1951) et Magician (1974), dans lesquels Erroll Garner interprète avec son style légendaire un grand nombre de standards.
La main gauche d'Erroll Garner : comme Louis Armstrong (tp) et Thelonious Monk (p), Erroll Garner est l'un des très rares musiciens que l'auditeur le moins averti identifie à la première mesure. Son langage musical a trouvé dans une expression pianistique totalement originale un aboutissement naturel.
Le jeu de ce pianiste est caractérisé par un infinitésimal décalage entre la main gauche et la main droite (l'amble garnérien), une particularité génératrice de swing. Comparable à une section rythmique, la main gauche d'Errol marque les quatre temps en accord tandis que la main droite phrase des mélodies et des accords qui se superposent à ceux de la main gauche.
ERROLL GARNER - THE SHADOW OF YOUR SMILE (ext.)
Sur tempo lent, son jeu était faisandé par une surcharge d'arpèges, tandis que sur tempo rapide, son jeu était aussi plein que mouvementé. Alors que la main gauche lui fournissait une assise puissante à la Fats Wallers, mais où le rythme était souvent brisé, il se servait de sa droite avec une liberté rythmique très attrayante. Ses deux mains en retard l'une sur l'autre créaient un jeu décalé d'un grand swing, rendu plus frappant par une attaque définitive. Son jeu puissant de main gauche a été imité par plusieurs pianistes modernes, sans que l'on puisse le considérer comme un maître prépondérant.