PÉDAGOGIE



IMPROVISER UNE INTRODUCTION

À la source de nombreuses chansons, l’introduction est souvent un passage obligé ou nécessaire pour lancer les premières notes chantées. Celle-ci peut être écrite, mais également improvisée. Dans son article « Improviser l’introduction d’une chanson ou d’un standard » (1), le pianiste et musicologue Dominique Arbey évoque les grands principes et les quelques pièges liés à l’exercice si particulier de l’improvisation lors d'une introduction.

1 - (source "L'éducation musicale - Mai 2015")


IMPROVISER L'INTRODUCTION D'UNE CHANSON OU D'UN STANDARD

L'enseignement de l'improvisation est souvent un sujet délicat pour le professeur de musique. Dès lors que l'on souhaite en définir le cadre, la méthode ou la pédagogie, deux notions fortement opposées s'invitent : connaissances techniques et liberté [2]. La plupart des ouvrages traitant de l'improvisation ne font qu'énoncer un ensemble de règles théoriques : composition des accords, cadences, contrepoint, etc. Ces connaissances sont la matière première de la grammaire musicale. Tout musicien doit connaître ces règles. Ce substrat sonore doit être organisé afin d'avoir une valeur musicale. Des choix esthétiques doivent être fait. Cet aspect est trop souvent absent des traités et méthodes. Il est tout juste évoqué : et pour cause, comment expliquer le don, le génie d'un acte de création ?

Pour ces raisons, les lignes qui vont suivre ne seront que des directions ou des conseils de travail pour les apprentis improvisateurs. Les enseignants pourront également s'en inspirer pour proposer des plans de travail à leurs élèves. Pourquoi improviser et improviser sur quoi ? L'improvisation est un vaste domaine. Il est donc nécessaire d'en limiter le sujet. Cet article s'intéressera plus particulièrement à l'étude d'une facette de cette pratique : l'improvisation au piano d'un prélude introductif à une chanson ou un standard. Ce cas de figure est très intéressant, car il est lié à une œuvre préexistante tout en laissant une grande liberté à son acteur.

L'article s'adressant principalement à des professeurs de musique, je n'ai pas jugé utile de redéfinir certains points théoriques. L'aspect temporel du geste improvisé sera évoqué dans une première partie, son discours dans une deuxième, et en dernier lieu les particularités du piano seront interrogées.

2 : Lire à ce sujet, l’ouvrage d’Antoine Pétard, L’improvisation musicale, Enjeux et contrainte sociale, Paris, l’Harmattan, 2010, 210 p.


STRUCTURE DE L'IMPROVISATION

Le geste de l'improvisation ne peut se dissocier de la notion de temps. Tout discours, même extrêmement libre, repose sur une orientation, un sens musical et doit parfois se plier à une limite de temps contraignante (durée d'une prestation ou d'un enregistrement par exemple). Parmi les éléments préliminaires à l'improvisation, le plan, directement lié à l'aspect temporel de la musique, est certainement le paramètre le plus contraignant. En cas d'improvisation à partir d'une structure préexistante, le plan tonal et la succession des harmonies dictent un canevas au musicien. Ce dernier est libre de la suivre « à la lettre » ou, au contraire, de le contourner.

Le musicien improvisateur peut aussi avoir recours à un plan libre créé ex nihilo. Un grand nombre de solutions est envisageable pour le créateur. Mon ambition n'est pas de lister toutes les possibilités, le format de cet article ne le permet pas. Il est d'ailleurs impossible d'en établir un recensement complet, mais l'observation de la pratique courante des musiciens et mon expérience permettent de proposer quelques cas assez fréquents :

  • Le geste musical s'appuie sur un ou deux accords. Ce procédé est souvent associé à un discours méditatif. Les mélodies ainsi créées sont reconnaissables par leur grande continuité et leur lyrisme. Même si la chanson ou le standard suivant cette introduction improvisée ne repose pas sur une échelle modale, ce procédé permet d'en explorer ses nombreuses possibilités à condition de jouer sur l'ambiguïté de certains degrés « faibles ». En improvisant sur les degrés VI et III du mode majeur, il est possible d'utiliser le mode de La.
  • Le musicien créateur donne naissance à une grille. Cette création instantanée est possible si l'auteur possède la technique suffisante pour anticiper son discours mélodico harmonique. C'est pourquoi, la notion d'habitude est primordiale. En effet, de nombreux plans harmoniques connus (anatoles, christophes, II/V/I…) appartiennent au langage courant des improvisateurs. L'originalité du musicien sera liée à sa capacité de contourner, moduler, transformer ces formules de bases, mais aussi d'en créer de nouvelles. Dans l'hypothèse d'un prélude improvisé, le musicien peut s'inspirer du thème qui suivra. Ces citations doivent s'inscrire dans son discours sans donner l'impression d'être des pièces rapportées. Tout le talent du musicien apparaît dans ce travail de synthèse et d'intégration de thèmes.

Que l'improvisateur s'appuie sur une grille préexistante ou en soit l'auteur, il doit respecter une règle fondamentale : la continuité du discours. Les quelques remarques du paragraphe précédent suggèrent des improvisations fluides et carrées assez proches des thèmes les accompagnant. Or, rien n'interdit au musicien créateur d'introduire des ponctuations ou des brisures. Les thèmes suivant les introductions improvisées reposent souvent sur des canevas aux carrures régulières. Pour différencier son improvisation de ce qui va suivre, le musicien doit donc interpeller l'auditeur avec des éléments dramatiques. Les ponctuations rythmiques usuelles peuvent briser facilement ces cycles  : points d'orgue, ralentis, accélérations, changements de métriques permettent de créer du relief.

Afin d'éviter tout effet gratuit, ces brisures, de caractère dramatique, doivent avoir une signification et une fonction musicales. Par exemple, un point d'orgue s'associera aisément à un accord instable, telle la septième diminuée, mais n'apportera rien à une cadence parfaite. Mal placé, le point d'orgue devient très vite synonyme de maniérisme musical. Un ralenti fera la transition entre la fin de l'introduction et le début du thème. Une accélération pourra s'associer à un passage harmonique instable. Un changement de métrique sera la conséquence d'un motif mélodico rythmique singulier. Pour faire bon usage de ces ponctuations, il est important de suivre son instinct musical. Tout abus de ces formules alourdira votre discours musical.

Le contenu littéraire d'une chanson peut avoir une influence directe sur son introduction improvisée. Les effets dramatiques évoqués plus haut peuvent avoir une relation avec le texte de l'œuvre. Le musicien improvisateur utilise son bagage technique et sa sensibilité pour évoquer le climat, l'ambiance de la chanson. Les cadences sont très utiles dans la figuration musicale. Une cadence parfaite donne l'impression de calme et de stabilité. Une demi cadence laisse à l'auditeur une impression de suspension ou d'attente. Une cadence rompue provoque un effet d'éloignement ou de nouveau départ et permet de relancer le discours musical.


STRATEGIE DU DISCOURS

Ainsi, le musicien possède un ensemble de formules et d'outils lui permettant d'organiser rapidement un court prélude. Il ne lui reste plus qu'à choisir deux ou trois idées mélodiques pour élaborer son discours et le tour est joué ! Cependant, ce n'est pas si simple à réaliser. En effet, la mélodie, l'harmonie et le rythme doivent être liés afin de donner l'impression de former un tout. La musique ne fonctionne pas par collage ou montage, mais comme une entité.

« La mélodie vulgaire [dans le sens de populaire] est bonne si elle est trouvée », nous expliquait Francis Poulenc en 1920. Ce bon mot du célèbre musicien français nous renvoie à cette fameuse notion d'inspiration. Autrement dit, comment définir un coup de génie ? Tout comme la notion d'inspiration, le génie ne s'apprend pas dans les livres. Définir ce qui est mélodique ou ce qui ne l'est pas relève du défi. La seule méthode dont dispose l'apprenti improvisateur est l'analyse d'exemples préexistants : il retiendra ainsi quelques « ficelles » ou quelques « trucs ».

Une « lecture » des grands maîtres du passé lui permet de retenir quelques principes. Tout d'abord, il doit se rappeler que la quantité de notes ne fait pas la qualité d'une mélodie improvisée. Cette règle est primordiale, nous devons l'avoir continuellement en tête lorsque nous improvisons. Afin de donner de la cohérence à son discours, le musicien doit chercher des motifs relativement courts dans le but de pouvoir les développer sur les différentes harmonies de la grille. Ces cellules permettent à l'auditeur de fixer son attention sur le déroulement de la prestation et au musicien de démontrer son habileté musicale. La maîtrise de ces micros éléments musicaux est essentielle ; elle doit se pratiquer dès les premières tentatives d'improvisation. Elle empêche les réflexes instrumentaux habituels. Il ne semble pas inutile de rappeler qu'enchaîner des gammes et des arpèges à toute vitesse apporte peu à la musique ; surtout si le cadre n'est que l'introduction d'une chanson ou d'un standard de jazz.

Une fois que le musicien commence à maîtriser le placement des cellules mélodiques, il doit rapidement agrémenter ces dernières de petites variantes afin d'éviter de donner l'impression de tourner en rond ou de se répéter. De nombreux ornements peuvent augmenter le discours musical : appoggiature, gruppetto, retard, notes de passages… Mais il faut aussi sortir des sentiers battus et « oser » des intervalles jugés trop dissonants ou malvenus dans les traités d'harmonie. Malgré toutes ces contraintes, une improvisation doit garder une certaine fraîcheur. La fragilité et l'empirisme ne sont pas à exclure ; la recherche de la « note bleue » ou de l'ultime dissonance doit se faire sur l'instant avec tous les risques que cela implique : tâtonnements, hésitations et petites imprécisions. Tout sera accepté si la démarche musicale est sincère !

Nous l'avons dit plus haut, le prélude improvisé peut se faire sur la structure harmonique du thème qui va suivre. En fonction de ses compétences, de ses envies ou de son inspiration, l'improvisateur pratique des modifications plus ou moins importantes sur la trame harmonique utilisée. Il est difficile et prétentieux d'établir une typologie complète de ces altérations, mais les plus fréquentes dans la sphère de la chanson et du jazz sont :

  • L'enrichissement des accords, c'est-à-dire l'ajout de 7e, 9e, 11e et 13e mais aussi l'altération de certaines notes ou le retrait d'autres (fondamentales ou quintes en principe).
  • L'utilisation de substitutions : dans ce cas, l'improvisateur remplace un accord par un autre. Cette pratique n'est pas très éloignée de la précédente dans la mesure où l'altération ou l'enrichissement d'accords transforme ces derniers. L'exemple le plus fréquent est la fameuse « substitution tritonique » consistant à remplacer un sol 7e de dominante (sol, si, ré, fa) par un réb 7ee (ré b, fa, la b, do b). Dans ce cas, le réb est la quinte diminuée de l'accord original, le fa sa 7e, le la b sa 9e mineure ajoutée et le do b sa tierce (par enharmonie)
  • La grille originale peut être amputée d'une partie plus ou moins importante. En cas d'introduction libre au piano, le musicien peut se contenter d'improviser sur une seule partie du thème. Le plus souvent, il utilise la fin de la séquence afin d'enchaîner facilement le thème. Ces courtes introductions ont parfois la fonction de donner le « ton » aux chanteurs.

Le pianiste a la particularité d'être à la fois soliste et accompagnateur. En règle générale, la main gauche joue le rôle de l'accompagnement. Les musiciens avancés répartiront l'accompagnement entre les deux mains tout en faisant ressortir la mélodie à la main droite (ou parfois à la main gauche, s'ils souhaitent faire chanter les basses du piano). Quel que soit le mode de jeu retenu, la difficulté sera de maintenir un équilibre et une cohérence entre les deux mains. Comme toujours en musique, il est recommandé de commencer par des choses simples.

Il est possible, par exemple, de jouer uniquement les basses des accords à la main gauche et de jouer la mélodie improvisée à la main droite. Autrement dit, jouer à deux voix. Cette technique permet d'appréhender assez facilement toutes les notions d'harmonie tout en allégeant le jeu.

Passé cette étape, le pianiste improvisateur pourra enrichir son jeu. De nombreuses solutions sont envisageables : arpèges main gauche, pompes, accords ou arpèges répartis entre les deux mains. Il faut éviter cependant les accords plaqués à la main gauche : trop lourds et trop envahissants. Tout ce que la musique pour piano possède peut être utilisé ; encore une fois, la connaissance des répertoires anciens et actuels est bien utile.

La densité des notes de la main gauche doit toujours être surveillée car l'improvisateur débutant a une tendance naturelle à trop en faire (sans doute pour se rassurer). Par ailleurs, le balancement rythmique est mieux perçu si le musicien fonctionne à l'économie.

L'harmonie et le rythme sont extrêmement liés. La carrure des phrases musicales est la principale conséquence du canevas harmonique. Dans mon métier d'enseignant, je constate que les problèmes rythmiques sont souvent liés à des hésitations. Ces dernières sont liées à des problèmes de déchiffrages ou de repère de notes sur le clavier. Chez les apprentis improvisateurs, les hésitations sont la conséquence d'un manque d'anticipation. Encore une fois, la pleine liberté de l'improvisation n'est possible que si un minimum de travail préparatoire est fourni. Il est donc nécessaire de bien connaître la grille sur laquelle on va improviser.

Pour les improvisations libres, le musicien doit anticiper davantage, il doit décider et entendre par avance sa trame harmonique. Comme évoqué précédemment, une improvisation spontanée repose sur des réflexes ou des plans. Ce vocabulaire doit bien sûr être acquis dans ce cas.

La régularité du rythme, l'élément moteur de la musique, doit être un souci permanent chez le musicien et plus en particulier chez l'improvisateur. L'irrégularité, les hésitations, les incohérences brisent la crédibilité d'une prestation. Un auditeur, même non musicien, repère rapidement les hésitations, les accrocs et les rythmes erronés. Par ailleurs, si le prélude improvisé introduit un soliste, ce dernier ne sera pas à l'aise pour commencer son intervention si ce qui précède n'est pas en place.

Il existe plusieurs façons d'améliorer un défaut de tempo irrégulier. Dans un premier temps, il faut chercher les causes du problème. Dans le cas d'hésitations sur les notes ou les accords, il faut travailler les enchaînements de la grille. Le plus simple est de faire tourner en boucle le canevas harmonique en utilisant le métronome ou éventuellement une boîte à rythme. Il faut bien sûr insister sur la partie d'accompagnement main gauche afin de créer des réflexes.

Dans la majorité des cas, ce travail n'est pas suffisant, car un autre problème s'ajoute : la superposition de la mélodie improvisée à l'accompagnement, autrement dit la mise en place. Le canevas harmonique peut être parfaitement en place, mais dès qu'une phrase mélodique se place, le rythme se met à « boiter ». Encore une fois, il faut appliquer la méthode de la simplification. Si, par exemple, l'accompagnement consiste en une continuité de croches, il faut chercher du côté des rythmes simples et éviter les syncopes, triolets et autres quintolets. Même une personne peu douée en rythme peut progresser avec cette méthode. Le plus important est la patience et la ténacité.

Dans la première partie de cet article, il était évoqué les brisures et les ponctuations rythmiques. Ces suspensions, ralentis, accélérations ou points d'orgue doivent s'inscrire dans la logique rythmique du fragment improvisé. Leur présence est dictée par le discours et doivent donc être assumés. Un ralenti ne doit pas ressembler à une faiblesse, une accélération à un manque de contrôle et un point d'orgue à une hésitation. Des nuances peuvent accompagner ces brisures rythmiques. Leur rôle sera de faire comprendre qu'il s'agit d'un effet dramatique et non d'une erreur. Les changements de dynamique sont liés de façon intrinsèque au discours et à la mobilité du rythme.

L'accentuation n'est pas à négliger dans le travail de l'improvisation. Certaines figures rythmiques sont directement liées aux accents. Tel un percussionniste, le pianiste fait ressortir telle ou telle attaque d'une cellule. Le geste pianistique, animé par un fort sentiment rythmique, peut figurer un ensemble de percussions. Des notes fortement accentuées sur les temps deux et quatre rappelleront le jeu des cymbales charleston (pour le jazz) ou de la caisse claire (pour le rock).

La palette sonore du piano est infinie. Un pianiste expérimenté peut suggérer un grand nombre de timbres grâce à son toucher. L'improvisation est une discipline à la fois révélatrice et formatrice. L'imagination étant fortement sollicitée, le pianiste doit être en mesure de faire sonner son instrument comme il l'entend intérieurement. Encore une fois, pour un débutant dans le domaine de l'improvisation, les progrès sont possibles. Un musicien ne disposant pas d'une grande palette sonore pourra faire progresser son jeu pianistique par le biais de l'improvisation. Le fait de chercher des mélodies, des harmonies et des rythmiques développe la connaissance de l'instrument. Cette prospection oblige le pianiste à jouer davantage avec ses « oreilles ». Le cadre formel d'une partition bloque souvent les débutants. En se concentrant sur les problèmes de notes, de doigtés et de rythmes, les pianistes amateurs oublient très souvent la notion de timbre et de qualité sonore. En libérant le musicien du texte imposé, l'improvisation permet une connaissance plus intime de l'instrument.


RÉFLEXES INSTRUMENTAUX

J'indiquais, plus haut, que les remplissages systématiques avec des gammes et des arpèges étaient à éviter. L'idée mélodique doit bien sûr prévaloir sur le geste purement mécanique, mais il ne faut pas pour autant oublier les caractéristiques du piano. Certains idiomatismes ne sont pas à exclure. Improviser au piano implique une façon de penser la musique. Les doigts ont leurs mots à dire ! Ces réflexes instrumentaux ne sont pas à exclure de l'improvisation, dans la mesure où ils agrémentent une pensée musicale. Selon le principe de partir du plus simple pour aller au plus complexe, il est possible d'enrichir une mélodie de traits et de gestes pianistiques. Dès qu'un thème, un motif ou une cellule existe, il est possible de les varier et de les développer. Ainsi, les gammes, arpèges intermédiaires peuvent s'insérer dans l'improvisation à condition de ne pas prédominer. Ces traits plus ou moins virtuoses s'intercalent entre les notes pivots de la mélodie.

Ces enrichissements appartiennent au vocabulaire pianistique. Encore une fois, l'héritage des grands maîtres du passé n'est pas à négliger. Selon la culture pianistique de l'improvisateur, certaines formules vont ressurgir dans son discours. Ces traits, ces gestes, qui sont en principe en parfaite adéquation avec l'instrument, permettent de bien faire sonner ce dernier.

Le pianiste peut également s'inspirer de la musique vocale. Le lyrisme de certains traits s'apparente aux vocalises improvisées par les chanteurs. Les ornements, les gruppettos, les trilles, les appoggiatures, les retards seront bienvenus pour enrichir une mélodie improvisée. Ainsi, une cellule constituée de très peu de notes pourra devenir une grande phrase musicale.

L'accompagnement est aussi tributaire des caractéristiques de l'instrument. Certains intervalles (les tierces par exemple) sonnent très mal dans le grave du piano. D'autres sonnent très bien. Les dixièmes sont d'un excellent effet et mettent en valeur les basses de l'instrument. Il est possible de les jouer de façon simultanée (pour les grandes mains uniquement) ou de les arpéger en utilisant la pédale forte afin de maintenir la note la plus grave.

Toutes ces considérations techniques et esthétiques doivent fusionner. Pour improviser correctement, un minimum de connaissance de l'instrument est requis. Une pédale mal utilisée peut créer la pire des cacophonies même si l'harmonie est correcte. Un mauvais doigté entraînera des irrégularités rythmiques et cassera le sens des intentions musicales (phrasé, articulations, nuances). La non maîtrise du toucher créera des incohérences dynamiques : accompagnement plus fort que la mélodie, faux accents…

Ainsi exposés, ces quelques remarques techniques peuvent effrayer le pianiste amateur ou débutant. Mais il est possible de prendre le problème à l'envers. La pratique de l'improvisation peut faire progresser un instrumentiste ne possédant pas beaucoup de technique. La plupart des problèmes techniques engendrent directement une mauvaise qualité sonore. Or, l'improvisation repose essentiellement sur un travail d'écoute. Par cet exercice, l'apprenti pianiste met directement en relation un travail physique (la technique instrumentale) et une production sonore (ce qu'il souhaite faire entendre). Son oreille le guidera et lui fera prendre conscience de la conséquence de tel ou tel défaut de jeu. Le résultat obtenu sera beaucoup plus efficace que l'étude d'exercices purement mécanique et antimusicaux. Une improvisation peut devenir ainsi une miniétude dont le but est d'améliorer certains points pianistiques : jeu en arpège à la main gauche, enchainement de dixièmes, maîtrise de la dynamique, etc.

Le parcours de l'apprenti improvisateur est jalonné de contraintes techniques, théoriques et esthétiques. Le chemin semble bien long pour atteindre le but ultime : improviser en toute liberté. Pourtant, toutes ces règles permettent d'éliminer les gestes musicaux inutiles. Une improvisation trop longue et mal cadrée s'assimile à du bavardage. Des mélodies ou des accords trop chargés en notes alourdissent le style. Des nuances mal maîtrisées déstructurent l'organisation rythmique. Sans chercher à expliquer la notion de don ou d'inspiration, ces quelques éléments vous permettront peut-être d'organiser vos futures improvisations.

Par Dominique Arbey
Visiter son site : www.dominique-arbey.fr

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