HISTOIRE DE LA MUSIQUE ET DES INSTRUMENTS



LA CONQUÊTE DE LA MUSIQUE ASSISTÉE PAR ORDINATEUR : MAC, PC ET ATARI

Progrès oblige, le regard que nous portons aujourd’hui sur la composition musicale informatisée a bien changé. Ce qui hier demandait encore de pures connaissances musicales pour produire une œuvre qui tienne la route, ne repose plus aujourd’hui que sur de la manipulation d’objets, de sons préprogrammés, de boucles sonores et de séquences formatées. En moins de 40 ans, la musique assistée par ordinateur a provoqué chez les musiciens et compositeurs une véritable révolution dans leurs façons de concevoir la musique, de la penser et de la générer.


QUAND MAC EST ARRIVÉ…

Il y a 35/40 ans, les « têtes pensantes » des bureaux de recherche et de développement d'IBM et d'Apple considéraient encore la musique comme un média informatique secondaire. En dehors des très anecdotiques possibilités de reconnaissance vocale avec un mini-micro et de minuscules enceintes, rien n'était réellement conçu pour le musicien professionnel comme amateur. Pas la moindre interface MIDI d'origine à l'horizon et les connexions s'effectuaient, au mieux, au standard mini-jack 3,5. Néanmoins, vous pouviez acquérir, chez de rares spécialistes, quelques interfaces sous réserves de compatibilité. En fait, l’analogique et ses magnétophones multipistes régnaient encore en maître.

Au début des années 80, pour extraire l'ordinateur de bureau familial de sa tache principale (le traitement de texte), les constructeurs durent faire face à de multiples défis tout autant technique, ergonomique, pratique, qu’économique. Il faut se rappeler que le moindre Mac assez performant coûtait au moins le prix de trois ou quatre Atari 1040. Pour la grande majorité des musiciens, souvent peu fortunés, le choix était tout trouvé. Certes, l’Atari n’avait pas que des qualités, il chauffait (aucun ventilo n’était présent), aussi fallait-il le surélever un petit peu pour éviter que l’alimentation ne soit pas en surchauffe. Malgré tout, le petit ordinateur eu son heure de gloire. Tous les claviéristes qui en ont eu un entre les mains vous diront qu’il était pratique, léger, presque sans aucune contrainte.

Ceux qui pouvaient se targuer d’avoir un Mac dans les années 90, genre Quadra 660 ou 880, dotés d’un processeur cadencé respectivement à 25 et 40 MHz, devait débourser entre 20 000 et 35 000 francs (soit pour aujourd’hui une somme entre 4 000 et 7 000 euros en tenant compte de l’inflation). Dans ces conditions, Mac, bien mieux que les PC, pouvait se venter de construire les ordinateurs les plus beaux, mais aussi les plus faciles, avec cette délicieuse sensation de faire partie d’un « clan » (ce qui, même des années après, reste encore d'actualité). Avec un Quadra, vous pouviez faire tourner déjà, à toute vitesse, tous les gros séquenceurs (Cubase, SoundTools, Performer, ProTools, Vision, etc.), voire les DtD. Cette perfection explique d'ailleurs la côte argus élevée dont jouit la gamme de ce constructeur depuis des années.

Apple a réussi, inexplicablement, à introduire une notion « d’affection » à l’égard de ses machines. À l’époque, n’importe quel utilisateur de PC considérait sa « bécane » comme un outil peu fiable. Le musicien s’improvisait assembleur et devait se tenir au courant de toute évolution de Windows avec tout ce que cela entraîne comme remise en question sur ses habitudes de travail.

En revanche, un utilisateur de Mac aimait et vénérait son Mac, autant que s’il l’avait fait lui-même. Très agréable à utiliser, il était bien vu pour un musicien (ou tout autre utilisateur) de dire que l’on possédait un Mac, cela faisait plus chic que de se lancer dans une description détaillée du clone made in Taiwan.


ATARI, L’AVANT-GARDISTE

Atari ST aura régné dix ans dans les studios. Une durée qu’il est difficile d’imaginer de nos jours. En France, son interface MIDI incorporée l’a propulsé du rang de gentille machine de jeux au firmament des ventes dans le monde de la musique. Même dépassé en puissance par à peu près tous les autres ordinateurs, le 1040 ST espérait trouver à travers son successeur, le Falcon, un outil qui cristallise tous les espoirs des musiciens qui voulaient monter en gamme tout en restant fidèle au constructeur. Hélas, le Falcon ne tiendra pas ses engagements malgré une station Direct to Disk la moins chère du marché. Le peu d’empressement des développeurs et l’arrêt de la filiale française, ne lui aura pas donné tous les atouts pour devenir aussi incontournable que ces concurrents.


LE CHOIX DES ARMES ET L’EFFONDREMENT DES PRIX

Un choix, ou plutôt une tactique de travail, venait de voir le jour. Le musicien s’adonnant à la musique informatisée avait le choix entre une machine ouverte (ordinateur) et une machine dédiée (séquenceur autonome).

Aujourd’hui, tous les musiciens ou presque vous diront que l’option « machine ouverte » raccordé à un seul clavier est fort pratique. Toutefois, il serait bon de rappeler qu’un synthé, un expandeur ou un sampleur externes ne sont au fond que des ordinateurs, certes moins puissants, plus spécialisés, beaucoup plus fermés et certainement plus mal lotis en terme d’écran… Tous ces outils sonores doivent, eux aussi, faire des calculs pour éditer des sons, les enrober d'effets sonores et les placer en mémoire.

D’autre part, n’oublions que c’est grâce aux instruments qui se sont enrichis d’interfaces compatibles PC et/ou Mac que la MAO a été rendu possible. Roland, Korg, Yamaha, Kawai et d’autres marques se sont mises à la tâche pour palier les carences des constructeurs d’ordinateurs.

Très rapidement, une rude concurrence est née entre PC et Mac. Les « Macintoch addicts » avait tout comme ses concurrents des offices spécialisés, tels Odyssée System et Numéra, où quelques spécialistes en MAO vous démontraient qu’elles étaient les récentes et géniales trouvailles, preuve à l’appui.

Le calcul des constructeurs en informatique est parti de cette directive  : la puissance et la facilité d’utilisation doivent être proportionnelles à la complexité de l’offre qui est faite. C’est une des raisons qui explique que les composants se déprécient aussi vite, bien plus que dans l’univers des synthétiseurs. Les exemples les plus frappants de cette déflation économique sont certainement le disque dur et la mémoire vive.

L’effondrement des prix et le réajustement des gammes ont ainsi poussé de nombreux musiciens encore hésitants à franchir le pas. Ce qui n’était pas encore trop cher (le PC) devenait une aubaine, tandis que ce qui relevait du placement branché (le MacIntosh) trouvait une politique du prix plus en rapport avec la réalité. Ceux qui rêvaient de posséder un Mac virent enfin leur désir se réaliser.

Le prix de la mémoire vive devenant plus abordable, celle-ci permit à l’échantillonnage de gagner du terrain. Il y a 20 ans, les gros disques durs étaient de 500 Mo. C’était nécessaire, parce que les logiciels devenaient de plus en plus gourmands en mémoire vive, et qu’à 10 Mo la minute d’enregistrement stéréo, un disque dur, même de 500 Mo, se remplissait très vite.

De même, il en coûtait moins cher de choisir une configuration de base musclée que d’avoir à acheter plus tard de nouvelles extensions de mémoire. À l’époque, l’implantation dans les ordinateurs de bureau du lecteur-enregistreur magnéto-optique vint en renfort pour résoudre les problèmes de stockage. Le CD-ROM devenait un produit incontournable, tandis que la disquette 3,5 pouces faisait ses adieux après des années de bons et loyaux services.


JE DOIS UPGRADER !

Au milieu des années 90, le musicien avait encore le choix entre un Atari d’occasion (beaucoup de ses adeptes ont pensé pendant longtemps que le constructeur renaîtrait de ses cendres – près d’un musicien sur deux utilisait encore un Atari), un PC faisant la jonction entre le monde du home-studio hobbyiste et le milieu professionnel (le PC étant l’héritier indirect de l’ingéniosité d’Atari – le Windows 98, par sa stabilité relative fera pencher la balance) et, pour les musiciens les plus fortunés, le Mac qui proposait alors les logiciels les plus pointus.

Pour la quasi-totalité des utilisateurs, la station de travail sur ordinateur devait ouvrir sur des perspectives réjouissantes en matière d’ergonomie, de puissance et de créativité, à condition de bien penser sa configuration, car une fois réalisée, il ne fallait plus penser à autre chose qu’à faire de la musique.

En informatique, et plus encore qu’ailleurs, vouloir posséder le dernier modèle représente une gageure. Les nouvelles technologies cavalent les unes après les autres. Il faut sans cesse upgrader.

Ce nouveau terme qui enrichit le vocabulaire informatique, fera regretter chez certains musiciens le fonctionnement « lecture/stop et avance » du magnétophone analogique. Seule consolation, la présence de commandes identiques sur les séquenceurs. Mais ce point commun est bien le seul, car même si un magnétophone peut couper, effacer et copier des sons, les possibilités techniques virtuelles du séquenceur sont si nombreuses et sa manipulation si aisée que son utilisation ne sera pas sans conséquence sur l’acte créatif des musiciens.

Dès lors, la conception de la musique et de ses enjeux économiques vont s’en trouver altérés. La musique rejoint la science la plus pointue et évoque le clonage de matériel via le virtuel. Les possibilités offertes au musicien vont très rapidement se multiplier par 10, par 100, aussi vite que l’inflation des pistes…


LES « FLIPS » DU MUSICIEN

Le premier « flip » du musicien MAOiste était le suivant : « Si j’achète un nouvel ordinateur, que se passera-t-il ? » Pour le passage d'Atari vers PC ou compatible existait le format très pratique du Midi File pour sauvegarder ses œuvres ; la seule condition étant d’avoir des logiciels qui sauvegardent et qui les lisent. Déjà, chez Atari, les premières versions des séquenceurs Notator et de Cubase l’avaient déjà incorporé à leur programme. Toutefois, il reste vrai que le MacIntosh, qui a toujours aimé faire cavalier seul, proposait comme alternative un utilitaire comme Echange PC/MacIntosh, à la conversion complexe.

Le second flip du musicien de l’époque - qui peut sembler ridicule aujourd'hui -, était de faire fonctionner un ordinateur PC, car pour celui qui manipulait Atari tout était extrêmement simple. Il suffisait de lancer la disquette du programme pour que celui-ci se trouve opérationnel au bout d’une minute, sans autre manipulation. Cette crainte était justifiée par les rumeurs qui entouraient le système Windows assez instable et discrédité – à juste titre - par les utilisateurs de Mac.

Or, finalement, en faisant des sauvegardes permanentes, l’utilisateur du PC n’avait qu’un devoir, celui de bien connaître son logiciel. S’il n’envisageait pas de programmer en langage machine, qu’importe alors la plate-forme puisque dans le cas des ordinateurs PC et Mac ce sont les logiciels qui « font » l’ordinateur.


AU TOURNANT DU 21e SIÈCLE

Au tournant du 21e siècle, le PC règne en maître. Au Windows 98 succèdera le XP. Le monde du PC s’ouvre de plus en plus vers l’informatique musicale avec un plus grand engagement… tout comme MacIntosh d’ailleurs ; le multimédia y étant pour beaucoup. C’est à cette époque que les développeurs PC s’attaquent au marché « grand public » et que le clan MacIntosh prospecte le monde professionnel. PC ou Mac, c'est avant tout une question d'éthique, car bien entendu chaque plate-forme possède ses produits de début et de haut de gamme.

Si le « Plug and Play », qui fit le succès de MacIntosh, lui reste acquis, le système d’exploitation propre au PC a, quant à lui, bien évolué : icônes multiples, ascenseurs, multi-fenêtrage… Le marché du PC compte aujourd’hui près de 80 % d’adepte. Sa grande force réside toujours dans sa logithèque impressionnante et dans son assemblage qui peut être réalisé à la carte.

Par ELIAN JOUGLA


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