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LES PIANOS YAMAHA, FABRICATION ET ENSEIGNEMENT DANS SES ÉCOLES

La firme Yamaha, leader incontesté dans le domaine des instruments de musique, démontre toute l’ingéniosité qu’elle a déployée pour conquérir la planète depuis déjà quelques décennies. De la fabrication de ses pianos montés à la chaîne, en passant par les pianos numériques “Clavinova”, qui font référence, jusqu’à l’enseignement de masse prodigué dans ses écoles, la firme Yamaha a toujours eu le “vent en poupe” grâce à l’utilisation d’une technologie d’avant-garde et une diversification de ses produits couvrant toute l’étendue du domaine musical.


L’EMPIRE DES SONS YAMAHA

Yamaha, ce ne sont pas uniquement les motos, mais également les claviers sous toutes leurs formes : pianos acoustiques droits, à queue longue ou à queue raccourcie, pianos numériques, claviers électroniques, dispositifs silencieux, à programmation, à cristaux liquides, à télécommande… sans oublier les autres instruments comme les guitares, les tuba, les batteries et percussions ou les trompettes, les saxophones. La liste serait longue… de quoi former tout un grand orchestre !

Même si la notoriété de la firme Yamaha provient de ses motos, elle conserve toujours de nos jours sa place de numéro un dans la vente des instruments de musique. Teruhisa Murakami, ancien chef accordeur de la firme, précise : “Notre expérience dans la facture remonte à 1887. Nous avons eu la chance de grandir à l’ère des hautes technologies et ainsi d’économiser un temps précieux… Nous avons investi massivement dans la recherche, à l’inverse de maisons comme Pleyel, Gaveau ou Erard. Les Occidentaux ont trop longtemps fait confiance à leurs vieilles méthodes, et cela se comprend : ils avaient trois siècles d’expérience, alors que nous, nous partions de zéro.“.

Dans la ville japonaise Hamamatsu est fabriquée la presque totalité des instruments de musique Yamaha, son seul concurrent local étant la marque Kawai. Chaque année, la municipalité organise un concours international de piano, le Festival Chopin, sans oublier son soutien auprès de nombreux groupes amateurs et professionnels.


LA FABRICATION DES PIANOS YAMAHA

À l’exception des violons, violoncelles et contrebasses, le savoir-faire de Yamaha s’étend à tous les types d’instruments et en premier le piano, qui demeure l’instrument vitrine de la marque. Yamaha en est le premier exportateur mondial. Avant la crise économique, ses usines produisaient plus de 300 piano droits et à queue par jour.

Si Steinway en produit seulement 3 000 par année, l’énormité de la production Yamaha s’explique avant tout par les moyens mécaniques mis en place. Chez Yamaha, le travail à la main est d’un autre temps. La firme fait appel à des lignes de montage alimentées par wagonnets filoguidés. Des robots bienveillants saisissent chaque corde devant être mesurée et filée suivant des données précises. Ensuite, la corde est mise en place et tendue sur le cadre. Pour chaque étape, un ordinateur est là pour veiller à ce que le contrôle de fabrication soit conforme. Même à l’étape ultime, celle correspondant à l’accord, l’oreille du technicien est épaulée par l’informatique (il peut vérifier sur l’écran la précision de son travail, en contrôlant notamment le spectre des harmoniques).

Chaque pièce constituant le piano est emboîtée pour être ensuite collée et vissée. En 1992, un piano droit Yamaha sortait des chaînes d’assemblage toutes les 67 secondes et un piano à queue toutes les 6 minutes. Teruhisa Murakami : “Nous ne recourons aux machines que lorsqu’elles travaillent mieux et plus régulièrement que l’homme. Autrefois, quand il fallait manipuler soi-même les cadres, on avait bien souvent les mains qui tremblaient au moment d’accorder.“.

La fabrication de chaque piano est soumise à un cahier des charges précis. Rien n’est laissé au hasard. Chaque technicien a un rôle précis. Si l’opérateur est la personne chargée de la surveillance des robots (sa tâche consiste, principalement, à approvisionner le fil à retordre servant à fabriquer les cordes), en fin de chaîne, les accordeurs travaillent dans des cellules insonorisées (avec un masque sur le visage pour éviter de créer une condensation préjudiciable à la qualité des pièces mécaniques). À chaque étape de la fabrication, les menuisiers, les vernisseurs et les assembleurs travaillent de leurs doigts agiles, avec une minutie garantie made in Yamaha.

Quand le piano est prêt pour l’exportation et pour éviter qu’avec le temps, l’accord et les pièces ne se soient trop déréglés, celui-ci est stocké provisoirement dans une aire à hygrométrie contrôlée. Takeji Maruta, directeur de l’usine de pianos droits : “Quand les salles de concert n’étaient pas climatisées, les instruments occidentaux introduits au Japon étaient inutilisables l’été, car l’humidité de l’air collait les touches. Voilà peut-être le moindre des enseignements que la firme japonaise ait tiré de l’étranger depuis la fin du 19e siècle.“.



LES RAISONS DU SUCCÈS DES INSTRUMENTS YAMAHA

Le succès, mais également la différence Yamaha, proviennent en bonne partie de son histoire. Depuis ses origines (les premiers pianos et harmoniums datent de 1904), la firme Yamaha n’a eu de cesse de faire face à différents séismes économiques pour survivre : incendies, crise de 1923, fabrication d’hélices d’avion imposée, etc. Devant tant de difficultés, les efforts fournis par la firme vont finir par payer.

Après la seconde guerre mondiale, pour faire face à la concurrence provenant des États-Unis et de l’Europe, la firme Yamaha trouvera un nouvel essor économique en misant sur l’innovation technologique. Teruhisa Murakami : “Contrairement à une opinion répandue, le mécanisme de double échappement utilisé pour les trilles ne provient pas d’Allemagne, mais du fabricant français Erard : les Allemands se le sont approprié et l’ont perfectionné. Ceux qui ont les idées ne sont pas toujours ceux qui les exploitent !“.

Dès 1930, en construisant un laboratoire acoustique, Yamaha sera le premier au monde à équiper un facteur d’instruments d’un tel outil. Il montre déjà, à l’époque, ses ambitions et ses orientations dans la recherche. Dans les années 50, lors d’un voyage aux États-Unis, le patron de Yamaha (Genichi Kawakami) découvre l’orgue Hammond. De retour à Hamamatsu, il demande aussitôt à ses ingénieurs de se lancer dans la recherche d’un orgue électronique substituant la lampe au profit du transistor, plus efficace et plus résistant. Une petite révolution est alors en marche. C’est ainsi qu’en 1959, Yamaha produit son premier synthétiseur entièrement basé sur des transistors, le modèle Electone.

Mais la légende de la firme Yamaha n’aurait pas été ce qu’elle est, sans le concours de quelques personnalités hors du commun, tel Teruhisa Murakami, qui se trouve propulsé à la une des journaux, pour être devenu l’accordeur officiel du concertiste Sviatoslav Richter durant les années 60. L’accordeur avait ses petits secrets, sa façon bien à lui de régler un piano. C’est d’ailleurs pour ces raisons-là qu’il deviendra l’accordeur officiel du festival de Menton en 1967.


L’ÉCOLE DE MUSIQUE YAMAHA

Dix années après la fin de la seconde guerre mondiale, le Japon conservait encore de nombreuses traces du conflit. Le pays devait complètement se reconstruire. En regard de l’explosion des ventes de l’automobile et de l’électroménager pendant les années 50/60, celle du piano faisait pâle figure. Yamaha voyait dans ces biens de consommation moderne, sa véritable concurrence. Il lui fallait créer des appels d’offres pouvant satisfaire de nouveaux investisseurs comme de nouveaux clients. Au Japon, le piano n’était pas encore une priorité économique, d’autant plus que son prix élevé le destinait davantage aux salles de concert qu’au particulier. Yamaha se devait donc d’anticiper ses futures exportations.

Alors, pour rebondir, Yamaha crée sa première classe instrumentale en 1954. Cela va être le premier maillon d’une longue chaîne qui va rapidement rayonner au-delà des frontières du pays. Cinq années après sa création, l’École Yamaha compte déjà 20 000 élèves. Véritable institution pédagogique, l’École Yamaha prétend alors apporter des solutions pédagogiques dans de nombreux domaines : le chant, la composition, la technique instrumentale, etc. Les écoles ont été créées pour susciter des vocations et produire à la chaîne de nouveaux talents. Dans le pays du soleil levant, le piano fini par s’imposer et vient s’inscrire dans la tradition, dans l’éducation des jeunes filles à marier, mettant le shamisen et le koto (les deux instruments traditionnels, emblème du pays) au second plan. Au début des années 60, le nouveau pari lancé par Yamaha est en train de réussir.

L’École Yamaha devient un système pédagogique, mais également économique qui s’exporte bien. L’Amérique, le Mexique, le Canada, la Thaïlande, l’Allemagne, s’en saisissent. La France n’y échappera pas et succombera à son extraordinaire rayonnement en 1973. Depuis, le système mis en place par la maison nippone n’en finit pas de grossir et compte actuellement plus de 300 000 élèves à travers la planète (dans + de 40 pays).

Devant ce succès planétaire, la concurrence réagira. Les firmes Kawai et Suzuki vont créer leur “philosophie” orientale de l’éducation musicale de masse. Derrière toutes ces écoles se dessinent d’autres enjeux bien plus économiques… celui d’acheter et d’utiliser du matériel de la marque. À partir de 1970, Yamaha, à grand renfort de publicité, annonce des prix très bas et accède ainsi à un tableau de chasse très convoité par la concurrence.

Véritable pépinière à “talents”, Yamaha fonctionne à la façon d’un outil de promotion où tout est réalisable. De la prise en main des touts petits (les musi-clubs, sorte de classes maternelles instaurées par la firme), jusqu’à l’obtention de diplômes et la participation à des concours, Yamaha imite très bien le concept élitiste déjà présent dans les autres pays. Avec une attention toute particulière, l’école Yamaha produit également ses professeurs, avec un cursus qui doit coller à leur politique. La “liberté démocratique” de l’enseignement est régie, dictée seulement par des méthodes : pas de droit à l’erreur et pas d’initiative hasardeuse ! Ici, c’est un enseignement de masse conduit sur des rails qui fait foi.

Pour consolider sa position de leader et sa différence envers la concurrence, la firme Yamaha organise des festivals de musique internationaux, qui propulsent aux yeux du monde entier ses meilleurs élèves autour d’un orchestre baptisé le JOC (Junior Original Concert). D’autre part, pour sensibiliser les jeunes, Yamaha organise le Music Ouest, sorte de compétition mettant en rivalité de nombreux groupes de musique moderne aux influences diverses… Mais la cerise sur le gâteau revient à l’IEF (International Electone Festival) qui place en avant uniquement les instruments de la firme. Chez Yamaha, on n’est jamais mieux servi que par soi-même !

En France, les écoles Yamaha sont appuyées par ses distributeurs locaux. La firme est également très active dans les conservatoires et les écoles de musique municipales, en organisant des récitals et des masters classes avec le concours d’artistes de renom. Quand elle en a l’occasion ou la possibilité, la firme Yamaha met à contribution les magasins de musique, en organisant des démonstrations d’instruments (sans oublier, au passage, d’utiliser les compétences de certains musiciens pour améliorer ses nouveaux “joujoux”).

Ainsi, à travers ce monopole fédérateur made in Yamaha, avec ses écoles, ses instruments de musique et autres trouvailles, tout concorde et tout s’élève dans un seul but, une seule vision réductrice : la preuve vivante que l’autonomie économique prend souvent le pas sur la raison et sur la sagesse. Yamaha, par sa prolifération, est certainement un bon exemple du système appelé aujourd’hui : l’économie de marché.



YAMAHA INVENTE TOUJOURS

Si, de nos jours, la société Google achète à tour de bras de nombreuses sociétés, Yamaha pourrait faire figure de précurseur quand, en 1973, pour conserver son avancée technologique, la firme avait acheté à l’Université Standford les droits planétaires du premier circuit LSI (Large Scale Integrated). Huit ans plus tard sortait le premier clavier numérique GS-1. Depuis, Yamaha est devenu le distributeur de divers circuits imprimés (LSI) pour les leaders de l’audiovisuel (lecteurs CD, ordinateurs, jeux électroniques, etc.).

Toutefois, les initiatives technologiques prises par Yamaha ne suffisent pas à contourner le marasme ambiant de l’économie au début des années 90. L’activité instrumentale fléchit et les résultats financiers ne cessent de décliner. Face aux fabricants coréens et tchèques, la vente des pianos Yamaha recule et suite à une crise interne mettant en cause la direction même, Yamaha doit trouver de nouvelles pistes… Ce sera l’ingénieux “système Silent” qui va venir au secours de la firme et relancer son image novatrice…

Ce système révolutionnaire va permettre au pianiste de s’exercer dans le silence (avec un casque) en remplaçant le système mécanique du piano acoustique par un autre, tout aussi ingénieux, mais reposant sur un dispositif électronique avec capteurs optiques. Des systèmes en kit sont ainsi vendus alors que d’autres sont déjà configurés par avance dans l’achat du piano. Le pianiste peut facilement passer d’une mécanique à l’autre, à sa convenance.

Sans remettre en cause directement la destinée du piano acoustique, cette alternative a permis de réconcilier l’instrument avec des utilisateurs venus d’autres horizons. Aujourd’hui, les prix ont baissé et rien n’empêche d’utiliser un toucher piano assorti d’une sonorité de violon ou de trompette ! En fabriquant ce système, Yamaha a réalisé un doux rêve pour de nombreux pianistes : ne plus être obligé de jouer sur des claviers à ressort de mauvaise qualité. Ce coup de pouce technologique a donc relancé la vente du piano traditionnel en lui ouvrant de nouveaux horizons plus en phase avec l’évolution du marché et le désir des utilisateurs. Une fois de plus l’avancée technologique Yamaha a eu du flair, et ce n’est pas eux qui s’en plaindront !

Par PATRICK MARTIAL (Piano Web - 03/2010)



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