L'info culturelle des musiques d'hier et d'aujourd'hui
MUSIQUE DE FILMS

LES CHANSONS CÉLÈBRES DU CINÉMA

Si certaines chansons sont devenues célèbres au cinéma, ce n'est certainement pas un hasard, car presque toutes possèdent une histoire construite autour de rencontres humaines et de circonstances qui leur ont été favorables. Ainsi en est-il de celles qui ont été sélectionnées ici et qui ont contribué, pour une grande part, à la renommée du film.


LA CHANSON, UNE PRÉSENCE SOUVENT INDISPENSABLE

Dans un film, la raison pour laquelle on remarque une chanson provient généralement du scénario qui la met en valeur. Une chanson ne se justifie pas à elle seule si elle n'est pas capable de renforcer ou de justifier une scène, le caractère d’un héros ou d’une héroïne ou, comme dans les comédies musicales, en servant de fil conducteur aux scènes parlées.

On pourrait encore trouver bien d'autres raisons qui justifie la présence d'une chanson dans un film, tant sa présence est désirée. Depuis l’apparition du parlant, elle a su se glisser dans bien des genres : le western, le policier, le drame, la comédie... Même les films de science-fiction ou d'horreur parviennent à glisser dans leur BO un petit espace pour une ou deux chansons (One Mo Kiss, Dear dans Blade Runner ou dans un autre registre, He's Back (The Man Behind The Mask), dans Vendredi 13, chapitre VI)

© Oscar Winning best picture - Une scène issue du film Casablanca (Humphrey Bogart et Dooley Wilson - 1943)

Parfois, c'est l'inverse qui se produit. Un film qui atteint les sommets du box-office est tenté d'extirper de sa BO une chanson considérée comme mineure par la production pour la mettre au premier plan. Distributeurs et producteurs l'ont bien compris. Les chansons, qui occupaient hier encore une position accessoire pour épauler l'image, sont devenues des outils promotionnels de premier plan pour annoncer, par exemple, la sortie d’un film : insertion dans une bande-annonce, interprétation des chansons dans des émissions télévisées… C’est ainsi que la plupart des grands studios actuels opèrent pour capitaliser à la fois sur le film et la BO correspondante.


COMPILATIONS DE CHANSONS ET BANDE ANNONCE

En 1973, American Graffiti de Georges Lucas (1973) marque un tournant dans l’utilisation des musiques à l'écran. American Graffiti va apporter sa pierre à l'édifice en créant une nouvelle passerelle entre cinéma et chanson. La BO, composé uniquement d’une succession de tubes issus des années 50/60, permet d’entendre Chuck Berry, Fats Domino, Bill Haley, Buddy Holly, The Platters, The Beach Boys, etc.

Ce nouvel échange de "bon procédé", qui réunit à la fois des chansons d'origines diverses et un cinéma à thème, a depuis fait ses preuves jusqu'à produire une esthétique cinématographique très fleurissante. Alors que dans American Graffiti, le rock’n’roll se sent pousser des ailes, c’est la musique disco qui donnera La fièvre du samedi soir en 1977. Toutefois, le tournis des ventes surviendra en 1984 avec le film Dirty Dancing qui, malgré son petit budget et des acteurs encore peu connus, réussira le tour de force de devenir l'un des albums les plus vendus de tous les temps (32 millions d’exemplaires)

N’oublions pas le rap, le hip hop et les chansons urbaines – souvent synonyme de musique de banlieue – qui ont trouvé leur place dans les BO à « inflation compilatoire ». Citons : Juice (1991) avec Naughty By Nature, Menace to Society (1993) qui se déroule dans les profondeurs obscures de Los Angeles, How High (2001) ou encore Mile (2002) avec notamment la chanson Lose Yourself d’Eminem.

À travers toutes ces BO qui contiennent du bon et du moins bon, avec parfois des chansons d’époques différentes, les réalisateurs visent généralement un public jeune. L’avènement des vidéo-clips n’est pas étranger à ces BO fourre tout, dont la moindre des préoccupations consiste à puiser dans le catalogue existant des succès passés et présents.

Ces BO n’ont bien sûr qu’un rapport très éloigné avec l’acte créatif puisque le matériau de base est déjà là, toutefois, pour le cinéma et la chanson, c’est certainement une bonne façon de cohabiter sans trahir les qualités respectives de l’un et de l’autre. Les clips sont de parfaits exemples en utilisant la chanson phare de la BO. Le « scénario » est fort simple… En règle générale, pour inciter la personne à découvrir le film, on voit l'interprète de la chanson partager son décor avec des images significatives. Cela s’apparente à de la publicité sans en porter le nom, à une « com » très efficace pour valoriser une bande-annonce lors de la sortie du film et même après.


DES CHANSONS ET DES HISTOIRES

01- ABSOLUTE BEGINERS - David Bowie / Gil Evans (Julien Temple - 1986)

La bande son de Absolute beguiners est constituée de la réunion du chanteur pop David Bowie et de l'arrangeur de jazz Gil Evans. On retrouve dans les arrangements pour big band de Gil Evans, la couleur sonore propre à cet artiste, audacieuse et risquée, de la même verve que dans l'album consacré à Jimi Hendrix. Une bande sonore agréable à écouter où se côtoient le jazz, le rock et la pop-music, mais en décalage avec le sujet abordé par le film de Julien Temple (la musique de l'Angleterre à la fin des années 50).


02 - AIN'T THAT A SHAME - Fats Domino (Edward L. Cahn - 1956)

Fats Domino, pionnier du piano rock des années 50, signe avec Blueberry Hill son deuxième plus grand succès. Reprise sous le titre "Isn't that a shame !" par le chanteur blanc Pat Boone, quelques mois après sa création, elle devint deuxième au box-office de l'époque. La chanson apparait dans les films Shake, Rattle and Roll (Edward l. Cahn - 1956) et American Graffiti (George Lacas - 1973). Tout en ayant marqué son époque, la chanson ne parviendra pas à se hisser au sommet des charts.


03 - AQUARIUS - Jérôme Ragni, James Rado - Galt Mac Dermot (Hair - 1967)

Chanson emblème du mouvement Hippie annonçant une nouvelle ère dans une débauche de chillums et d'oripeaux fleuris, cette chanson est la plus célèbre de la comédie musicale Hair créée à New York en 1967. L'adaptation française fut confiée à Jacques Lanzmann (les chanteurs Julien Clerc et ensuite Gérard Lenorman en furent les vedettes). Le réalisateur Milos Forman réalisera 10 ans plus tard une version cinématographique avec des chorégraphies remises au goût du jour par Twyla Tharp. Let the sunshine in est l'autre chanson phare de cette comédie musicale.


AQUARIUS (du film HAIR - réalisation : Milos Forman - 1979)


04 - AS TIME GOES BY - Herman Hupfeld (Casablanca - Michael Curtiz - 1942)

Comment ne pas être séduit par Ingrid Bergman écoutant cette chanson interprétée au piano par Dooley Wilson (Sam). As time goes by sert surtout à introduire en flash-back l'épisode amoureux d'Ingrid Bergman avec Humphrey Bogard à Paris, même si elle sert aussi de fil conducteur tout au long du film. On retrouve cette chanson sous des airs bien différents pour les films Play it again Sam (Tombe les filles et tais-toi - Herbert Ross - 1962), When Harry met Sally (Quand Harry rencontre Sally - Rob Reiner - 1989) ou encore dans une version jazz pour le film Autour de minuit grâce aux doigts du pianiste Herbie Hancock (Bertrand Tavernier - 1986).


05 - BABY ELEPHANT WALK - Johnny Mercer, Hoagy Carmichael - Henry Mancini (Hatari - Howard Hawks - 1962)

Baby Elephant Walk est une musique très gaie qui illustre une scène où un jeune éléphant sort d'une mare. Le rythme épouse un boogie-woogie lent voulant illustrer la démarche rapide de l'animal. Baby Elephant Walk est une des nombreuses compositions issues de la carrière de Henry Mancini (auteur de La panthère rose), une musique qui parviendra à s'extraire pour devenir une chanson interprétée à de nombreuses reprises, notamment par Bill Haley & His Comets en 1964 et Pat Boone l'année suivante. en 1965. Baby Elephant Walk réappaîtra quelques années plus tard, mais cette fois-ci dans un film à l'intérieur duquel la mélodie sera samplée par Willi One Blood pour habiller le chorus de la chanson Whiney Whiney (Dumb and Dumber - 1994).


06 - THE BALLAD OF ALAMO - Paul Francis Webster - Dimitri Tiomkin (Alamo - John Whane - 1960)

Comme pour Baby Elephant Walk, c'est le cinéma qui contribuera à l'existence de la chanson. Pour le film Alamo, John Wayne (acteur, mais également metteur en scène du film) désira une musique nostalgique et amère pour illustrer le siège du fort Alamo par les Mexicains. Cette musique plaintive écrite par Dimitri Tiomkin et chantée par un chœur lors de la séquence finale sera reprise à la trompette pour devenir un thème musical décisif dans un autre western où l'on retrouve John Wayne, Rio Bravo. Ce thème obsédant intitulé Daguello est joué pendant toute la durée du siège pour anéantir le moral des soldats américains. À noter la chanson The Ballad of Alamo interprétée par le chanteur de country Marty Robbins en 1961.


07 - LA BAMBA - Traditionnel

On retrouve la musique La bamba dans de nombreux films d'origine mexicaine, mais pas seulement. Cette mélodie traditionnelle vieille de plus de deux siècles a été utilisée dans des comédies musicales : Fiesta (Richard Thorpe - 1947), Go, Johnny Go (Paul Landres - 1958) et plus récemment pour le film La bamba (Luis Valdez - 1987). Dans cette dernière version, elle atteindra la place de numéro 1 dans les charts américains (chose assez rare pour une chanson de langue espagnole). En France, c'est Dario Moreno qui, en 1961, la fait connaître au public hexagonal dans une adaptation de Jacques Plante. Cette chanson apparaîtra bien plus tard dans un film de James Bond License to kill (Permis de tuer - John Glen - 1989).


RITCHIE VALENS (Lou Diamond Phillips) : LA BAMBA (réalisation : Luis Valdez - 1987)


08 - BASIN STREET BLUES - Spencer Williams

Au départ, ce blues est interprété par Louis Amstrong en compagnie de la chanteuse Billie Holiday dans le film New Orleans (Arthur Lubin - 1947) Le même Armstrong reprendra le thème quelques années plus tard dans The strip (Leslie Kardos - 1951). Basin Street Blues apparaît également dans l'adaptation romancée de la vie du tromboniste Glenn Miller avec James Stewart, The Glenn Miller story (Anthony Mann - 1954).


09 - BLUE MOON - Lorenz Hart - Richard Rodgers

La chanson Blue Moon a été utilisée dans de nombreux films. Citons notamment, la version façon Harpo Marx jouée à la harpe : At the circus (Edward Buzell - 1939) ; par le crooner Mel Thormé en 1948 et par l'actrice Susan Hayward en 1952. Cette chanson retrouvera une certaine popularité à la sortie du film New York, New York (Martin Scorsese - 1977) avec Mary Kay Place et Robert de Niro. En France, l'intérêt pour cette chanson ne se démentira pas puisqu'elle sera reprise dans le film d'Alexandre Arcady Dernier été à Tanger (1987) où elle est interprétée par Anna Karina... sans oublier la version d'Elvis Presley qui constitue l'un des leitmotive de Mystery train (1989).


10 - BYE BYE BABY - Jule Styne - Léo Robin

Il est impossible d'évoquer cette chanson sans penser immédiatement à Marilyn Monroe. Tiré du film Gentlemen prefer blondes (Les hommes préfèrent les blondes - Howard Hawks - 1953), cette chanson est chantée de façon délicieuse et susurrée à l'oreille de Tommy Nooman avant d'être reprise en fin de morceau, en chœur, par des boys éperdument amoureux. Les deux autres chansons excellentes qui accompagnent le film sont A little girl from little rock et Diamonds are a girl's best friend, elles ont été créées à l'origine pour un show de Broadway en 1949 avec Carol Channing dans le rôle de Lorelei Lee (la blonde).


11 - C'EST COMME ÇA - Catherine Ringer - Fred Chichin

Les Rita Mitsouko, après le triomphe de Marcia Baila jouent dans un film de Jean-Luc Godard, Soigne ta droite (1987) où ils interprètent la chanson C'est comme ça. Cette même chanson sera reprise par Christine Pignet dans le film La vie est un long fleuve tranquille (Étienne Chatillez - 1988).


LES RITA MITSOUKO : C'EST COMME ÇA (clip officiel)


12 - THE END - The Doors

The end est une longue chanson au contenu œdipien qui fit scandale en son temps quand Jim Morrison la chantait dans les clubs où le groupe The Doors se produisait. Le premier metteur en scène à l'utiliser sera Martin Scorsese pour le film Who's that knocking at my door (1968) où elle accompagne les ébats amoureux du couple Harvey Keitel et Anne Colette. Quelques années plus tard, la chanson apparaîtra au générique du film Apocalypse Now (Francis Coppola - 1979).


13 - LES FEUILLES MORTES - Jacques Prévert - Joseph Kosma

C'est sans doute une des mélodies de Joseph Kosma les plus reprises à travers le monde par les musiciens de jazz. Le chanteur/comédien Yves Montand la fait connaître au grand public en la mettant à son répertoire au début des années 50. Elle apparaît pour la première fois à l'écran dans le film Les portes de la nuit (Marcel Carné - 1946), jouée à l'harmonica par Jean Vilar. Avec l'adaptation anglaise de Johnny Mercer, elle deviendra vite un succès mondial sous le nom de Autumn Leaves. Reprise depuis par une foule d'interprètes, elle est toujours au répertoire de nombreux artistes. Serge Gainsbourg rendra hommage à la célèbre mélodie et à son parolier avec La chanson de Prévert.


14- GELSOMINA - Nino Rota (La strada - Federico Fellini - 1954)

La chanson de Gelsomina est un parfait exemple des chansons tristes que les spectateurs aimaient entendre dans les années cinquante. La mélodie jouée à la trompette dans le film de Fellini accompagne le calvaire d'Anthony Quinn à la mort de sa compagne (Giulietta Masina). Elle sera adaptée en France par Robert Chabrier sous le titre Pauvre enfant perdue et chantée par Lucienne Delyle.


15 - I GOT RHYTHM - Ira et George Gershwin

I got rhythm est une chanson irrésistible, empreinte de syncope et qui donne envie de bouger. Reprise par un grand nombre de jazzmen, elle est un des fleurons de la comédie musicale de Broadway dans les années 30. Composée par George Gershwin sur des paroles écrites par son frère Ira Gershwin, la chanson apparaîtra dans le show Girl Crazy (1930) et dans plusieurs versions cinématographiques du même nom : en 1932 (William A. Seitzer), interprétée par Kitty Kelly - en 1943 (Norman Taurog), par Judy Garland et Mickey Rooney - en 1966 (Alvin Ganzer), par Coonie Francis, Harvey Presnell et Louis Armstrong. George Gershwin composera en 1933 une suite de variations basée sur la chanson et intitulée : Variations on "I got rhythm".


SUITE... QUAND LE CINÉMA FAIT HONNEUR À LA CHANSON


Par Elian Jougla (Cadence Info - 03/2019)

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