TECHNIQUE ET MAO



CRÉER UN SON AVEC UN SYNTHÉTISEUR ANALOGIQUE

Cette page fait suite à : LES BASES DE LA SYNTHÈSE ANALOGIQUE (SOUSTRACTIVE)


Les synthétiseurs, derrière leurs boutons et leurs diodes clignotantes, utilisent certaines variables de l'acoustique utilisées naturellement par de nombreux instruments. Ainsi, lorsqu'on joue une note do ou sol, le synthétiseur met en jeu le paramètre le plus important : la hauteur. À cette note s'ajoute un volume sonore variable (pianissimo au forte, par exemple), que l'on traduit par intensité. Pour que cette note soit identifiable et unique, intervient le timbre, sorte de carte d'identité sonore de l'instrument. Le piano, la flûte ou la guitare possèdent un timbre dont la sonorité n'est comparable à aucune autre. En jouant, l'interprète module ces trois caractéristiques du son et le synthétiseur les reproduit.


HAUTEUR, INTENSITÉ ET TIMBRE

Quand on évoque la hauteur, l'intensité et le timbre, l'électronique traduit respectivement ces données par : fréquence, amplitude et spectre harmonique.

Communément admise par une grande majorité de compositeurs, la musique occidentale exploite les sons par tranche de demi-ton. La musique occidentale utilise sept notes (do, ré, mi, fa, sol, la, si) et cinq demi-tons intermédiaires (correspondant aux touches noires du piano). Cependant, en dehors de ces 12 demi-tons, il est toujours possible sur de nombreux synthétiseurs d'aller au-delà de cette limite imposée. Le synthétiseur, en tant qu'instrument de recherche, est capable de tirer parti d'intervalles plus faibles, comme quand celui-ci devient un instrument à sons variables, imitant la voix, le violon ou le hautbois.


Explication technique

Sans développer des arguments trop techniques, la construction d'un son est liée à un phénomène physique. Ce phénomène est produit par une succession de dépressions et de compressions de l'air, qui se répète identique à lui-même au bout d'un certain temps appelé "période". L'amplitude représente l'élongation (écartement maximum de ces dépressions et compressions par rapport à un point fixe), la période, qui correspond à la durée de ce mouvement, et la fréquence, qui est le nombre de mouvements identiques en une seconde (cycles par seconde, se traduisant en hertz).

Une même note, à la même octave et sur des instruments différents, vibrera à la même fréquence. Un étalonnage précis a été institué. Il correspond à une convention internationale reposant sur un diapason unique, le LA 440 hertz. Selon la gamme dite "tempérée", les fréquences de toutes les notes sont ainsi imposées (en descendant et en partant du La 440 Hz, nous obtenons un Sol dièse à 415 Hz, un Sol à 392 Hz, etc.). Le son à l'octave supérieure implique un redoublement de sa fréquence et une division par 2, dans le sens inverse. Les "LA" successifs auront donc pour fréquence : 55 Hz, 110 Hz, 220 Hz, 440 Hz, 880 Hz, 1760 Hz, etc.



LA PERCEPTION DU SON : LE DÉCIBEL



Théoriquement, l'oreille humaine est capable d'entendre des fréquences se situant dans une plage allant de 20 Hz à 20 000 Hz. Ses qualités auditives diminuant avec l'âge, pour qu'un individu perçoive certaines fréquences, celles-ci doivent être assez intenses. L'intensité s'évalue en décibels (dB).

L'intensité d'une fréquence varie avec le temps… L'amplitude d'un signal détermine l'enveloppe du son. Pour de nombreux sons, quand ceux-ci sont livrés à eux-mêmes, leur amplitude baisse graduellement, c'est le cas du piano ou de la guitare. À l'inverse, d'autres instruments comme l'orgue reposent sur une amplitude quasi constante.


Si la fréquence et l'amplitude sonore délivrent un certain message, leurs informations ne sont pas suffisantes pour connaître la nature de l'instrument qui l'émet. Pour identifier le son, de façon certaine, le timbre est sa caractéristique. Celui-ci est traduit par le technicien sous le nom de "spectre harmonique".


LE SPECTRE HARMONIQUE

Une note jouée sur un instrument se décompose en une somme de sinusoïdes élémentaires dont les fréquences respectives sont des multiples entiers de la composante la plus grave de la note émise. Cette composante grave correspond à la fondamentale ou harmonique de rang 1. Les fréquences supérieures s'établissent dans l'ordre croissant des fréquences (harmonique de rang 2, rang 3, rang 4, etc.). Prenons comme exemple un La 55 Hz. Le spectre harmonique se construira aux fréquences suivantes : La 55 Hz (harmonique 1), 110 Hz (harmonique 2), 165 Hz (harmonique 3), 220 Hz (harmonique 4), etc.

Selon son rang, une harmonique est paire (2, 4, 6, 8) ou impaire (1, 3, 5, 7). Les harmoniques font résonner l'octave (la note à l'octave supérieure : La 110 Hz - La 220 Hz), la quinte (La 110 Hz - Mi 165 Hz), mais peuvent également faire entendre la tierce, la quarte et toutes sortes d'intervalles qui enrichissent plus ou moins la structure sonore du timbre.

En plus de posséder une structure sonore plus ou moins riche en harmoniques, l'identité du son est liée à leur intensité et qui se traduisent différemment en fonction du type d'instrument utilisé. De même, le timbre d'une note diffère lorsqu'on la transpose à une hauteur supérieure. La fondamentale devenant plus aiguë, certaines harmoniques dépassent alors le spectre audible de nos oreilles.

SPECTRES HARMONIQUES DE SIX INSTRUMENTS À DIVERSES FRÉQUENCES
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CONSTRUCTION DES ONDES SUR UN SYNTHÉTISEUR



Important : un "son musical" sans harmoniques n'existe pas. Il se réduirait à une sinusoïde pure. Un "son musical" est toujours constitué d'une série d'harmoniques incluant la fondamentale.

De l'onde en dent de scie à l'onde rectangulaire

La construction d'une onde en dent de scie sur un synthétiseur est basée sur l'addition de toute la série des harmoniques d'une fondamentale (à condition que les amplitudes des harmoniques soient inversement proportionnelles à leur rang), alors que la somme d'harmoniques impaires aboutit à un signal carré. À partir de ces deux constitutions de base (dent de scie et carré), on obtient des formes triangulaires qui sont composées d'une sinusoïde avec quelques harmoniques impaires. Quant aux ondes rectangulaires, elles sont le résultat de signaux carrés dont le rapport cyclique est modifié.

ÉQUIVALENCES SPECTRALES DES PRINCIPAUX SIGNAUX D'UN SYNTHÉTISEUR
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LES TRANSITOIRES

Autres éléments entrant dans la caractéristique du timbre, l'attaque et l'évanouissement du son.

La naissance d'un son se traduit par des bruits inharmoniques. Ces transitoires proviendront par exemple d'une corde frottée, du souffle d'un instrument à vent ou du bruit mécanique du marteau dans un piano.

Les inharmoniques (ou partiels) sont des fréquences non multiples de la fondamentale. Exemple avec le piano qui est un instrument riche en inharmoniques, celles-ci s'amplifiant lorsqu'on se dirige vers les notes aiguës de l'instrument.

Si l'intensité, la naissance comme l'évanouissement des harmoniques sont modulés différemment selon les instruments, leur famille révèle des spectres harmoniques communs.


LES FORMANTS

ÉQUIVALENCES SPECTRALES
DES PRINCIPAUX SIGNAUX
D'UN SYNTHÉTISEUR
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Quand une corde est frottée et que le déplacement de l'archet est dans l'attaque, il présente des bruits brefs et faibles avec des harmoniques équidistantes qui s'éteignent ensemble alors que quand la corde est pincée, elle fabrique des oscillations qui diminuent graduellement et dont les harmoniques aiguës s'évanouissent plus vite que les graves. Quant à la corde frappée, elle possède un spectre inharmonique avec une attaque intense.

Les instruments à vent et à anche sont composés de formants dont les harmoniques sont équidistantes et peu nombreuses. Les graves sont intenses et l'attaque se caractérise par un bruit de souffle qui fait naître graduellement les harmoniques dans un ordre irrégulier. Le spectre est riche en harmoniques voisines qui forment une région qualifiée de "formantique".




ANATOMIE DU SYNTHÉTISEUR ANALOGIQUE



Les synthétiseurs sont classés en deux grandes familles : analogique et numérique. Alors que le synthétiseur numérique crée le son en partant d'une sinusoïde pure à laquelle on ajoute des harmoniques et des transitoires, le synthétiseur analogique part d'un signal le plus riche possible en fréquences et que l'on tamise dans toutes sortes de modules afin de parvenir à un son imitatif d'un instrument ou d'un bruit.

À la base, un synthétiseur analogique doit comprendre les éléments suivants : oscillateur, amplificateur, filtre, générateur d'enveloppe, un clavier et accessoirement un modulateur en anneaux. Le synthétiseur utilise l'électricité et principalement la tension en volts pour contrôler et commander la puissance des sons.

Les trois paramètres acoustiques sont pris en charge par le VCO (Voltage Controlled Oscillator ou oscillateur contrôlé en tension). Il détermine la hauteur des sons ainsi que la forme d'onde. Le VCF (Voltage Controlled Filter ou filtre commandé en tension), détermine le timbre et le spectre harmonique. Le VCA (Voltage Controlled Amplifier ou amplificateur commandé en tension) module l'intensité et le volume sonore.


DU VCO AU LFO

Le VCO ou oscillateur transforme l'électricité en ondes périodiques que l'on peut comparer aux sources acoustiques brutes. De leurs performances dépendent la qualité sonore. Le choix d'une forme d'onde (carrée, rectangle, dent de scies…) définit une couleur du son. Le VCO détermine également la hauteur et la stabilité du clavier. Un VCO produisant des fréquences basses est appelé LFO (Low Frequency Oscillator ou oscillateur de basses fréquences). Il permet de jouer sur les VCO et les VCF et de créer des effets aléatoires comme l'effet de phasing (son tournant). En raccordant un VCO avec un LFO, on crée des phénomènes cycliques à durée réglable, comme le vibrato et le trémolo. Les possibilités sonores d'un synthétiseur sont étroitement liées aux nombres de VCO qu'il possède.


BRUIT BLANC ET BRUIT ROSE

Le bruit blanc et rose sont des générateurs. Le bruit blanc est un son comportant toutes les fréquences, alors que le bruit rose privilégie les fréquences graves. Ces deux générateurs aident à moduler un son, un timbre pour imiter si nécessaire le souffle ou la percussion, par exemple. Ils sont capables de générer des bruits imitant une tempête, le vent ou un décollage d'avion.


ÉVOLUTION SONORE D'UNE NOTE
TRADUITE EN ADSR
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L'ADSR

Le VCA est un amplificateur commandé par un générateur d'enveloppe (ou contour) qui définit dans le temps le signal fourni par le VCO. L'enveloppe est régie par quatre paramètres (parfois moins, mais parfois plus sur les synthétiseurs plus récents), réunis sous l'appellation ADSR : Attack, Decay, Sustain, Release, que l'on traduit par attaque, chute, maintien et extinction.

À l'enfoncement d'une touche du clavier, le synthétiseur met en marche le trigger, qui est un circuit qui définit pour l'enveloppe un temps de montée jusqu'à un niveau maximum commandé par le réglage de l'Attack, puis une période de chute déterminée par le réglage du Decay, qui se stabilise et se maintient grâce au réglage du Sustain. Après le relâchement de la touche, c'est le réglage du Release qui fait que le son meurt immédiatement ou pas. Ces modulations sont transformées et amplifiées par le VCA de manière à être rendues audibles (En savoir plus : l'ADSR générateur d'enveloppe).


LE RÔLE DU VCF

TROIS ACTIONS POSSIBLE
D'UN MEME VCF
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Le VCF permet d'agencer, de réunir ou d'éliminer des informations ou d'en grossir certaines. Il modifie la richesse harmonique du signal fourni par le VCO en laissant passer ou en éliminant certaines fréquences. Il agit également en tant que résonateur quand il amplifie une bande étroite de fréquences, ce qui est particulièrement bienvenu quand on favorise une région formantique. Un VCF peut être commandé par le signal d'enveloppe, de sorte que le signal en provenance du VCO subira des traitements harmoniques.


MODULES EN SUS

Certains synthétiseurs possèdent des générateurs de tension aléatoire (sample and hold), un ou plusieurs modulateurs en anneaux (ring modulator) et autres modules.

Le modulateur en anneaux est un système avec deux entrées et une sortie. Les deux entrées reçoivent généralement des signaux en provenance du VCO, alors que la sortie laisse passer une relation complexe, sans rapport harmonique avec les signaux d'entrée. Ce module permet d'obtenir, entre autres, des sons de cloche ou de gong.

Le sample and hold fournit une suite de tensions aléatoires dont on règle la vitesse et l'amplitude. Sur un synthétiseur analogique, on peut régler le rang du VCO comme sur un orgue (32', 16', 8', 4'…) grâce au Range.

Le portamento est un dispositif qui offre la possibilité de lier graduellement deux notes ou un ensemble de notes (portamento polyphonique). La hauteur de la première note atteint, en "sirène", celle de la seconde.

Quant au pitch bend, qu'il ne faut pas confondre avec le portamento, c'est un effet qui intervient uniquement de façon manuelle, généralement au moyen d'une molette ou d'un ruban. Il décale graduellement la hauteur du clavier. Manié avec intelligence, il permet de créer ou de reproduire de nombreux effets sonores propres à d'autres instruments (guitare, violon...)


LE SYNTHÉTISEUR SUR COMMANDE

Dans les années 70, les fabricants proposaient déjà des synthétiseurs très différents dans leur conception et dans leur manipulation. Il existait l'appareil modulaire réservé à l'expert et le synthétiseur à présélection, pour le novice. Entre les deux extrêmes, tous les genres existaient. Du synthétiseur avec mémoire pour conserver une sonorité sans avoir à refaire tous les réglages à celui tout polyphonique, quand toutes les notes du clavier peuvent être jouées simultanément et délivrer autant de sons que de touches enfoncées.

Après cet exposé sommaire sur l'anatomie du synthétiseur, il est opportun de préciser qu'il n'est nullement nécessaire d'être un pianiste ou un électronicien pour jouer avec plaisir du synthétiseur. Son paradoxe étant de nous faire découvrir de nouvelles sonorités, même quand nous pensons qu'il nous a livré tous ses petits secrets !

SUITE : 3 - LE VCO ET LE DCO – FONCTIONNEMENT ET UTILITÉ


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