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IMPROVISER AU PIANO ÉTAPE PAR ÉTAPE

La première des grandes difficultés pour celui ou celle qui souhaite improviser sur son piano est de se libérer intérieurement. Pour certaines personnes, c’est très difficile. Toutefois, si l’on adopte une bonne méthodologie, les premiers obstacles ne sont pas insurmontables…


LA LIBÉRATION INTÉRIEURE

Dans le cadre d’une improvisation, si les connaissances en harmonie permettent de comprendre quelle gamme on doit jouer ou pas avec tel ou tel accord, elles ne vous diront pas « comment faire pour bien faire ». Dès lors, des questions se posent et le doute s’installe. Tout devient encore plus difficile quand la soi-disant difficulté repose sur des comparaisons qui n’ont pas lieu d’être.

Ce qui différencie un "grand improvisateur" vis-à-vis d’un débutant ne se trouve pas dans les « ingrédients » qu’il utilise, puisque ce sont les mêmes pour tous : accord, gamme, note, silences… mais dans la façon qu’il a de les exploiter à la puissance 10 ou 100.

Quand on est au stade où l’on recherche avant tout une approche efficace et rationnelle de l’improvisation, tout doit reposer prioritairement sur des solutions simples, faciles à mettre en œuvre. Pour réussir une improvisation, le débutant ne doit pas courir après les grands spécialistes de l’improvisation qui ont de l’expérience, de la pratique et suffisamment de recul pour faire leur propre analyse.

La solution immédiate ne se trouve pas non plus dans le développement d'un style ou dans le déploiement d'une grosse technique. C'est encore trop tôt  ! Gérer une première improvisation, c’est comprendre que la performance n’a pas lieu d’être et qu’elle est pour le moment secondaire. Il faut d'abord accepter l'erreur (fausse note), l’hésitation, la mise en place maladroite et que sais-je encore. Il ne faut pas s’en inquiéter, d'autant que la prise de conscience d'une faiblesse serait dans ce domaine plutôt un avantage pour progresser. La priorité, c’est d’abord se lancer.

D'autre part, passer par la case des écritures ne s’impose absolument pas. Ne pas avoir besoin de partition sous le nez est très libérateur et formateur. Seuls les accords peuvent être notés dans le cas où vous avez du mal à les retenir.

Si vous avez BIEN COMPRIS toutes ces indications, alors seulement vous pourrez commencer à entrevoir des résultats positifs à court terme.


PREMIER PALIER : LE CHOIX DES ACCORDS

Le premier palier est le plus important de tous, car c’est celui-ci qui va vous permettre d’aller de l’avant. Il consiste à improviser sur une suite d’accord en utilisant une gamme unique. L’avantage est certain, puisque pour un improvisateur, sauter de gamme en gamme est plus difficile à maîtriser et doit être réservé à des improvisateurs plus avancés.

La suite d’accord, vous pouvez la créer vous-même (je vous le conseille vivement). Pour cela, vous avez le choix entre 7 accords fondamentaux qui sont dans la tonalité de Do majeur (si vous optez pour une autre tonalité, il vous suffira de transposer les accords) :

  • Do majeur
  • Ré mineur
  • Mi mineur
  • Fa majeur
  • Sol majeur
  • La mineur
  • Si diminué

Vous remarquerez que ces sept accords sont des triades, c'est-à-dire des accords composés de la fondamentale, de la tierce et de la quinte. Si vous avez le niveau, par extension, vous pouvez utiliser des accords à 4 notes (en rajoutant la 7e) pour obtenir une sonorité plus jazz comme ci-dessous :

  • Do majeur 7
  • Ré mineur 7
  • Mi mineur 7
  • Fa majeur 7
  • Sol 7
  • La mineur 7
  • Si demi-diminué

À vous de trouver une suite d’accord acceptable à vos oreilles. Il ne s’agit pas, je le rappelle, de porter un jugement de valeur, mais simplement de se lancer, d’oser. Le plus simple est d’y aller progressivement en choisissant d'abord une suite composée de 2 accords, puis de 3 accords, 4 accords et ainsi de suite ; accords que vous jouerez en boucle, de préférence sur une mesure à 4 temps.

Rien ne vous oblige d’utiliser la tonalité de Do. Optez plutôt pour une tonalité avec une ou deux altérations à l’armure. Musicalement et techniquement, c’est plus intéressant à travailler.

Dans l’exemple ci-dessous, tous les accords appartiennent à la tonalité de Ré majeur.


Exemple 1

Improviser, c'est apprendre à se contrôler

L’observation de ce premier exemple nous montre que dans chaque mesure, le rythme des notes est identique. Si cela facilite l’exécution, cet exemple donne l'impression de ressembler bien plus à un exercice qu’à une improvisation. La seule façon d'y remédier est de se concentrer sur le développement de nouveaux rythmes à la main droite.

Ces rythmes-là doivent provenir de votre imagination, et s'ils varient d'une mesure à l'autre, c'est tant mieux, car cela prouve que votre imaginaire est en éveil. Le plus important, pour ne pas dire le plus capital, est de conserver la métrique : le 4 temps par mesure. Le piège est de s'égarer en étant emporté par le désir de jouer des notes qui s'enchaînent en oubliant le "cadrage" imposé par la mesure. S'il vous semble que tel est le cas, alors, pour vous en assurer, enregistrez-vous et écoutez comment le "dérapage" intervient. Improviser, c'est aussi apprendre à se contrôler !


DEUXIÈME PALIER : LE RYTHME

Tout en restant sur le classique 4/4 et pour éviter tout égarement rythmique de la main gauche, continuez à jouer uniquement des rondes côté accord. Les « efforts » les plus importants sont à réaliser avec la main droite, non pas que la main gauche ne joue pas un rôle important pour un pianiste, mais dans notre cas d'école « comment faire pour bien faire », il faut juste imaginer que l’improvisation que vous réalisez sur votre piano sort d’un instrument soliste comme le saxophone ou la flûte. Donc, pas d’accord à la main droite, mais seulement des suites de notes uniques, comme le serait un chant mélodique.

Dans ce second exemple, si le phrasé rythmique et mélodique des deux premières mesures reste identique à l’exemple précédent, les 3e et 4e mesures emploient des notes et des rythmes différents.


Exemple 2

Ce second exemple nous place déjà en face d’un « problème » que tout improvisateur redoute : celui de créer du neuf à la volée. La peur de se répéter et de tomber dans une routine peut le conduire dans une impasse qui aboutit parfois à tout abandonner faute de trouver des solutions à sa convenance. L'improvisation est un challenge qu'il faut accepter dans la durée, continuellement. Pour contrer cette crainte légitime, votre « effort » consistera alors à rechercher, encore et toujours, de nouvelles idées pour progresser.


TROISIÈME PALIER : L’USAGE DES SILENCES

Dans une improvisation, jouer « économe » peut se révéler payant. Une improvisation ne consiste pas à jouer une avalanche de notes à toute vitesse. Une ou deux bonnes idées simples valent toujours mieux que des tas de notes qui s’enchaînent sans relief. Le meilleur contre-exemple n’est-il pas la musique de blues ? Il sera toujours temps pour vous d’aborder des points plus techniques, comme celle de l’utilisation des modes majeurs, mineurs et autres, bien plus tard, une fois que se lancer sera devenu pour vous comme une habitude.

Les deux mesures ci-dessous incorporent des silences. Le but : rompre la cadence du phrasé… et c’est souvent efficace !


Exemple 3

Outre l’usage des silences, le phrasé dans une improvisation repose aussi sur la présence d’intervalles. Ainsi retire-t-on de l’exemple suivant deux enseignements majeurs que l’on retrouve dans de nombreuses phrases improvisées. La première est de faire alterner notes conjointes et sauts de notes (tierce dans ce cas), et la seconde de faire bouger le mouvement des notes, de façon ascendante et descendante.


Exemple 3 (suite)

QUATRIÈME PALIER : LA RÉPÉTITION DE NOTES

Le quatrième exemple, dans la tonalité de Sol mineur, utilise à la main droite trois notes qui se répètent de mesure en mesure tandis que les accords de la main gauche changent. C’est là un des multiples développements utilisés par les improvisateurs de jazz et de rock pour produire une tension dynamique à un moment bien précis de leur solo (plus rarement pour lancer l’improvisation). De même, la répétition d’une note unique est un autre moyen couramment utilisé.


Exemple 4

Une autre variante consiste à conserver le rythme, mais en changeant les notes.


Exemple 5

Remarque : À la 4e mesure, l’accord de Ré 7 (qui n’appartient pas à la tonalité de Sol mineur) oblige l’utilisation de la note mélodique fa#.


EN CONCLUSION

Quand on débute dans le domaine de l’improvisation, on peut nettement améliorer son langage en approfondissant ces quelques développements. Il suffit parfois de rejouer un même passage et de ne changer que deux ou trois notes pour obtenir quelque chose d’extrêmement intéressant.

N’hésitez pas à vous exercer sur des tempos différents. Démarrer lentement puis, en fonction de vos progrès, accélérer progressivement jusqu’à arriver à un tempo rapide. Un rythme accéléré aura pour conséquence d’écourter votre délai de réflexion et d’imposer une autre façon de développer vos phrases. Une fois de plus, il faut tester et persévérer sans craindre la fausse note. C’est d’ailleurs une bonne façon de se remettre en question pour progresser et pour se convaincre qu'en improvisation rien n'est insurmontable.

Par ELIAN JOUGLA

Lors d'un prochain cours, nous continuerons ensemble l'examen de l'improvisation en l'abordant autrement.

À CONSULTER

IMPROVISER AU PIANO DANS LES RÈGLES DE L'ART (entretien)

L'IMPROVISATION AU PIANO, UNE MUSIQUE FAITE D'EXPÉRIENCE (analyse)


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1 - ARRANGEMENT
2 - ÉVEIL MUSICAL
3 - HARMONIE
4 - IMPROVISATION
5 - PIANO ET TECHNIQUE
6 - RYTHME
7 - SOLFÈGE/THÉORIE
8 - PROGRAMMATION & LOG.
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