HISTOIRE DE LA MUSIQUE ET DES INSTRUMENTS



L'HARMONIUM, L'ORGUE À CLAVIER EXPRESSIF OUBLIÉ ET MÉPRISÉ – HISTOIRE

Au commencement du 19e siècle, certains instruments jouissaient déjà d'une réputation aussi brillante que solide, et à leur tête, le piano et le violon. Tous deux, du point de vue musical, avait leur place de prédilection marquée dans l'esprit des artistes et des compositeurs. L'harmonium, au contraire, qui en était encore à sa « période de rodage », devra attendre la seconde moitié du 19e siècle pour acquérir ses premiers perfectionnements et s'imposer.


L'HARMONIUM, UN INSTRUMENT MAL-AIMÉ

Qui de nous, n'a pas rencontré sur sa route un misérable harmonium de campagne dans une modeste paroisse ? Dans un tel cas, par chance, mais aussi pour le malheur des oreilles du visiteur de passage, quand l'instrument fonctionne, des sons grincheux, lamentablement tristes et ternes s'élèvent. Qui ne connaît pas l'harmonium sous cet aspect si rebutant ? Pourtant, a-t-on jamais rejeté le piano parce que l'on a eu à subir le contact sonore de ces cordes rouillées et de ces marteaux dont le feutre est entaillé ?

Or, les harmoniums, de fabrication extrêmement soignée, d'aspiration plus élevée, se sont peu répandus, tandis que les modèles défectueux bénéficiaient d'une diffusion rapide : de telle sorte que la réputation médiocre de ces derniers – étant devenue générique – suffira à détourner l'attention des artistes en faussant leur jugement ; le type même de fait qui condamne un instrument avant de lui avoir accordé toutes les chances de se racheter.

Avant d'acquérir sa « maturité musicale », le sort de l'harmonium est alors réglé : il aura pour but de remplacer le grand-orgue dans des salles de dimensions restreintes. Certes, il ne procure pas cette impression de majesté sonore détenue par son grand frère. Avec sa sonorité grêle et nasillarde, mais surtout, l'absence de pédalier qui enrichit le grand-orgue d'une « troisième main » et le peu de variété des timbres et d'autres choses encore, rendent l'imitation bien imparfaite.

© Frédéric Bisson (flickr.com) – Harmonium, Château de Martainville à Martainville-Épreville.

Pourtant, parvenu au sommet de sa laborieuse et longue carrière, l'harmonium avait éprouvé le bonheur, immense pour lui, de joindre à son œuvre créatrice quelques maîtres éminents de la musique du 19e siècle : Charles Gounod, César Franck, Saint-Saëns, Jacques-Nicolas Lemmens, etc. L'harmonium ne se retrouvait plus seul et isolé, abandonné, mais au contraire partageant l'affiche en accompagnant un violon, un piano ou un chant. Un tel programme ne pouvait, dès lors, que démontrer les diverses facultés de l'instrument ; les œuvres graves et classiques y trouveront dès lors leur place autant que les pièces au caractère plus léger et plus fantaisiste.

L'orgue-expressif, autre nom donné à l'instrument, contient une palette de couleurs autrement riches que notre imagination nous porte à le croire. Durant sa croisade contre l'injustice, quelques éditeurs auront le courage de publier des manuscrits portants sur l'utilisation de ses registres ; deux modes, l'un composé de signes ronds pour les modèles ordinaires, l'autre en signes carrés pour les harmoniums d'Art enrichis par la double-expression. (1)

Tout cet ensemble de négligences n'a que peu contribué à la gêne générale. D'où vient la faute ? Des facteurs qui ne se sont pas entendus sur la classification des registres à adopter autant que des compositeurs et des éditeurs qui ont négligemment oublié de mentionner ces signes si précieux, faute desquels on risque le plus souvent de dénaturer l'identité sonore d'une œuvre.

Faut-il ajouter à cela que l'ignorance des qualités de l'orgue-expressif est par trop manifeste à une époque où les instruments polyphoniques acquièrent une importance sans égale, au point de primer sur tous les autres ? Certainement ! En outre, faut-il déclarer – ce qu'on semble ignorer et qui pourtant est admis si naturellement pour tous les autres instruments – que nul artiste ne peut jouer d'un harmonium sans l'avoir consciencieusement étudié et en avoir appris toutes les ressources ? Peu de musiciens savent s'en servir et ils n'en connaissent ni le but, ni les moyens, ni les avantages qu'il offre réellement.

Enfin, faut-il mentionner qu'il n'existait pas en France, ou tous les arts avaient pris des proportions si grandes et si prospères au 19e siècle, aucun enseignement officiel de l'apprentissage de cet instrument, alors qu'au même moment, tous les autres instruments disposaient de classes ouvertes à leur étude ?

1. Double-Expression. Nom donné par l'inventeur, Victor Mustel (1853), à un système appliqué à l'orgue-expressif pour rendre individuelle chaque fraction du clavier et pour permettre que ces fractions soient tour à tour à la volonté de l'exécutant, et isolés des effets de la pédale d'expression (nuances).


L'HARMONIUM AU GRAND JOUR

Depuis fort longtemps, les œuvres musicales confortent l'usage de la polyphonie. C'est un besoin esthétique pour le compositeur qui ne conçoit plus la musique autrement. Cela est si vrai qu'un musicien, à l'écoute d'un chant en a cappella, donc sans accompagnement, se représente la forme orchestrale qui pourrait l'enrichir, comme les accords qui devraient l'accompagner. Mais pour les claviéristes, la polyphonie, c'est surtout ça : interpréter une mélodie et pouvoir l'accompagner sans l'aide de personne d'autre que soi.

Or, si le piano domine le 19e siècle, là où il se montre limité, l'harmonium parvient à se surpasser dès que le besoin de produire des sons continus s'impose. En effet, sur un piano, la mélodie et les accords ne sont que suggérés sur une brève durée, ce qui explique que l'interprète se sent obligé d'insister sur une même note en la répétant si celle-ci possède, à ses yeux, une valeur indéniable.

© Archive du Conservatoire des Arts et Métiers – Fac-Similé exact du dessin original de Grenié représentant l'orgue-expressif, objet de son brevet.

Idem pour les accords. Ce qui conduit nécessairement à développer une approche technique ciblant de bonnes aptitudes rythmiques et variées : indépendances des mains, accords répétitifs, brisés ou arpégés. C'est l'unique façon pour un pianiste de meubler l'espace sonore. Ce qui peut conduire à des compositions extrêmement complexes et qui, de fait, exclu un grand nombre d'interprètes.

Le grand-orgue et l'harmonium contournent cet obstacle, tout en conservant une polyphonie totale. Cela vaudra au nouvel arrivant (l'harmonium) d'être accueilli, dès l'origine, avec une authentique ferveur, malgré les imperfections inséparables liées à toute invention récente.

Dès lors, pour accompagner les chants religieux – entre autres - l'harmonium, comme le grand-orgue, est apparu idéal pour soutenir les voix en maintenant la durée des accords autant que nécessaire. Sa parenté réelle, indéniable, avec le majestueux interprète des harmonies sacrées était évidente, et on ne vit, on ne voulut voir que cela.

Immédiatement, une place lui fut assignée dans les humbles églises de campagne, dans les chapelles, pour accompagner les chants. Partout où l'exiguïté du local, quand ce n'était pas l'insuffisance des ressources pécuniaires, l'harmonium avait sa place. Le petit frère du grand-orgue remplit alors son rôle en assistant de sa sonorité les chants religieux et les messes.

Cependant, la traîtrise de la comparaison humaine fera son œuvre et commence à imposer un regard méprisant sur l'instrument vis-à-vis du grand-orgue, lui reprochant son manque de puissance quand, par ailleurs, on souligne sa beauté sonore... comme un paradoxe. Naturellement, l'harmonium n'a pas un seize pieds de tribune, mais, en tenant compte de cette disparité considérable, l'instrument est en revanche, pour sa taille, d'une remarquable puissance. S'il est habilement construit et proportionné, pourvu d'une soufflerie suffisante, il remplit à souhait non seulement une chapelle, mais même une vaste église.

Certes, l'harmonium n'a pas les sons purs et limpides des flûtes d'orgue, ni ces basses ronflantes d'une incomparable beauté, enveloppantes et magiques, que même un grand orchestre a du mal à atteindre. Cela est incontestable quand on écoute un grand-orgue dans une acoustique exemplaire. Finalement, tout ce que l'on demandait à l'harmonium, c'était de se rapprocher modestement de son grand frère en effectuant, autant que possible, les mêmes fonctions musicales, la puissance en moins, bien évidemment.

L'harmonium possède pour lui une qualité suprême que le grand-orgue n'a pas et qu'en vain, jusqu'ici, les organistes et les facteurs ont rêvé d'atteindre : il détient l'expression. C'est sa revanche ! Le grand-orgue se contente de la nuance, ce qui n'est pas réellement la même chose ; la nuance graduée du crescendo et du decrescendo est tout de même une belle et certes précieuse conquête de la facture moderne.

L'harmonium d'art, l'instrument d'artiste, grâce aux progrès de la facture, à d'ingénieux perfectionnements qui ont accru énormément la sensibilité de la lame et reculé les limites du fortissimo et du pianissimo. Il possède l'expression développée au plus haut degré, nuancée à la fois et accentuée, graduée dans une progression très étendue, depuis le plus léger souffle sonore jusqu'à la plus intense énergie, ou bien apportant dans le détail, dans l'attaque de la note, des finesses, des intentions qu'on eut cru réservées au coup d'archet.


LE SON DE L'HARMONIUM

© Bastien Milanese (flickr.com) – Harmonium d'art, modèle Alexandre Père & Fils (1896).

On sait que par imitation du grand-orgue, l'harmonium, dès l'origine, a possédé plusieurs jeux pouvant être diversement associés, mélangés au moyen de registres qui les appellent à volonté sur son clavier. La variété entre ses timbres est, d'autre part, très accusée, très riche, et surtout très fortement nuancée. L'orgue à tuyaux possède deux organes producteurs du son, absolument distincts, le « tuyau à bouche » et le « tuyau à anches », d'où résultent deux types extrêmement tranchés de sonorité, au contraste violent et qu'on peut même trouver excessif.

Le type intermédiaire n'existe pas : c'est notamment par des mélanges habilement combinés qu'on peut nuancer le timbre résultant des ensembles entre ces deux extrêmes, la flûte, la trompette. Les facteurs sont pourtant arrivés à réaliser aussi deux timbres moins éloignés, très caractérisés cependant : l'un plus rond, plus doux, tendant vers la flûte d'orgue, comprenant les registres "cor anglais, "flûte", "bourdon", "clarinette", "voix céleste", entre autres. L'autre, plus clair, plus mordant, se rapprochant de ses jeux d'anches, mais moins âpres, comprenant les registres : "clairon", "fifre", etc. Puis entre les deux, plusieurs teintes sensiblement différenciées comprenant les registres : "basson, "hautbois", "musette", "baryton", etc.

À ce propos, on a souvent objecté que les jeux de l'harmonium ont peu de rapports avec les instruments de l'orchestre qu'ils seraient censés représenter, alors qu'en réalité, les premiers facteurs prirent, pour inscrire sur les registres, les premiers noms venus au hasard de vagues analogies. Néanmoins, il est important de souligner ceci : si les jeux de l'harmonium pris séparément n'ont qu'un rapport lointain avec l'instrument d'orchestre désigné, l'artiste harmoniumiste peut cependant, presque toujours, obtenir les sonorités de cet instrument, grâce aux combinaisons des divers registres. Et c'est là précisément un secret et une des merveilleuses qualités de l'harmonium d'art.

LE MÉTAPHONE

Pour obtenir un son rond et équilibré, une nouvelle invention viendra puissamment en aide : le"Métaphone". Au moyen d'un mécanisme spécial qui enferme à volonté les jeux "découverts" à timbre clair, subitement, ceux-ci prennent la douceur, la rondeur, le moelleux des jeux "couverts". (1) Par cette transformation, le hautbois acquiert la finesse d'une chanterelle, la musette se rapproche d'une clarinette d'orchestre adoucie et le basson devient très rond, avec des résonances rappelant celles du cor d'harmonie. Ainsi, se trouvent d'un coup, ajoutées à l'instrument, de nouvelles voix ; l'équivalent de plusieurs nouveaux jeux, de nuance moyenne et très sympathique. Mais c'est surtout sur la sonorité d'ensemble que ce dispositif exerce une remarquable influence. Elle devient tout autre, plus pure et plus douce, plus profonde.

1. Jeux couverts. On appelle jeux couverts les séries d'anches enfermées, dissimulées, comme les jeux de devant, sous une table recouverte de molleton. En couvrant un jeu, on peut arrondir son timbre et faire disparaître les sons harmoniques de l'anche.


L'HARMONIUM À L'USAGE

Pour fonctionner, l'harmonium réclame une soufflerie qui doit être mise en action par son utilisateur grâce à une pédale. Toutefois, pendant la première période de l'histoire de l'instrument, les effets de la pression du pied se faisaient sentir simultanément sur tous les jeux, sur toutes les notes émises, comme dans un chœur ou l'ensemble des voix croissent ou décroissent en même temps, non à la façon d'un orchestre où chaque instrument à son tour peut se détacher de la masse sonore. Cette indépendance manquait à l'harmonium, mais une autre évolution allait y remédier : la double-expression. Agissant directement sur le souffle même qui l'anime, distribuant à volonté des pressions fluctuantes sur les divers jeux, sur les différentes régions du clavier, elle permet de nuancer différemment, et en sens inverse si on le désire, les parties distinctes du chant ou de l'harmonie.

Aussitôt, une mélodie se dégage, plane, se développe comme le solo d'un instrument indépendant, quand, en même temps, avec des jeux différents, avec d'autres timbres, se produisent des harmonies, des accords, des dessins d'accompagnement, se tenant dans la demi-teinte ou suivant discrètement les nuances du chant. Cette double-expression représentera un atout pour que l'harmonium soit considéré comme l'instrument expressif, l'instrument chantant, par excellence, libre dans ses moyens les plus variés d'accompagner.

© Archive du Conservatoire des Arts et Métiers – L'orgue dit "Américain".

Seuls, entre ceux utilisés au cours du 19e siècle, le violon et le violoncelle le dépassent ; aucun autre ne s'en approche. Cependant, on lui reconnaîtra des parentés avec le piano, en particulier ce mécanisme de percussion, grâce auquel l'attaque de la note se rapproche de celle de la corde frappée. L'harmonium acquiert une légèreté toute spéciale, une justesse, une vélocité extrême et la possibilité d'exécuter, à la rigueur, sur son clavier, certaines musiques de piano : faculté dont on a beaucoup abusé au grand détriment du style propre à l'instrument.

L'ORGUE AMÉRICAIN

L'harmonium étant autre chose que l'orgue, la hantise, justement, de cette similitude a jadis fait dédoubler pour ainsi dire le type instrumental et, créer, à côté de l'harmonium proprement dit, une individualité hybride, accessoire, et dont il faut ici dire un mot, parce qu'on l'établit généralement en parallèle avec lui : l'orgue dit "Américain" (pas le Hammond). Dérivant d'un principe similaire, procédant du même organe sonore à hanche libre, l'orgue américain est tout autrement constitué.

S'il possède une grande douceur de son, due à des dispositions particulières, il a un timbre mou, terne, qui n'a rien, quoiqu'on en dise, de la limpidité du tuyau, sans compter les jeux semblables et les basses sourdes et sombres. L'ensemble produit l'illusion d'un certain mélange de jeux d'orgue, comme serait le bourdon uni aux gambes, entendu dans un vague lointain... Cependant, cet effet nocturne et tendre n'est pas sans une certaine poésie. Au reste, la comparaison qui nous est ici imposée entre ces deux types d'instrument peut se résumer en deux mots : avec l'harmonium, l'exécutant est le maître de son instrument, avec l'orgue américain, il en est l'esclave.

L'ART DE LA PÉDALE D'EXPRESSION

De cette originalité, réelle et bien tranchée, que nous devons reconnaître à l'harmonium d'art, deux conséquences sont à déduire. La première, c'est qu'il existe un mode d'exécution en rapport avec son caractère. II faut expérimenter et assimiler tout cela. L'art de la pédale d'expression qui est le trait caractéristique de l'harmonium, qui en est le cachet, la valeur, la vie, tout le charme de l'instrument, en est aussi la difficulté. La pédale est pour l'harmonium ce qu'est l'archet pour l'instrument à cordes ; et chacun sait que le maniement de l'archet qui semble extrêmement simple, n'est pas absolument facile à acquérir.

Il existe aussi des degrés. L'exécutant qui arrive à une habileté déjà fort convenable, peut encore faire longtemps des progrès. Il est important d'insister, parce qu'il y a ici un préjugé qui a été fatal à l'instrument. Les pianistes, les organistes même, s'imaginent que pour en tirer parti, point n'ait besoin d'étude préalable. Erreur grossière ! Tout instrument de musique que l'on veut faire sonner musicalement, doit être travaillé. Mais rassurons les sceptiques, l'aperçu des études à suivre, n'apparaît pas tellement considérable que l'on ne veuille résolument se donner la peine de réaliser celles-ci convenablement. Généralement, on ne débute pas par une pratique immédiate sur l'instrument. Il est préférable de commencer par le piano pour arriver à l'harmonium avec une technique qui abrège une grande partie de ses études. Une expérience de quelques mois suffit alors amplement pour que l'organiste s'en rendre maître.

Son clavier est extrêmement léger et souple ; ses registres bien sous la main et très faciles à connaître. Savoir s'en servir, c'est une question de familiarité. La soufflerie n'est pas dure, ni fatigante, même pour les petits pieds d'une femme. Ce n'est pas non plus une préoccupation, car l'habitude, une fois acquise, cela marche tout seul. On n'y pense même plus.

II en est de même du genre de musique propre au répertoire de l'harmonium et c'est là, la seconde conséquence qu'il est essentiel de mettre en lumière. D'une manière générale, la musique de piano ne lui convient pas. Quant à la musique d'orgue, comme précisé précédemment, elle peut très raisonnablement – sauf que la partie de la pédale fera défaut – être exécutée sur l'harmonium, au besoin en étant un peu arrangée. Sur l'instrument, le répertoire pour orgue y fait un bel effet, et met correctement en valeur certaines de ses qualités sonores. Bien entendu, ce sont les œuvres spécialement composées à son intention – en un mot, écrites par un compositeur-harmoniumiste – que le petit frère de l'orgue délivre sa véritable sonorité et ses effets.

L'harmonium est capable d'assumer plus d'un rôle. Instrument soliste, il n'est pas moins favorablement doué pour la musique d'ensemble, soit à titre concertant, soit dans un rôle de simple accompagnateur. Le caractère de ses timbres se combine parfaitement avec le piano ; la diversité de leur tempérament respectif les faisant valoir tous deux par le contraste. Dans cette association, l'harmonium produit l'impression d'un beau quatuor à cordes, très plein et très large, soutenant de ses accords liés les formes rythmiques du piano, tantôt, il procure l'illusion d'un chant instrumental de violon, de hautbois ou de flûte, planant sur l'harmonie brisée des arpèges. Tous ces effets sont d'une fraîcheur délicieuse. L'harmonium se marie également avec la harpe dont il laisse transparaître toutes les notes égrenées à travers ses tenues limpides.

Enfin, il s'allie admirablement au violon, au violoncelle ; par son analogie de timbre, il se fond au quatuor des cordes auquel il apporte, indépendamment des effets de détail, une profondeur de sonorité, une plénitude incomparable, jouant ainsi, à son égard et toute proportion gardée, le rôle qu'assume le grand-orgue dans son union avec l'orchestre. Dans celui d'accompagnateur des instruments solistes quels qu'ils soient, et mieux encore, des voix – étant donné un genre de musique approprié à son caractère, il réalise les plus charmants effets.

Les sons prolongés soutiennent la voix comme une harmonie liée d'orchestre en demi-teinte. Une voix de femme accompagnée de pures sonorités d'orgue avec l'accession, selon le caractère de la mélodie, du piano ou de la harpe est le plus séduisant rêve musical qu'on puisse imaginer. Ensuite, à l'église, au chœur, à la chapelle, mais aussi en concert avec un orchestre, un bon harmonium, sans prétendre aux finesses d'un instrument d'artiste, s'il possède un beau son, une soufflerie assez puissante, des lames bien travaillées, peut rendre, avons-nous dit, d'excellents services et trouver sa place.

par PATRICK MARTIAL (Piano Web – 04/2023)
(source : "L'orgue expressif ou Harmonium" d'Alphonse Mustel)

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