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LES PIANOS PETROF, UNE MARQUE ET UNE HISTOIRE

En 2018, année qui commémorait le centième anniversaire de la fondation de la Première République tchécoslovaque, la maison Petrof réalisait le piano droit Republika. Au-delà des armoiries qui l'ornaient, ce modèle suscitait une réponse encourageante à l'essor de la maison Petrof et témoignait de leur indépendance après avoir affronté différentes épreuves économiques et politiques. Implanté en république tchèque (Théquie), la société propose depuis cinq générations de facteurs de pianos, des modèles qui ont fait leurs preuves et dont la qualité première est de posséder un timbre sobre et cohérent répondant aux exigences des répertoires les plus divers.


DES PIANOS QUI S'EXPORTENT DANS SOIXANTE-CINQ PAYS

Au contact d'un piano, chaque doigt qui s'y pose détient son opinion. Les raisons qui conduisent à aimer ou détester tel ou tel modèle sont souvent argumentées. Au-delà des performances sonores, du design et du prix constaté, certains fabricants cherchent à anticiper les motivations et le goût des pianistes qui évoluent inévitablement. Celui qui consiste à intégrer des dispositifs électroniques pour établir une nouvelle interactivité a actuellement bonne presse. D'autres préfèrent conduire leurs efforts dans l'étude de nouveaux matériaux comme le carbone ou à travers différents assemblages d'essences de bois : épicéa, érable, noyer... comme les pianos Petrof.

© Petrof (antpetrof.com)

Ces recherches ne sont pas vaines. L'acoustique est un domaine extrêmement complexe qui n'a pas encore tout révélé. Les chances pour que le piano de demain ne sonne pas comme celui d'aujourd'hui sont grandes. Du reste, il suffit de réaliser un petit bond dans le passé pour le vérifier. Écoutez un piano droit ou à queue construit il y a quelques dizaines d'années et vous constaterez qu'il ne sonne pas comme la majorité des modèles actuels !

La société Petrof mise avant tout sur le marché international pour démontrer son savoir-faire. Présentement, près de 90 % du chiffre d’affaires provient de ses ventes à l’export ; en tout, soixante-cinq pays qui réunissent l'Europe, l'Asie (principalement la Chine à 35 %) et le continent africain.

Pour appuyer son extension, la maison Petrof propose des initiatives pédagogiques, comme en témoigne la "Dakar Music School" ouverte en 2016, au Sénégal. Ce centre de formation présente deux objectifs. Le premier : favoriser l'apprentissage du piano dans un pays qui manque d'infrastructure, et le second : éviter à tout pianiste désireux de faire carrière, de devoir déserter son pays.

Par ailleurs, cette exportation des pianos Petrof en Afrique rappele sur le tapis la question débattue du changement climatique. En effet, la survie d'un piano acoustique confronté à des chocs thermiques aussi intensifs que changeant agissent sur sa pérennité. La maison Petrof, aurait-elle considéré la question ? Certainement, comme d'autres marques. Du moins, il faut l'espérer. Les propos tenus à la radio RPI par la fondatrice de la "Dakar Music School" - la pianiste et musicologue slovaque Livia Laifrová Gaye - se veulent rassurants, bien qu'elle ait précisé que le Sénégal n'affrontait pas, pour l'instant, de gros changements climatiques : « J’ai la chance de travailler avec deux accordeurs sénégalais basés à Dakar qui vont bien s’occuper des pianos. Le climat est agréable toute l’année. C’est vrai qu’il y a une période des pluies, mais les pianos sont convenablement préparés par leur facture traditionnelle et de bonne qualité. » (source RPI)


UNE RÉALISATION ARTISANALE EN PLEINE ÉVOLUTION

Comme d'autres marques prestigieuses, les pianos Petrof ne sont pas usinés à la chaîne, mais réalisés à la main, à 80 %. Ceci explique que jusqu'à sa finalisation, chaque modèle demande des semaines d'attente pour voir le jour. Par ailleurs, il est bien connu que le résultat d'un piano repose sur diverses compétences et que chacune constitue un « meccano » dans lequel interviennent différents métiers, de la menuiserie jusqu'à l'harmonisation. Le résultat demeure une question d'organisation et de planification qui dépendent étroitement de l'attention accordée à chaque étape. L'entreprise Petrof mise avant tout sur sa sélection des essences et des pièces qu'elle fabrique (70 % des composants).

La société consolide sa réputation en diversifiant sa gamme de modèles : pianos droits ou à queue, de l'instrument d'étude jusqu'au modèle de prestige (Ant Petrof). Tandis que les droits sont représentatifs du milieu de gamme (P118, P122, P125, P131 et P135), ceux à queue (P159, P173 ou P194) prennent place généralement dans une salle de concert ou dans un studio d'enregistrement. Notons au passage que les modèles précités, 100 % européens, s'accompagnent d'autres exemplaires de fabrication asiatique constitués de différentes sous-marques (Akord, Fibich, Rösler, Scholze, etc.), et que les Weinbach, préfabriqués en Chine, sont assemblés par Petrof.

Les quelques pianistes ambassadeurs, qui ont pour tâche de poser les doigts sur un piano Petrof à l'occasion d'un concert ou d'une retransmission télévisée, ne représentent qu'un maillon pour démontrer les compétences et le professionnalisme de la société. La maison mère, après avoir fabriqué durant sa longue existence plus de 600 000 instruments de musique, a estimé qu'il était temps pour elle de présenter une « vitrine » ilustrant en détails son histoire. C'est ainsi qu'est né le musée Petrof non loin de la manufacture de Hradec Králové.

Néanmoins, Petrof a frappé encore plus fort avec la construction du complexe culturel et commercial « Petrof Gallery » qui a ouvert ses portes en 2017. Ce lieu polyvalent est doté d'un bar, dans lequel il est permis de jouer sur un piano Petrof installé à demeure, et d'une vaste salle capable d'accueillir jusqu'à 500 personnes pour des concerts ou d'autres événements, et dont certains peuvent être visionnés sur YouTube.


© Petrof (antpetrof.com) - « Le piano à queue de concert "Ant. Petrof 275" est le produit phare issu des plus de 155 ans d'histoire de l'entreprise. Il s'inspire du meilleur des modèles "Mondial" et "Mistral", mais en même temps, avec sa construction entièrement nouvelle, il apporte une plus grande capacité de débit sonore, notamment dans les aigus, bien sûr, tout en conservant les graves indéniables typiques de la marque. Ajoutez les meilleurs mécanismes Renner, les matériaux utilisés et le design accrocheur, et nous avons un piano à queue qui vise à avoir sa place dans la classe premium. » (Ivo Kahánek, pianiste)

L'HISTOIRE DES PIANOS PETROF

L'histoire des pianos Petrof pourrait être celle d'une saga familiale digne de figurer dans un documentaire. En effet, il est difficile de passer sous silence les différents écueils que la marque a traversés en plus de 150 ans d'existence. Comme souvent, cette longévité est due au départ à la passion et à l'audace d'une personne.

Antonin Petrof, ébéniste par tradition familiale, est le premier témoin de ce récit. En 1857, alors qu'il n'a que 18 ans, c'est par l'entremise de son oncle maternel Jan Heitzmann, fabricant de piano avec Cunningham Hölzl, qu'il se passionne pour l'instrument et qu'il apprend le métier à Vienne avant de retourner en Bohême en 1864, année où il construit son premier piano à Hradec Králové, une ville modeste située au nord-est du pays.

Située dans le centre-ville, à proximité de la cathédrale du Saint-Esprit, le modeste atelier d’ébénisterie du père d'Antonin Petrof subit des transformations pour devenir la manufacture de pianos Petrof quand, deux ans plus tard, sur un plateau situé entre l'Elbe et la Bistritz, la bataille austro-prussienne de Sadowa éclate et encercle Hradec Králové. Cet affrontement décisif qui marque la fin de la lutte de pouvoir entre la Prusse et l'Autriche n'épargnera pas la maison Petrof qui devra interrompre son activité durant une brève période avant de rebondir.

En 1874, l'entreprise déménage dans de nouveaux locaux à la périphérie de Hradec Králové. Puis, elle s'agrandit en 1880, ouvrant dans un premier temps une filiale à Temesvár en Autriche-Hongrie (Timișoara, territoire de l’actuelle Roumanie). Moins d'un an plus tard, Antonin Petrof met au point sa propre conception mécanique du clavier et lance, en 1883, la production de pianos accompagnée de la signature "A. Petrof".

À partir de 1894, la société artisanale s'ouvre à l’exportation, ce qui entrainera au début du 20e siècle un regain d'intérêt pour ses modèles en dehors de l'Europe (Amérique du Sud, Japon, Australie...).

Au moment de la naissance de la Tchécoslovaquie, en 1918, le piano ne concerne qu'une minorité de personnes, pour l'essentiel issue de la noblesse. L'histoire retiendra que son 30 000e piano fut livré à l'archiduc François-Ferdinand, héritier de l'Empire austro-hongrois, deux semaines avant son assassinat, en 1914.


RÉALISATION DES PIANOS PETROF

En 1934, les héritiers d’Antonín Petrof estiment leurs efforts récompensés en remportant une médaille d’or à l’exposition universelle. Puis, en 1948, comme d'autres entreprises familiales tchèques, la marque vivra sous l'influence du régime communiste. Malgré sa nationalisation, la maison Petrof ne se détournera pas de ses objectifs premiers : poursuivre la réalisation de pianos fidèle à sa réputation.

Après avoir reçu divers prix internationaux, un département de recherches en acoustique est mis en place au milieu des années 1950. Le champ d'investigation est le plus ouvert possible et cherche à améliorer la réponse des pianos aux différents paramètres entrant en jeu avec le son : analyse des signaux acoustiques, mesure des propriétés du bois et du métal, etc.

En 1989, suite à la "révolution de Velours" qui précipitera la chute du régime du Parti communiste et la fin de la République socialiste tchécoslovaque, les héritiers obtiennent que l'entreprise leur soit restituée après s'être endettés pour regagner les parts du capital. Puis, après plusieurs soubresauts économiques provoqués par la chute du régime, la maison Petrof poursuit ses activités et se dote d'une chambre insonorisée avec la ferme intention de poursuivre ses recherches acoustiques.

En 2000, une nouvelle fois confrontée à une énième crise financière, la société licencie la moitié de son personnel avant de remonter la pente. Puis, comme pour se prémunir économiquement des aléas qu'elle a connus et traversés : deux guerres mondiales, l'invasion nazie, ainsi que 40 ans de régime communiste, l'entreprise cherche à diversifier ses activités et commence à fabriquer des meubles de luxe en 2008.

Le dernier écueil en date est survenu en 2020, lors d'une commande pour la Chine. Celle-ci sera annulée pour des raisons géopolitiques après la visite du président du Sénat tchèque Miloš Vystrčil à Taïwan. Comme bien souvent, les conflits et les différents l'emportent sur la raison. D'après la présidente de la société Petrof (1), la perte s'est élevée à 200 000 euros. Aujourd'hui, tout est rentré dans l'ordre et les relations commerciales avec la Chine ont repris.

1 - Depuis 2004, l'entreprise est dirigée par l'arrière-arrière-petite-fille d'Antonín Petrof, Zuzana Ceralová Petrofová, appartenant à la cinquième génération des Petrof.

par ELIAN JOUGLA (Piano Web - 10/2023)

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