LE SAVIEZ-VOUS ?



"DESSINE-MOI UNE NOTE"… L’ORIGINE DES ÉCRITURES MUSICALES, DES NEUMES À L'IMPRIMERIE

Vous connaissez tous le nom des notes pour l’avoir prononcé au moins une fois dans votre vie. Nous pourrions même dire que l’existence de la musique tient dans un mouchoir de poche, puisque les notes sont seulement au nombre de sept. Vous savez sans doute aussi que celles-ci s’écrivent sur des portées et qu’elles s’accompagnent de différents signes comme les altérations et les silences... Mais savez-vous que pour parvenir à la notation actuelle, les serviteurs de la musique ont dû souvent se remettre en question avant de trouver une présentation remplissant toutes ses nombreuses exigences ?


AU ROYAUME DES NEUMES

Remontant dans le temps, voulez-vous ? Nous sommes au second siècle avant Jésus-Christ. À cette époque, vous auriez pu croiser Aristophane de Byzance, un fameux grammairien qui avait instauré un code constitué d’accents pour la langue grecque. Que voulait-il enseigner ?

© flickr.com - Détail d'une partition composée de neumes.

Que l’accent aigu devait inviter à élever la voix, à la rendre plus aiguë, et que de fait l’accent grave indiquait le contraire, en l’abaissant. En partant de ce simple exemple, les historiens et musicologues y verront l’origine des neumes, ces signes qui ornent dès le 7e siècle certains livres liturgiques en indiquant sommairement le mouvement à chanter sur chaque syllabe du texte sacré. Les neumes ont ainsi permis de passer du texte déclamé au texte chanté.

Des neumes sont encore employés dans certaines traditions, comme dans la musique religieuse byzantine. Si vous avez la chance d’avoir entre les mains un tel ouvrage, vous y verrez le texte orné de signes dont le rendu sonore - dûment codifié - est d’une grande flexibilité, surtout pour des chants qui ne sont pas, par définition, polyphoniques.

Pour l’instant, la portée n’existe pas et il faudra attendre la fin du 9e siècle, grâce à un certain Hucbald, pour que l’idée simple et séduisante de lignes parallèles permette la création des premières portées. Celles-ci, qui pouvaient comprendre jusqu’à 18 lignes, étaient accompagnées de lettres et de signes divers. Ce système de notation encore sommaire, va toutefois séduire les musiciens, chacun y trouvant son compte pour y inscrire sa musique.

Consulter : La portée et son origine


L'INTERVENTION DE GUIDO D’AREZZO

© wikimedia - Enluminure du Moyen Âge représentant Guido d'Arezzo

En 1025, le moine italien Guido d’Arezzo instaure la couleur pour certaines lignes afin de les distinguer visuellement des autres (curieusement, on retrouve cette même idée dans l'utilisation de la harpe moderne pour repérer les cordes) : le rouge indique la position du fa, le jaune pour le do, et la noire pour le la. Ensuite, pour avoir encore plus de lisibilité, d'Arezzo place des lettres en début de portée, lettres qui sont les ancêtres des clés Sol, Fa et Do utilisées dans notre musique : F pour le fa, G pour le sol, et C pour le do.

C’est aussi grâce à ce moine bénédictin que nous attribuons l’origine du nom des six premières notes de la gamme telles que nous la prononçons, de do à la. Dans les faits, il s’agit des premières syllabes des six premiers vers d’une hymne à saint Jean-Baptiste : "ut queant laxis / resonare fibris / mira gestorum /famuli tuorum /solve polluti /labii reatum / Sancete Johannes."

Le choix de cet hymne ne serait pas dû au hasard, car si l’on en croit la partition grégorienne, les versets en question commencent musicalement par les notes en question. Par hypothèse, le si vient probablement des initiales de Sancte Johannes. Quant à la syllabe do absente, elle a suppléé tardivement la syllabe ut, difficile à solfier dans un tempo rapide, et qui aurait été choisie pour rendre hommage à un certain Giovanni Battista Doni, un compositeur du 12e siècle quelque peu oublié.

Consulter : L'origine du nom des notes


L’AMÉLIORATION DE LA NOTATION

Pendant que se placent les hauteurs sur la portée et que les notes se voient attribuer une syllabe pour qu'on puisse les différencier, les rythmes ne sont pas oubliés. Progressivement, les contours neumatiques se transforment et une notation plus précise apparaît vers le 12e siècle : la notation carrée. Si elle gagne en précision, par contre elle appauvrit les possibilités car certaines inflexions neumatiques n’y sont pas transposées. Installée sur une portée de quatre lignes, elle deviendra la notation traditionnelle du chant grégorien (chant religieux occidental) conservé jusqu’à ce jour.

Après cette notation carrée qui présente des figures noires et pleines, une notation blanche apparaît au 15e siècle dans laquelle les signes précédents deviennent évidés, de forme losangée, munis de hampes et d’éventuels crochets. Enfin, c’est au 17e siècle que les notes prennent leur aspect actuel en étant ovalisées.

Auparavant, les grands principes de la musique s’enseignaient en dehors des institutions religieuses et des écoles “supérieures”. Les musiciens “amateurs”, désarmés, ne pouvaient qu’apprécier d’autant l’arrivée des partitions écrites. Tout retour en arrière semblait condamner définitivement. La notation permettait de réparer les fissures d’un enseignement oral basé depuis trop longtemps sur l’imitation et la mémorisation.

© archives.lot.fr - Une partition manuscrite du milieu du 18e siècle qui est une copie arrangée de « L’Empire de l’Amour » composé par le arquis de Brassac, René de Galard de Béarn.


L’INTERVENTION DE L’IMPRIMERIE OF COURSE !

Sans l’intervention de l'imprimerie, que serait-il advenu de l’existence de la musique ? L’invention de l’imprimerie par Johannes Gutenberg en 1450 va permettre au commun des mortels de posséder des livres et, chemin faisant, aux musiciens de pouvoir écrire proprement leurs musiques à grande échelle. Que ce soit à travers les ouvrages de théorie musicale ou à travers les partitions, l’imprimerie a surtout permis aux gens munis d’un petit bagage intellectuel d'aborder la musique, de pouvoir échanger des connaissances, des idées, pour ensuite les évaluer au demeurant.

Dès que les compositeurs comprirent le profit qu’ils pouvaient tirer de la reproduction mécanique de leurs partitions - alors que jusque là ne circulaient que des partitions copiées à la main, dans le meilleur des cas -, ils commencèrent à inonder le marché d'innombrables compositions, simples ou plus ambitieuses.

Cette débauche d’idées conduisit probablement à la standardisation de la musique imprimée. Pendant des années, les compositeurs ont utilisé librement plusieurs systèmes de notation, notamment en ce qui concerne la portée et son nombre de lignes. Ce n’est que vers les années 1500 que le système sur deux portées de cinq lignes a commencé à se généraliser - du moins en Europe - pour devenir la référence, la même que nous utilisons aujourd’hui encore.

par PATRICK MARTIAL

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