TECHNIQUE ET MAO



ARRANGEMENT : TECHNIQUE POUR ÉPAISSIR LE SON D'UNE MUSIQUE SANS RIEN CHANGER

Si réaliser un arrangement consiste à répartir « intelligemment » les scores de chaque instrument, à l'écoute, le résultat peut toutefois manquer de consistance sonore, d'épaisseur, pour être réellement satisfaisant. Pour remédier à ce problème, il existe une solution facile à mettre en place : rejouer plusieurs fois la partie originale sans rien changer. Explications…


DOUBLER, TRIPLER LES PARTIES À L'UNISSON

Monsieur X : « Que se passe-t-il si vous rejouez une même partie à l'unisson ? »

Piano Web : Côté arrangement, il n'y aura aucune conséquence, sauf au niveau du son. Le résultat obtenu ne sera pas identique. Observez et écoutez une œuvre jouée par un orchestre symphonique. Que remarquez-vous ? Les parties réservées aux différents pupitres, que ce soient les violons, les violoncelles ou les flûtes, sont le plus souvent jouées à l'unisson par plusieurs instrumentistes d'un même groupe.

Monsieur X : « Quel est l'intérêt ? »

Pouvoir équilibrer les volumes sonores des différents groupes instrumentaux de l'orchestre. Le résultat est en fonction de l'intensité de chaque instrument et de sa facilité à pouvoir se démarquer de la masse orchestrale grâce à leur timbre respectif. Ensuite, n'oublions pas qu'ici, le rendu sonore est travaillé acoustiquement, en live, sans aucune correction artificielle. Enfin, cette balance des volumes dépend en particulier de l'effectif pour chaque pupitre et du talent respectif des musiciens à interpréter convenablement sa partie placée sous les ordres du chef d'orchestre.

© cottonbro studio pexels.com - Un exemple de doublement de parties par deux violonistes et deux violoncellistes derrière la soliste.

Monsieur X : « Si je comprends bien, multiplier une même partie n'agit pas uniquement sur le volume ? »

En effet. Quand on double une partie identique, outre l'augmentation inévitable du volume, il se produit un phénomène imperceptible, mais bien réel, de déphasage. Il s'agit de micro-décalages de temps et de hauteurs.

Monsieur X : « Cela ne peut pas être évité ? »

Même avec d'excellents musiciens interprétant à la lettre la partition, un épaississement de la masse sonore est inévitable. Ce principe est bien connu des compositeurs classiques qui l'ont compris et appliqué dès que les orchestres sont devenus imposants. C'est vital. Cela a notamment permis de composer des œuvres ambitieuses comme des concertos ou des symphonies. Songez à la neuvième symphonie de Beethoven interprété avec trois musiciens et vous saisirez immédiatement l'impact que peut détenir la « masse orchestrale » dans le résultat, et même au-delà par les idées qu'elle suggère.


EN UTILISANT DU MATÉRIEL ÉLECTRONIQUE

Monsieur X : « Partant de ce principe, est-ce que la même idée peut s'appliquer avec du matériel électronique ? »

Oui, dans un home-studio équipé MAO. Depuis que le numérique a tout envahi et que les pistes se sont multipliées, l'enrichissement harmonique a fait des petits. La technique du doublage des parties s'est largement répandue jusqu'à devenir un procédé très courant. Les raisons peuvent être économiques, en faisant appel à un nombre restreint de musiciens, ou artistiques pour, par exemple, « colorer » une voix ou un instrument en particulier.

Monsieur X : « Ainsi, avec un groupe de musiciens restreint, mais représentatif, intégrant par exemple violons, altos et violoncelles, il est concevable d'imaginer un arrangement sonore reproduisant un imposant orchestre à cordes ? »

Tout à fait. Rien n'empêche techniquement dans un studio numérique de faire rejouer chaque partie une, deux, trois, voire plus, sur des pistes différentes. Quand les moyens financiers manquent ou qu'il y a urgence, ce procédé technique est employé. Il est particulièrement utilisé dans la musique de films et la chanson. De son côté, la musique classique y renonce pour respecter l'œuvre originale...

© pxhere.com - Deux ou trois voix à l'unisson ?

J'ouvre une parenthèse. Précédemment, j'évoquais la voix. Dans le domaine de la variété, il est courant de doubler, et même de tripler à l'unisson le chant principal et surtout les chœurs. Toutefois, il faut rester prudent, car chanter à l'unisson réclame la reproduction fidèle de la première voix, ce qui exclut naturellement les modulations, les effets genre vibrato et les improvisations.

Monsieur X : « Techniquement, existe-t-il des procédés qui puissent améliorer le rendu sonore ? »

Rien n'empêche de spatialiser la partie doublée en ajoutant de la réverb pour obtenir une image sonore plus profonde. Les voix et les instruments y gagneront en intensité.

Monsieur X : « Et les synthés ? »

Sur les synthés, le principe de déphasage agit de même, sauf qu'il faut éviter d'utiliser un séquenceur avec correction rythmique pour conserver les infimes variations de jeu. Par ailleurs, sur certains claviers électroniques, il existe la possibilité d'enrichir la sonorité en jouant sur l'accord des générateurs VCO ou DCO. Cela produit un effet de « flanging » qui peut se révéler utile. Cependant, à ce stade des explications, il est utile de préciser qu'il ne faut en aucun cas perdre de vue l'aspect aléatoire dans le résultat pour qu'il soit acceptable, or, dans le cas d'un oscillateur, celui-ci est dans l'incapacité de produire des modulations autres que purement cycliques.

Monsieur X : « Le mixage, peut-il aider ? »

Pas vraiment, sauf en agissant sur le positionnement stéréophonique de chaque partie rejouée. En jouant sur les extrêmes du champ stéréophonique, on obtient l'image la plus large possible, tout en évitant les problèmes de phase. Seule, parfois, une écoute en monophonie est en mesure de les faire ressortir.

Monsieur X : « N'y a-t-il pas un risque si l'on abuse du procédé ? »

Il est certain que tout abus nuit. Toutefois, on peut naturellement imaginer de faire sonner une guitare six cordes presque comme une douze cordes, de donner à la section de cuivres un surplus d'ampleur ou de créer artificiellement l'arrivée d'une chorale dans votre arrangement. Par contre, les percussions sont à éviter, surtout à cause de leur « sécheresse sonore ». Je pense notamment à la caisse claire ou à la grosse caisse qui n'auront pas intérêt à utiliser le doublage de leur partie. Les cymbales non plus, d'ailleurs !

© Nalzatron (wikimedia) - Harmoniseur multi-effets H8000FW de chez Eventide

Monsieur X : « Il existe aussi les pédales d'effets analogiques et numériques ? »

Oui. Parmi ces pédales, celle qui se rapproche le plus de l'effet recherché est bien évidemment le chorus, puis le flanger. Nous avons aussi les lignes à retard, genre delay qui peuvent servir.

Monsieur X : « Comment ça fonctionne ? »

Concernant le chorus, il s'agit de faire varier le signal original en le décalant très légèrement dans le temps et en hauteur. C'est ce phénomène qui provoque la sensation de « chœur » et qui donne l'impression que plusieurs instruments jouent ensembles à l'unisson, alors qu'en réalité un seul agit. La majorité des effets actuels intègre ce type de traitement capables d'intervenir sur la modulation et le retard. Généralement, la fonction de la vitesse de variation de hauteur s'appelle "rate" ou "speed", tandis que le réglage de l'amplitude se nomme "width" ou "depth". Sur certaines boîtes à effets, il est même concevable de traiter plusieurs retards combinés. Tout repose sur la possibilité des algorithmes à pouvoir traiter simultanément plusieurs modulations... Sinon, il existe également les harmoniseurs.

Monsieur X : « L'harmoniseur, c'est pour les voix, non ? »

Quand il est apparu dans les studios, l'appareil a fait couler beaucoup d'encre. Rapidement, l'idée qu'une personne qui chantait faux pouvait chanter juste s'est vite répandue, surtout à cause de l'établissement automatique des tierces ou des quintes... Le principe de l'harmoniseur repose, non pas sur le décalage de temps, mais sur la possibilité d'agir sur la voix originale directement, en la désaccordant de quelques centièmes de demi-ton. Cela suffit pour enrichir une voix ou un instrument. Le résultat produit une augmentation des harmoniques, sans compter que l'effet peut être employé sur une autre source que le son direct, la réverbération, par exemple.

par ELIAN JOUGLA (Piano Web - 06/2023)


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