LEÇON GRATUITE



L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET LA TONALITÉ

Cette leçon n'est pas une suite de définitions purement théorique. Elle tente de répondre de façon claire à la compréhension des bases de l'harmonie concernant notamment la raison de l'existence des modes et de l'accord parfait majeur.


LA CONSTRUCTION DU SYSTÈME TONAL

Je ne vous apprendrai rien si je vous dis que la musique est construite sur des sons ou des bruits organisés, c'est-à-dire que tout son génère un bruit, mais que l'inverse n'est pas forcément vrai. En effet, la musique est un bruit qui s'organise dans le temps et dans l'espace par une répartition "intelligente" de ses sons, en durée et en hauteur. Cela va de la musique primitive jusqu'aux musiques les plus élaborées.

Le son est l'élément premier qui détermine la musique. L'homme, à un moment de son histoire, a donc choisi des sons de façon arbitraire pour construire les premières musiques. Si l'on joue de la musique à travers les quatre coins de la planète, on n'utilise pas tous la même échelle de sons. Elle varie en nombre et en hauteur. L'échelle des sons est différente si l'on se trouve en Inde, en Afrique ou en Occident. Les occidentaux ont choisi un système tonal construit sur 12 demi-tons et des gammes, pour la plupart construites sur sept sons (exemple gamme de do : do, ré, mi, fa, sol, la, si). Ceci nous amène à nous poser certaines questions :

Mais d'où vient ce choix ? Est-il fondé sur une théorie particulière ?

Le premier repère important est l'octave. Elle est la reproduction à l'identique d'un son, mais à une hauteur plus aigüe ou plus grave. À partir de cette observation, l'homme a cherché à construire des intervalles égaux à l'intérieur de l'octave. Ceux-ci pouvant être reproduits à leur tour, d'octave en octave, vers l'aigu ou vers le grave. Ceci étant, il a fallu déterminer quels sons et en quelle quantité. Un Africain ou un Hindou ne donne pas les mêmes réponses qu'un Occidental ou un Chinois.

En occident, la musique utilise le système de Pythagore basé sur l'utilisation d'une corde tendue qui est divisée, selon des principes arithmétiques, par moitié, par tiers ou par quart et ainsi de suite ... L'échelle des sons de la musique "classique" a donc pour référence une justification scientifique, ce qui sera par la suite sa raison d'être.

Les expériences de Pythagore apportent également des réponses au niveau de la résonance, puisqu'on trouve dans les successions des harmoniques naturelles (un son est construit sur la richesse et l'interactivité des harmoniques), de façon plus ou moins distinctes, les notes fournies par Pythagore.

Un accordeur avisé vous dira, que par commodité, la musique " classique " a quelque peu triché avec ces données naturelles (l'accord des quintes en est un exemple). On qualifiera cette transgression sous le nom de "système tempéré".

Le système "tempéré" signifie au XVIe / XVIIe siècle, pour permettre à celui-ci d'aller jusqu'à l'extrême de ses possibilités, de diviser en douze intervalles rigoureusement égaux l'octave afin d'obtenir une gamme dite "tempérée". Les sons ainsi obtenus, ne correspondent qu'approximativement aux expériences de Pythagore et aux observations sur la résonance.

Depuis déjà plusieurs siècles, la musique occidentale est basé sur une échelle de douze sons, tous situés à l'intérieur de l'octave et appelés demi-tons. Mais le côté arbitraire de la musique "classique" fait que tous les demi-tons n'ont pas la même importance. Le système tonal en retient sept, constituant la gamme majeure (exemple gamme de do : do, ré, mi, fa, sol, la, si).

Cependant, l'exclusion de certains demi-tons empêche d'avoir des intervalles égaux. La gamme est donc constituée de tons et de demi-tons : cinq intervalles d'un ton et deux intervalles d'un demi-ton.

Si l'on joue tous les demi-tons constituant le "système tempéré", on exécute une gamme appelée "chromatique" alors que la gamme majeure de do (exemple) est appelée "diatonique".

Le système tonal est par essence basé sur le "diatonique". Les compositeurs de musiques anciennes vont exploiter toutes les possibilités offertes par les sept sons du système tonal (chansons de troubadour, chants médiévaux), même si les compositeurs du 20e siècle mettront ce système à mal en exploitant plus volontiers le "chromatisme".


LES DIFFÉRENTS MODES

Il existe plusieurs façons d'organiser les cinq tons et deux demi-tons du système tonal. Selon l'ordre de succession dans lequel on les place, on obtient des échelles de sons aux couleurs forts différentes. Ces échelles s'appellent "les Modes" (l'exploitation du mode majeur en improvisation est expliqué en détail sur le cours en ligne : Les Modes 1 et Les Modes 2).

Si l'on joue la gamme de do en partant de la note do et que l'on s'arrête à la septième note, la note si, vous remarquerez une sensation étrange… une envie de poursuivre en continuant à monter jusqu'à la note suivante, c'est-à-dire jusqu'à la note située à une octave du départ, le do supérieur. Le si est séparé du do par seulement un demi-ton. Il en résulte une attraction "naturelle" sur le do aigu. La gamme donne la sensation d'être tirée vers le haut de façon continue.

Un autre exemple de mode à tendance ascensionnelle est le mode de fa ( fa, sol, la, si, do, ré, mi, fa). D'autres ont à l'inverse une tendance naturelle à attirer vers le grave comme le mode de mi (en descendant : mi, ré, do, si, la, sol, fa, mi). C'est le mode de la musique grecque antique.

Partons à présent de la note et continuons à monter au supérieur (ré, mi, fa, sol, la, si, do, ré). Nous avons à présent un ton de distance entre la septième note et la dernière et non pas un demi-ton comme dans celui partant de do. Avec son côté "horizontal" (l'attraction a disparu), le mode de est particulièrement apprécié par les compositeurs de musique religieuse et du chant médiéval.

Il faudra attendre finalement l'aube du 20e siècle pour que les compositeurs exploitent à nouveaux les modes médiévaux, voire les modes orientaux (Ravel) et ceci à leur manière .... c'est ce qui provoquera la crise du système tonal au cours du 20e siècle. Les musiciens de jazz utilisent de façon plus prononcée cette approche du système tonal, mais en étant moins spartiate au niveau de l'enchaînement des accords.

Revenons à présent sur le mode de DO. Celui-ci est l'axe central des musiques allant du 17e au 19e siècles. Mais qu'en est-il des musiques antérieures ? Pourquoi la musique du moyen-âge, du 13e au 16e siècle, utilisant les monodies de plain-chant, superposant des lignes mélodiques de plus en plus complexes, a-t-elle fini par se fixer sur le "système tempéré", plutôt que sur ceux dont elle était sortie ?

Comme souvent, c'est l'oreille qui a le dernier mot. Au cours d'une lente évolution, les compositeurs ont fini par reconnaître dans certaines agrégations de sons, une plénitude dans la sonorité, mais aussi une sensation d'équilibre et un certain hédonisme.

Ces agrégations issues du mode tonal se sont justifiées par l'utilisation de la polyphonie sous forme d'accords à trois sons appelés "accords parfaits".


CRÉATION DE L'ACCORD PARFAIT

L'accord parfait est basé sur des sons harmoniques fournis par la résonance naturelle. Il s'est imposé de lui-même aux musiciens à une époque où la gamme tempérée n'existait pas encore. Grâce à sa plénitude, cet accord garde encore aujourd'hui un certain attrait pour de nombreux compositeurs.

Construisons ou plutôt cherchons à construire l'accord parfait majeur (pour mémoire, je rappelle qu'un accord de base est construit sur un ensemble de 3 sons joués en même temps... 2 notes ne constituant qu'un intervalle).

Prenons comme note de départ la première note de la gamme majeure, la note do et déterminons la deuxième note. Jouons, en même temps que le do, la note suivante, la note . L'effet sonore obtenu est dissonant. Sautons le et attaquons simultanément le do avec la note mi située au troisième degré. Nous obtenons alors une consonance (les deux notes s'accordent). Nous devons à présent trouver la troisième note qui finalisera l'accord.

Continuons à poursuivre notre recherche en utilisant la même approche. Associons aux deux notes do et mi la note fa… le résultat est dissonant, mais avec la note du cinquième degré, la note sol, nous obtenons à nouveau une consonance. Sol est donc la troisième note de l'accord parfait majeur. Nous constatons alors que l'accord parfait majeur est construit sur une superposition de tierces (do/mi et mi/sol).

À cause de la construction de la gamme diatonique qui utilise des tons et des demi-tons, la superposition des deux tierces n'est pas identique. La plus grande (do/mi) est constitué de deux tons et s'appelle majeure, alors que la plus petite (mi/sol) est basée sur une distance d'un ton et demi et s'appelle tierce mineure.

Il en résulte qu'il existe deux types d'accords parfaits à trois sons. Ceux qui commencent par une tierce majeure (accords parfaits majeurs) et ceux dont la tierce de base est mineure (accords parfaits mineurs).

Ce qui est important à retenir, c'est le rapport qu'il existe entre la note dite de "basse" ou "fondamentale" et les notes qui l'accompagnent pour construire l'accord. L'accord parfait s'identifie par la tierce qui peut-être majeure ou mineure, et par la troisième note, basée sur l'addition immuable de la superposition des deux tierces, majeure et mineure ou vice-versa. La quinte est donc un intervalle toujours juste (d'où son nom… quinte juste). C'est un intervalle important et essentiel de la musique tonale.

Si vous écoutez des chants médiévaux en quinte, ils seront pour vous tout de suite identifiables par leur couleur typique. L'intervalle de quinte juste était considéré par les Grecs anciens comme la consonance parfaite entre toutes, alors que la tierce était entendue comme une dissonance.




LES TROIS ACCORDS MAJEURS...

À présent, nous savons que les deux éléments essentiels de la musique classique sont d'une part l'échelle musicale basée sur sept sons et qui constitue le mode de DO (exemple) et d'autre part la constitution d'un accord parfait majeur ou mineur, premier principe du langage harmonique.

L'accord parfait majeur est considéré comme un accord fort, alors que l'accord mineur est un accord affaibli. Pourquoi cela ?

La raison est d'ordre physique liée aux premiers harmoniques naturels. Dans l'accord majeur, la basse ou fondamentale contient dans sa résonance les deux autres sons de l'accord, à savoir la tierce majeure et la quinte juste, ce qui donne à ce type d'accord une couleur ronde et entière. En revanche, dans l'accord mineur, la résonance de tierce mineure est absente à l'état naturel et cela confère à cet accord son appauvrissement sonore.

Si nous observons l'ensemble des accords que nous pouvons construire sur les différents degrés du mode de do, nous obtenons trois accords majeurs au 1er, 4e et 5e degré et trois accords mineurs au 2e, 3e et 6e degré. L'accord diminué qui se trouve placé sur le 7e degré sera expliqué plus tard, celui-ci compliquant trop les choses dans le cadre de cette leçon. En jouant les 3 accords majeurs, nous constatons que l'ensemble des sept notes constituant le mode de do y figure.

  • Accord de Do : do, mi, sol
  • Accord de Fa : fa, la, do
  • Accord de Sol : sol, si, ré

Les trois accords majeurs constituent le fondement du système tonal et les trois basses qui les accompagnent en sont les notes pivot. Toutes les principales combinaisons harmoniques du système s'articulent autour de ces trois notes et c'est pourquoi on leur donne les noms suivants : la tonique pour le 1er degré, la dominante pour le 5e degré et la sous-dominante pour le 4e degré.

Les variations harmoniques autour de la tonique et de la dominante sont sans conteste les plus employées dans la musique classique. En poussant à l'extrême la simplification de certaines phrases musicales, celles-ci se résument le plus souvent autour de l'utilisation des accords majeurs du 1er, 4e et 5e degré. De nombreuses mélodies classiques reposent sur ce constat. Au départ, le morceau débute avec l'accord du 1er degré qui précède celui du 5e degré, pour ensuite revenir avec la chute de la mélodie sur le premier. Vous pouvez constater cela en analysant des morceaux de Mozart ou Beethoven, pour ne citer qu'eux.


L’ACCORD MAJEUR EST-IL VRAIMENT PARFAIT ?

L’accord parfait est composé de 3 sons qui résulte d’un mode majeur/mineur. Cet accord parfait est composé d’une tonique, d’une tierce et d’une quinte. La tonique et la quinte seule (do, sol, par exemple) produisent un son neutre. Le son creux ainsi produit comporte une sonorité ronde tout en étant démoniaque, car indéfinissable.

Pour construire le ”parfait accord“, l’octave est divisée en 2 parties : un intervalle de quinte et un intervalle de quarte : (do… sol et sol…do, en do). Dans l’intervalle de quinte, la tierce joue un rôle déterminant. Comme la quinte ne divise pas l’octave, la tierce ne fractionne pas l’intervalle de quinte en moitiés. Si la quinte est divisée en grande et petite tierce, on parle alors d’accord majeur (do… mi et mi… sol) ; et d’accord mineur quand la petite tierce précède la grande tierce (do… mi b et mi b… sol).

La question de savoir comment on obtient cette structure d’accords se pose depuis longtemps. La plupart du temps, l’explication est cherchée dans la série de notes harmoniques. Les 4e, 5e et 6e notes harmoniques en do sont : do, mi, sol, qui forment ainsi l’accord majeur. La question de savoir pourquoi cette combinaison fut choisie comme base de structure d’accords reste ouverte. Les plus grandes difficultés résident dans le fait que l’accord mineur parfait n’est pas représenté dans la série de notes harmoniques, ce qui conduit à la formation de théories en mode mineur particulières.

Les explications ”mathématico-physiques” de l’accord parfait ne sont donc pas totalement satisfaisantes. La preuve justifiant du phénomène naturel de l’accord parfait reste incomplète. Pour la Musique Nouvelle, en particulier l’atonale, ceci est de première importance.

L’accord parfait se présente en 3 formes, c’est-à-dire qu’il peut subir 2 renversements. L’accord parfait peut aussi être altéré. Sur les intervalles de la gamme en mode majeur, on trouve 3 accords parfaits majeurs sur les 1er, 4e et 5e degrés, et 3 accords parfaits mineurs sur les 2e, 3e et 6e degrés, alors que sur le 7e degré, l’accord parfait est réduit à un diminué.

Par ELIAN JOUGLA


SUITE : LES TONALITÉS ET LA MODULATION


- SOMMAIRE DES LEÇONS GRATUITES -

1 - ARRANGEMENT
2 - ÉVEIL MUSICAL
3 - HARMONIE
4 - IMPROVISATION
5 - PIANO ET TECHNIQUE
6 - RYTHME
7 - SOLFÈGE/THÉORIE
8 - PROGRAMMATION & LOG.
ACCUEIL
PARTICIPER/PUBLIER : EN SAVOIR PLUS
Facebook  Twitter  YouTube
haut
haut

Accueil
Copyright © 2003-2024 - Piano Web All rights reserved

Ce site est protégé par la "Société des Gens de Lettres"

Nos références sur le Web - © Copyright & Mentions légales