PÉDAGOGIE



JOUER VITE ET FORT AU PIANO - LA FORCE DES DOIGTS

Cette page fait suite à LA TECHNIQUE PIANISTIQUE ET SES ERREURS


AVOIR DE L'ASSURANCE

Comment obtenir de l'assurance sur un instrument ?

Celle-ci est étroitement liée à la notion de la liberté, nécessité consciente de l'esprit. Elle est à l'opposée de l'arbitraire, comme l'ordre du désordre. Ceux qui ont une pratique toute relative du travail confondent souvent ces deux notions : liberté et arbitraire.

Pour un musicien, il n'en va pas autrement et comme l'assurance est la condition première de la liberté, il lui est indispensable de l'acquérir. Très souvent, les musiciens débutants souffrent d'une certaine "phobie" qui se manifeste par des gestes ou mouvements maladroits et inutiles, par une raideur qui les empêche de ressentir le poids naturel de l'avant-bras et de la main. Ces observations que j'ai fréquemment constatées proviennent d'un manque d'assurance le plus souvent d'ordre psychique (timidité, manque de confiance en soi) plutôt qu'à des facteurs d'ordre physiques ou moteurs.

L'enseignement technique, même s'il ne doit pas conduire l'élève à une carrière professionnelle, doit tenir compte de ses aptitudes physiques, mais également de ses capacités psychologiques. Aucun enseignement purement technique ne sera profitable à un élève s'il ne sait pas analyser le tenant et l'aboutissement d'un exercice. Cela demande donc une approche par l'écoute. Le but premier étant pour l'enseignant d'inoculer l'art, de développer certaines qualités humaines (concentration, relâchement, patience, etc.) sans oublier des valeurs spirituelles.

Il faut avant tout ouvrir l'élève au sens musical, au travail de l'oreille, de l'imaginaire comme à celui de l'intelligence. L'éducation technique des doigts et de tous les organes moteurs ne doivent pas se trouver en retard sur la formation spirituelle au risque de former davantage de théoriciens, pédagogues ou critiques que d'exécutants ou de créateurs. L'assurance technique est fonction de l'assurance artistique. Les lacunes du talent ne peuvent être comblées que par la raison. Se persuader que la constante répétition d'exercices techniques, sans un effort intellectuel et musical soutenu, peuvent donner des résultats valables pour apprendre à jouer d'un instrument est une erreur !

Si la technique moderne, par la diversité de ses actions, s'efforce de transformer la machine en être humain, il est ridicule de penser vouloir transformer l'homme en objet mécanique.

Les ouvrages pédagogiques classiques abordant la technique ne manquent pas. Cela va du meilleur au pire. Il n'est point utile de comparer les "cahiers d'Anna Magdalena Bach", les "préludes et fugues" de Jean-Sébastien Bach avec un quelconque ouvrage de Czerny pour s'apercevoir de la différence d'approche technique. En tête de liste, je citerais les Inventions de Bach et les cahiers du Mikrokosmos de Bartók pour le déchiffrage, les études de Chopin, Liszt et Rachmaninov pour la virtuosité, sans oublier Debussy pour l'apprentissage des rythmes et indépendances dits "modernes".


JOUER VITE ET FORT

Les compositions actuelles, où du moins celles du 20e siècle, demandent aux interprètes une puissance sonore toujours accrue. Le principe "fort et lentement" ou, si possible, "fort et vite" n'est qu'un des nombreux principes du travail technique. Employé à bon escient, il donne des résultats brillants. Dans un des chapitres précédents, j'indiquais que le problème spécifiquement pianistique le plus difficile était de jouer longtemps de façon fort et rapide.

Quand on est un virtuose né, on affronte cette difficulté avec audace, tempérament et rapidité d'esprit grâce aux éléments essentiels du talent. D'ailleurs, de nombreux jeunes virtuoses, pour montrer leur capacité à dominer le sujet, ont tendance à augmenter, lors d'exécution, le tempo et l'intensité.

Jouer avec profondeur, rapidité et justesse demande d'observer certaines règles. L'avant bras, le poignet et la main doivent être détendus, sans se figer ou se crisper et n'exécuter que les mouvements strictement nécessaires. Il est ici utile de rappeler que plus la distance est grande entre le clavier et la main, moins il faut de pression sur la touche. Dans le cas contraire, il est nécessaire d'appuyer plus vigoureusement sur la touche, ceci en fonction de la vitesse de pression, indispensable à faire naître le son.

En augmentant progressivement la hauteur des mains par rapport au clavier, on obtient une intensité de son telle qu'en perdant ses qualités, le son devient vacarme. En faisant confiance à son oreille, on diminue alors légèrement sa vitesse de frappe (mais sans changer sa force) jusqu'à obtenir une belle sonorité "métallique". On obtient ainsi la limite supérieure de la force. Pour chaque difficulté du morceau où rentre en jeu cette approche technique, il faudra expérimenter la limite minimum et maximum de la même façon.

Les musiciens qui ont expérimenté cette approche se sont rendus compte que la hauteur et la force sont interchangeables et que l'on obtient une vitesse presque identique, mais avec un timbre différent. Soit la main se tient juste au-dessus du clavier et va frapper brièvement la note ou l'accord, soit elle se tient à une hauteur plus importante et tombe à une vitesse plus réduite. La maîtrise de cette technique est extrêmement difficile et demande un long apprentissage. C'est le problème rencontré souvent par les pianistes lors d'exécution de staccato rapide.


LA FORCE DES DOIGTS

on parle de la " force des doigts"comme étant un élément déterminant de la maîtrise technique, voire un atout pour un pianiste, quand chez lui, c'est naturel. En réalité, il faut comprendre que "force des doigts" rime avec la capacité pour un pianiste de supporter n'importe quelle charge. Or, la "force des doigts" est infime comparée à l'énergie déployée par le jeu de certains pianistes.

Les doigts doivent posséder un jeu indépendant chez le pianiste. Dans le cas du jeu "perlé" le pianiste fait appel à la netteté, la clarté et à l'égalité. Dans le legato, c'est la nécessité d'un caractère uni allié à un son de faible intensité et où la main ne peut s'échapper un seul instant pour coller à la mélodie. Le poids du bras comme celui de l'avant-bras sera réglé en fonction de l'exigence dynamique allant du minimum à très haut quand il faut exécuter une mélodie forte.

Mais les doigts peuvent avoir d'autres fonctions, tout à fait différentes. Ainsi, afin d'obtenir une très grande intensité sonore, qui peut impliquer, parfois, tout le corps entier, les doigts peuvent se transformer en solides appuis dépendant les uns des autres pour supporter n'importe quel poids. Ils deviennent le prolongement de la voûte de la main. Certains pianistes n'hésitent pas à faire des petits sauts sur leur siège, transformant le point d'appui en une source d'énergie supplémentaire, ce que les pianistes féminines hésitent à faire.

Normalement, grâce à ses doigts, un pianiste devrait être capable d'exécuter les éléments les plus simples jusqu'au plus complexe : gammes, arpèges, octaves, accords, … avec un son égal. Mais comment obtenir un son égal avec des doigts dont la constitution est fort différente ?

Les doigts dits "faibles" de chaque main sont le cinquième et surtout le quatrième. Si nous observons leur utilité dans la vie quotidienne, pour porter, serrer, soulever, ces deux doigts ne sont que les accompagnateurs des trois autres. Ils sont là pour apporter un soutien supplémentaire, une plus grande robustesse à l'ensemble de la prise.

Le pouce est fort, mais pas très mobile, étant le seul doigt à travailler sur un plan différent des quatre autres doigts sur le piano. L'index est souvent celui qui a la part belle… et le pouce lui sert d'envol ! Le majeur par sa longueur est le doigt qui résout de nombreuses difficultés pianistiques. L'annulaire a la plus mauvaise position, coincé entre le majeur et l'auriculaire, c'est le doigt qui pose le plus de problèmes au pianiste. L'auriculaire, malgré sa courte longueur, est généralement sollicité et tient un rôle important et capital, surtout au niveau de l'exécution des grands intervalles.

Cette courte description des doigts de la main, nous montre que chacun d'eux peut avoir un rôle bien distinct, en prenant garde toutefois de ne pas tomber dans un schéma type. En effet, comme tout serait merveilleux si tous les doigts étaient égaux et placés de façon à être dans une position idéale, prête à servir l'instrument. Qu'il serait facile alors de jouer du piano !

De plus, l'inversion des doigts aux deux mains apporte au pianiste un atout supplémentaire, celle de jouer avec dix doigts, donc d'avoir plus de possibilités de jeu. Néanmoins, leur gestion demande aussi une plus grande aptitude technique. Le pianiste qui joue une fugue de Bach s'en aperçoit tout de suite !

Un pianiste, au fur et à mesure de son expérience musicale ,apprécie de plus en plus la personnalité de chaque doigt. Il sait que chacun d'eux peut aider son compagnon en cas de besoin, afin de le remplacer. C'est ainsi qu'une main organisée forme un tout et qu'elle donne l'impression d'être une machine parfaitement articulée, donnant l'illusion de la facilité.

N'oubliez pas que le moment décisif dans la pratique du piano est l'instant où le bout des doigts rentrent en contact avec les touches, car c'est là que le tableau sonore commence à exister. Si vous parvenez à concrétiser votre "idée" d'exécution de façon claire, à l'exprimer comme vous le souhaitez, il vous sera complètement indifférent de savoir à ce moment-là si votre avant-bras ou la position de votre main est conforme à une esthétique convenue. L'étude du piano se développe toujours conjointement avec la part instinctive que nous avons en nous. C'est toujours grâce à elle que le pianiste trouve sa singularité.

Par ELIAN JOUGLA
(source : L'art du piano - Henrich Neuhaus)


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