COMMENT APPRENDRE PAR CŒUR UNE PARTITION DE PIANO ?


LE COURRIER DES INTERNAUTES



Vincent

Bonjour,

ma question est la suivante : comment peut-on apprendre et mémoriser rapidement une partition pour piano ? Existe-t-il une technique particulière à développer ou des erreurs à ne pas commettre qui pourrait handicaper la mémorisation ? Merci pour vos conseils.


Piano Web

En premier lieu, il ne faut pas confondre déchiffrage et mémorisation. On peut très bien posséder des capacités pour déchiffrer à vue une partition sans nécessairement ressentir le besoin de la mémoriser. De plus, dans la musique, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne, quelle que soit la technique utilisée ou le temps passé sur l’instrument. Il existera toujours des différences. Il faut donc éviter de faire des comparaisons aussi absurdes qu’inutiles avec quelques « génies » qui sauront vous éblouir par leur facilité à déchiffrer ou à mémoriser.

Pour autant, bien souvent, quand la question de la mémorisation se pose, c’est que nous sommes dans une situation qui nous oblige à nous surpasser : concert, concours, examen, etc. C’est le contexte qui nous oblige à évaluer notre compétence à mémoriser. Dans ces moments-là, un vague sentiment de ne pas se sentir à la hauteur nous submerge, faisant naître en nous un stress handicapant, remettant parfois en question nos réelles dispositions.


SE LIBÉRER DE LA PARTITION

Pour beaucoup de pianistes, mémoriser une partition, c’est se libérer intérieurement. C’est pénétrer au cœur du morceau avec plus d’attention. Libérer du « carcan » de la lecture, l’interprète peut se recentrer sur son jeu, sur sa façon d’appuyer sur telle ou telle note, d’être plus à l’écoute de lui-même, mais aussi des musiciens qui l'entourent.

Cependant, comme pour le déchiffrage, la mémorisation nécessite beaucoup de motivation. Pour celui ou celle qui rencontre des difficultés à retenir, il ne faut surtout pas que la barre soit placée trop haut. Il faut partir du bas et gravir, petit à petit, les échelons : une page, puis deux pages, trois pages...

Bien évidemment, suivant le style de musique abordé et le niveau technique, se séparer de la partition n'expose pas notre cerveau aux mêmes difficultés. Là où la musique jazz est, par essence, vouée à se libérer de toute attache, le classique doit respecter les consignes, c’est-à-dire les notes écrites ; et si mémoriser une partition d’une page est relativement simple, il est évident qu’un concerto de 20 pages demande pour son interprète une autre immersion dans l'œuvre, un autre enracinement.

Ensuite, il arrive bien souvent que le programme d'un concert oblige un pianiste à interpréter des œuvres d’époque et de style différents, ce qui lui demandera une capacité à naviguer dans des écritures très différentes. Certains pianistes y trouvent leur compte, d’autres pas ! Le fait d’interpréter à la suite des musiques techniquement dissemblables permet d’aborder la mémorisation en la compartimentant. Toutefois, il existe des contre-exemples, comme l’interprétation par certains pianistes d’œuvres de même style ou appartenant à une forme particulière, comme l’ensemble des préludes et fugues de Bach… Ce qui représente des dizaines de pages et des milliers de notes à mémoriser ! Une telle performance ne peut s’expliquer que par une pratique quotidienne, mais aussi par une passion débordante envers l'œuvre du compositeur.

En réalité, les challenges qui sollicitent notre mémoire existent dès le départ. L'apprentissage d'un instrument requiert des gestes que notre mémoire doit enregistrer, des connaissances aussi (solfège, théorie, harmonie...). Tout musicien est ainsi rapidement placé devant le fait accompli : il faut mémoriser et surtout comprendre pour mieux retenir.


DU TEMPS ET RIEN D’AUTRE

En règle générale, déchiffrer une partition est plus facile que de la mémoriser. Pourquoi cela ? Tout simplement, parce que notre premier rapport avec la partition est justement de la déchiffrer, de décortiquer ses pièges techniques, et non de la globaliser pour la mémoriser.

Ensuite, quand vient enfin le moment de la mémoriser de façon pérenne – ce qui suppose déjà que toutes les difficultés ont été préalablement surmontées -, notre pensée ne doit vivre qu'avec cet objectif en tête. Il faut considérer l'acquisition de la partition comme une gymnastique cérébrale et, comme toute gymnastique, elle demande un entraînement régulier pour obtenir un résultat optimum. C’est donc par une pratique régulière de l'œuvre que nous favorisons nos chances de la mémoriser.

Cependant, il arrive parfois que nous soyons obligés de la mettre de côté durant un laps de temps pour des raisons professionnelles ou autres. Si un simple déchiffrage occasionnel montre tout de suite ses carences, à l'inverse, la mémoire joue parfaitement son rôle en enracinant "préventivement" des passages de la partition. Il suffira alors de se replonger un court instant dans ses écritures pour que les enchaînements, le doigté et les positions reviennent presque comme par magie.


LA MÉMORISATION AUDITIVE

Le travail à l’oreille a ses adeptes. Ce sont généralement les musiciens autodidactes qui utilisent cette façon de retenir un morceau. Néanmoins, cette approche a ses revers et aura bien du mal à rentrer dans le cadre d’une partition classique apprise par cœur où chaque note et emplacement rythmique devront être respectés, aujourd’hui, mais aussi les jours suivants.

Souvent trop mécanique, l’appris par cœur peut ainsi conduire à des erreurs ou à des approximations. Il faut donc être vigilant et, de temps en temps, retourner à la partition pour s’assurer que des défauts ne se soient pas installés à ses dépens (surtout au niveau rythmique). Ce genre de problème existe dans tous les styles de musique, même dans le domaine des musiques improvisées, comme le jazz, où le respect de la partition s’accommode de quelques transgressions.


RETENIR UNE PARTITION SANS SE TROMPER

L’acte de mémoriser demande d’y accorder de l’importance, mais pour retenir une partition, il faut d’abord l’aimer, non pas que cela soit impossible dans le cas contraire, mais ce sera beaucoup plus difficile. Ensuite, il ne faut pas que cette volonté de mémoriser conduise à des conflits intérieurs, à des souffrances qui obscurcissent la pensée.

En musique, la plupart des œuvres sont constituées de passages clés que notre cerveau isole « automatiquement » de l’ensemble. Au tout début, lorsque la partition n’est plus là pour nous guider (et nous rassurer), on s’aperçoit vite que le trou de mémoire intervient souvent au même passage, suite à un trait mélodique ou à une suite d’accord sans explication rationnelle. Rien de dramatique à cela. C’est même normal. Notre cerveau s’attache davantage aux détails émotionnels. En fait, il ne retient que ce qui le passionne et ne prête pas attention au reste. Il faut donc contourner la difficulté en nous préoccupant de ces moments qui nous laisse plus particulièrement indifférent ou qui nous rebute pour d'obscures raisons.

Faire preuve d’anticipation sert également en se repassant le film dans sa tête. Cela consiste à fermer les yeux puis à imaginer le clavier devant soi en mimant très lentement la gymnastique des doigts qui joue le morceau. Cela permet d’imprégner en profondeur notre cerveau de la gestuelle : doigté, déplacement des mains, position... En l'essayant, vous vous rendrez vite compte de la prise de conscience de la portée de chaque geste, de chaque mouvement des doigts.

Enfin, le mieux, pour conduire tous ces efforts-là, consiste à travailler plutôt le soir, car il est bien connu que durant le sommeil, l’activité du cerveau est souvent profitable. Le soir est donc un moment à privilégier.

Par PATRICK MARTIAL


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