LES QUESTIONS DU CANDIDE



QUE FAUT-IL SAVOIR AVANT D’ÉTUDIER LE JAZZ ?

Même si auprès des « jeunes » le jazz ne jouit pas du même écho que le rap ou l’électro, il peut se trouver des adolescents ou de jeunes adultes qui seront prêt à franchir le pas. Le jazz, avec toutes ses influences, est si éclectique qu’il est bien difficile de ne pas trouver un courant dans lequel les goûts musicaux de chacun ne puissent pas s’accorder.


LE JAZZ, UN APPRENTISSAGE DOTÉ DE LIBERTÉ

Sans vouloir vraiment user de raccourcis, il faut bien reconnaître que la musique jazz a fini par rejoindre la « musique classique » dans sa façon d’être enseigné, ce qui ne va pas sans poser quelques problèmes si l’on place les deux enseignements sur un même plan.

© Jose Rubio - jazzpuzzle.org

Le jazz, c’est d’abord une culture. Pour cela, il existe bien entendu des ouvrages historiques et des disques. Sans un minimum de connaissances et de repères, il est difficile de l’aborder correctement. Étudier uniquement des partitions de jazz, écrites en clé de sol et de fa, ne répond pas réellement à la question de son enseignement. C’est une manière détournée de concevoir et d’interpréter des œuvres de jazz qui en ont peut-être la couleur, mais pas la saveur et encore moins l’esprit de liberté qui traverse cette musique et toute son histoire.

Quand on aborde le jazz sur un instrument, il est important de créer un lien de cause à effet entre la musique écoutée, la connaissance et la pratique. Isoler la musique jazz de son contexte et de ses repères fondamentaux est en soi une erreur. Le jazz est une musique vivante qui trouve sa raison d’être dans une pratique généralement collective. C’est sa priorité. Même si parfois on doit faire appel à des connaissances harmoniques et rythmiques pour progresser, c’est un langage qui ne peut se bonifier qu’à travers des échanges.

Pour certains enseignants, apprendre la musique jazz ne s’improvise pas, ce qui sous-entend qu’elle doit s’apprendre avec des valeurs proches du classique, alors que j’estime qu’une grande partie de son enseignement se vit prioritairement dans son for intérieur. Faire la part de l’innée, de la pratique, pour ensuite placer le tout dans un cadre ou s’installe des connaissances plus ou moins théoriques n’est certainement pas à l’image de l’histoire du jazz et de son évolution. Par ailleurs, il est toujours temps de rappeler que si méthode il y a, elle est toujours dirigiste en ne répondant qu’à un profil bien précis. Le jazz est à l’origine un moyen d’expression artistique fait d’émancipation – et qui continue de l’être. Dans le cas contraire, si on utilise son langage en l’entourant de concepts trop théoriques, il étouffe et ne peut alors s’épanouir.


DU CÔTÉ DES ÉCOLES UNIVERSITAIRES

Depuis bien des années, il existe de nombreux cursus qui comprennent des cours de jazz et qui peuvent, sous certaines conditions, conduire à en faire un métier. Dans le domaine de l’enseignement, les États-Unis ont toujours été en avance. Des établissements à horaires aménagés permettent aux élèves souhaitant devenir professionnels de passer plus de temps à jouer de leur instrument. Les points forts sont les suivants :

  • Obtention d’un diplôme en musique ou musicologie (ou suivre des cours de musique en licence avant de s’orienter vers une autre spécialité)
  • Jouer dans des orchestres universitaires ou monter un groupe avec d’autres étudiants.
  • Assister à des master class.
  • Prendre des cours particuliers avec divers enseignants pour enrichir son expérience artistique.

La plupart des formations abordent la musique afro-américaine conjuguée à la musique classique (écritures) ; une nécessité depuis que les musiciens Blancs ont instruit des « directives » propres à son enseignement (et auxquels les Noirs ont adhéré par la suite). L’évolution du jazz a également voulu que les frontières entre les genres soient de plus en plus fusionnelles, c’est pourquoi de nombreux étudiants abordent différentes traditions musicales comme le blues, le bluegrass, les musiques cubaines et brésiliennes ou des styles plus récents comme le funk et le jazz fusion.

Conformément au déroulement pédagogique des universités américaines, un étudiant a toujours cette possibilité de poursuivre une formation musicale sans pour autant s’enfermer dans une voie unique. Certains musiciens construisent l’essentiel de leur carrière grâce à la scène quand d’autres s’orientent vers la composition et l’enseignement (ou tout à la fois).

Aux États-Unis, une fois de plus, tout a déjà été pensé. Ainsi, certaines universités proposent des masters consacrés à la gestion des institutions culturelles. On y apprend à négocier des contrats et à diriger sa carrière pour gérer au mieux ses affaires et ainsi gagner sa vie avec plus d’autorité. De nos jours, la « capitalisation » de la carrière est devenue essentielle depuis que des artistes, toujours plus nombreux, s’autoproduisent en vendant leur musique sur Internet.

La plupart des musiciens de jazz actuels – souvent les plus connus – sont devenus des touche-à-tout. Même si un certain nombre préfère encore déléguer plutôt que d’avoir à affronter la gestion de leur carrière ou une grande part, leur activité de musicien ne les empêchent pas de transmettre leurs expériences en publiant des livres, des ouvrages pédagogiques et même en ayant une activité de chercheur grâce à l’utilisation d’outils informatiques.


ET EN FRANCE ?

La réaction a été tardive, mais elle existe désormais. L’idée du jazz a fait son chemin et cette musique est aujourd’hui traitée avec respect en ayant acquis un vrai prestige auprès des institutions. Révolu le temps de la « débrouillardise » entre quatre murs, le jazz est placé sous contrôle grâce à des écoles pour la plupart subventionnées.

À la fin des années soixante, un premier signal voyait le jour avec la création d’ateliers jazz au Conservatoire national de région de Marseille, un « présage » qui sera suivi par d’autres initiatives dans des villes comme Gentilly (1971) et Ivry (1972). Pour « légaliser » ces formations encore timides un certificat d’aptitude suivra.

Puis, en 1976, le CIM devient la première école de jazz et de musiques actuelles créée en France, s’imposant comme la référence hexagonale formatrice de musiciens professionnels français et étrangers. Mais ce n’est qu’en 1992, que le Conservatoire national supérieur de musique organise enfin son département jazz. Cette prise en compte par le sommet de l’enseignement classique sera comme une reconnaissance, une autorisation officielle permettant au jazz d’être enseigné dans de nombreuses écoles de musique municipales.


COMMENT CHOISIR LA MEILLEURE ÉCOLE ?

Le choix possède toujours une part de subjectivité, car de multiples facteurs entrent en ligne de compte. Il faut d’abord tracer des objectifs raisonnables. Savoir ce qu’on veut faire plus tard est une chose, les réaliser peuvent parfois conduire à des impasses. Ce qu’il est facile d’obtenir : les formations proposées, le coût et le nom des enseignants. Plus problématique est la région où se trouve l’établissement, car si elle est différente de la vôtre, cela impliquera la nécessité d’un logement et d’avoir peut-être un petit boulot à côté.

Ferez-vous partie de ces musiciens français qui n’hésitent pas à franchir l’Atlantique pour étudier aux États-Unis ? La réputation de certains établissements américains ne doit pas pour autant laisser penser que tout le positif ne peut venir que de là-bas. C’était peut-être exact il y a une cinquantaine d’années, mais plus aujourd’hui.

La grande force des établissements américains est d’avoir su répondre bien mieux que d’autres à certaines conditions d’apprentissage (locaux de répétition, par exemple) et d’avoir été à l’avant-garde des « musiques vivantes » et de leurs techniques puisque, outre l’étude du jazz et de ses influences, une école comme la ‘Berklee College of Music’ propose différents diplômes : étude de la composition (musique de films, chanson, etc.), des métiers du son, de l’arrangement et de l’orchestration, de la thérapie musicale jusqu’aux métiers de la production et de la gestion.

Les critères d’entrer dans cette école prestigieuse sont bien sûr rigoureux. Si de cette école ont surgi des noms comme Quincy Jones, Brandford Marsalis ou Dave Samuels, la réputation de l’établissement s’explique aussi par les dizaines de Grammy Awards attribués à ses anciens élèves. L’autre école de musique à considérer est la ‘Juilliard Institude for Jazz Studies’ qui propose une formation en quatre ans au terme de laquelle on obtient un diplôme de jazz, niveau licence.

Le point en commun aux deux écoles précitées et à une école comme le CIM à Paris est de faire appel à des musiciens de terrain, des professionnels qui ne sont pas uniquement des enseignants, ce qui permet dans les échanges avec les étudiants d’entendre un discours qui va à l’encontre des idées reçues et qui permet d’aborder les pistes professionnelles avec plus d’assurance.


EN CONCLUSION

Il est très difficile de devenir musicien professionnel. Cependant, plus on connaît de styles, plus on a de chances d’être retenu pour jouer dans un orchestre ou un groupe. C’est aussi une question de concession. N’importe quel musicien vous le dira : jouer dans un groupe n’est pas une mince affaire. Il existe forcément différentes personnalités qui sont complémentaires – et c’est tant mieux – ou opposées, alors c’est plus ennuyeux !

La musique jazz étant en soi d’une grande exigence avec des codes qui lui sont particuliers, mieux vaut parfois s’orienter vers des voies parallèles telles que compositeurs, éditeur, enseignant, voire producteur, animateur radio ou organisateur de concerts, ce qui permet de goûter à l’univers de la musique sans prendre le risque d’être en première ligne. Toutefois, il est vrai que quand la passion est là, il peut être difficile de choisir la position la plus stratégique pour parvenir au but que l’on s’est tracé.

Par ELIAN JOUGLA (Piano Web - 07/2021)


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