HISTOIRE DE LA MUSIQUE : LES PIANISTES DE JAZZ
Très fier de ses ascendances en partie française, Jelly Roll Morton, pianiste et chanteur, est un des plus authentiques créateurs de jazz. Il est un innovateur de grand mérite, réussissant à être à la fois l'un des premiers véritables compositeurs de jazz et un de ses plus authentiques interprètes.
Jelly Roll Morton a transformé le jazz des années 1920/30. Il a donné à la musique ragtime, rigide à cause de son écriture, une aération ouvrant la voie aux improvisations des pianistes de jazz qui allaient suivre. Il a ouvert la voie aux big bands modernes, par des arrangements étudiés, modifiant l'écriture pour une plus grande liberté collective. Le rôle du soliste s'en trouva modifié en laissant libre cours à sa fantaisie.
Compositeur de morceaux excellents pour le jazz, Jelly Roll Morton était et demeure un exemple pour les jazzmen. Dans le cadre de son style, il a toujours essayé d'atteindre à l'originalité. Son honnêteté musicale a fait de lui pendant un moment l'un des musiciens les plus demandés et payés (la légende dit, qu'il s'était fait incruster des diamants dans les dents).
Chanteur agréable, mais peu doué, c'est surtout en tant que pianiste fin, gracieux, qu'il est rapidement remarqué à La Nouvelle-Orléans. Vers 1900, il joue déjà du piano dans les nombreuses maisons closes, sachant interpréter tous les genres de l'époque, du ragtime aux mélodies espagnoles. Jelly Roll Morton est un brillant interprète de rags, de blues et des rythmes populaires de Storyville. Parmi ses thèmes favoris, citons : The chant, Doctor jazz, Original Jelly Roll blues, Dead man blues, Black bottom stomp, King Porter Stomp.
JELLY ROLL MORTON : KING PORTER STOMP
Dans les années 1920, à Chicago, le personnage est hautain, dédaigneux. Popularité aidant, il rejette les musiques qu'on y joue, qui ne sont pour lui que de pâles imitations de son style, allant jusqu'à se revendiquer comme l'inventeur du jazz. Les musiciens qu'il côtoie ne l'aiment pas vraiment, mais sont éblouis par ses interprétations et sa culture musicale. Sa vie privée est tumultueuse, partagée entre sa passion pour les cartes, le billard et les conquêtes féminines.
Également chef d'orchestre, Jelly Roll Morton montre des qualités indéniables d'arrangeur. Les vives couleurs de ses orchestrations et le dessin général de ses œuvres dans lesquelles presque rien n'est improvisé, mais dicté par le chef, où rien n'est jamais surchargé, mais où tout est varié et respire, permettent de juger de l'étendue de ses heureux dons.
Comme beaucoup d'autres musiciens de l'époque, Jelly Roll Morton, qui était autant prodigue de son talent que de son argent, subit les contrecoups de la crise de 1929 et se retire, quasiment oublié, à Washington. Ses excentricités et sa façon ostentatoire de se présenter précipitent son déclin, même s'il continue à jouer ici et là.
C'est grâce à Alain Lomax, musicologue et folkloriste, qu'il enregistre The saga of Jelly Roll Morton à la fin des années 1930 où il raconte sa vie, ponctuant le tout d'une douzaine d'improvisations au piano. On découvrira l'art simple, vif et frais de Jelly Roll Morton, pianiste et chanteur, pour son dernier enregistrement en piano solo, Jelly Roll Morton, quelque temps avant son décès en 1941.
Jelly Roll Morton a inspiré de nombreux musiciens et cinéastes : Charles Mingus (b) qui a composé Jelly Roll, Wynton Marsalis (tp), Ennio Morricone pour le film The legend of 1900 (La légende du pianiste sur l'océan), Louis Malle, pour La petite, film dédié au pianiste.