VANGELIS INTERVIEWÉ DANS SON STUDIO NEMO

Vangelis est ici dans son élément, détendu, improvisant sur différents sons, passant d'un clavier à l'autre avec une certaine aisance. La connaissance de son matériel et sa dextérité font merveille. Contrairement aux apparences premières, il ne manipule pas les boutons au hasard, il connaît les implications du geste sur le son. Ce qu'il fait avec le CS80 est époustouflant, passant d'un son à un autre par simple manipulation en moins de temps qu'il ne faut pour le dire… l'"école" de l'analogique est passé par là !

Sa façon de composer est très personnelle et peut paraître étrange à celui qui n'a pas connu l'époque des synthétiseurs analogiques ou pour celui qui utilise seulement un piano.

Pour comprendre la démarche de Vangelis, il faut penser de manlière orchestrale, c'est-à-dire globale et non individuelle, en ne pensant pas instrument par instrument, si vous préférez. En improvisant, il ôte, il rajoute, il combine différents plans sonores afin de créer plusieurs climats. C'est pour lui une façon de s'immerger dans son "monde sonore", et si vous écoutez la plupart de ses compositions, de façon attentive, vous percevrez ici ou là, cette approche.

Le penchant autodidacte du musicien n'explique pas tout. l n'y a pas chez Vangelis une démarche anarchique, mais plutôt une attitude technique bien façonnée qui l'autorise à imaginer et à construire sa musique librement de l'intérieur.

Le côté "je montre ce que je sais faire" n'est pas dans les préoccupations premières de l'artiste. Le musicien filmé n'est plus un débutant. Ses réflexes sont acquis depuis des années et sa méthode de travail, n'en déplaise aux musiciens formatés ou psychorigides, montre une fois de plus tous les chemins de traverse qui existent en musique au niveau de la création, mais également au niveau de son apprentissage.

Pour un compositeur axé davantage sur la dynamique que sur la réflexion, c'est un bon moyen d'entrevoir la composition ou d'aborder l'improvisation avant de définir de façon plus précise ses idées.

Par ELIAN JOUGLA