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ALFRED BRENDEL DU PIANO À LA LITTÉRATURE

Lors du concert de la salle Pleyel à Paris, au mois d’octobre 2008, le public assistait à l’un des derniers concerts donnés par le célèbre pianiste concertiste Alfred Brendel… Auparavant, le pianiste avait ponctué sa tournée d’adieux par quelques scènes françaises prestigieuses. Du mois de juin au mois août, le public était venu l’applaudir au Théâtre du Châtelet, à l’Auditorium de Lyon et au Festival de la Roque-d’Anthéron où les organisateurs avaient mis à sa disposition le Grand Théâtre d’Aix-en-Provence.


LES DERNIERS CONCERTS DU PIANISTE

Son programme, dédié à son éditeur Christian Bourgois décédé l’année précédente, résumait parfaitement sa carrière… Haydn, Mozart, Beethoven et Schubert. Il ne manquait à l’appel que Liszt pour résumer les trente-six ans de bonheur qu’il avait donné en partage au public français.

Mais c’est le 17 et 18 décembre de la même année, devant un public viennois ému, qu’il a joué ses ultimes notes de piano. Une dernière fois, l’accordeur est venu piquer les feutres des marteaux du piano Steinway pour que le pianiste obtienne le son qu’il affectionne (une vieille habitude qui remonte presque à ses débuts).

Pour ces deux ultimes concerts, il était accompagné par l’orchestre Philharmonique de Vienne sous la direction de Sir Charles Mackerras. Au programme, le concerto numéro 9 pour piano de Mozart, K.271, appelé “Jeunehomme” (Wolfgang Amadeus Mozart avait écrit ce concerto à l’âge de 21 ans en le truffant d’innovations surprenantes et d’une exubérance de mélodies sans limites). “Pour moi, c’est l’œuvre parfaite, avec une fraîcheur toute particulière… C’est comme si ses précédents concertos avaient été écrits par un autre compositeur. On y trouve soudain une structure et les idées les plus merveilleuses, ainsi qu’une vision de tout ce que le concerto pour piano classique pourrait être dans sa subtilité et sa richesse.“, commentait Alfred Brendel.

L’amour de Brendel pour cette œuvre se reflétait dans chaque note et le public debout, envoûté par ses interprétations aurait voulu prolonger le plaisir. Après d’interminables applaudissements, Brendel exécuta une transcription d’un morceau de Bach intitulé Nun komm der Heiden Heiland et un extrait des Années de Pèlerinage de Frantz Liszt.

Alfred Brendel est l’un des plus grands pianistes de l’histoire de la musique. À 77 ans, de plus en plus courbé en concert pour cause d’arthrite, il évitait depuis déjà quelque temps l’interprétation d’œuvres difficile comme la Hammerklavier de Beethoven ou la sonate en Si mineur de Liszt. Après 60 ans de carrière, le pianiste autrichien demeure un interprète inoubliable de Beethoven, Schubert, Mozart, Liszt ou Haydn. Caché derrière ses grandes lunettes, il garde encore aujourd’hui le sourire espiègle et l’humour incisif, prompt à foudroyer les absurdités du monde.



ALFRED BRENDEL… BIOGRAPHIE EN FORME DE PARCOURS

Né à Wiesenberg en Moravie, dans l’actuelle République tchèque en 1931, la carrière d’Alfred Brendel aura duré exactement soixante ans. Brendel ne fait pas partie des ex-enfants prodiges. “Durant ma jeunesse, ma réputation n’avait rien de sensationnel” précise-t-il et de rajouter… “Le succès m’est “tombé dessus en 1971, alors que j’avais déjà 40 ans !“.

Bien qu’ayant commencé à étudier le piano à l’âge de six ans, son existence erratique l’a obligé en partie à se former tout seul en assistant de temps en temps à des “master classes”. Son premier maître sera Edwin Fischer. “C’était un être doté au plus haut point du pouvoir de communiquer la musique, un homme très modeste et rayonnant. Certaines pièces du “Clavier bien tempéré” jouées par lui se situaient tout à coup en dehors de toute contingence de mode, de goût du jour, de maniérisme, d’instrument même. Il parvenait à la musique pure, libérée de toute attache“, précise Alfred Brendel en reconnaissance pour son maître.

À l’adolescence, il fréquente le conservatoire de Graz. Devenu autodidacte dès l’âge de seize ans, il donne son premier récital l’année suivante à Graz en Styrie dans le sud de l’Autriche où il joue des œuvres de Bach, Brahms et Lizst ainsi qu’un morceau qu’il a composé lui-même. En 1945, il reçoit le prix Georges Enesco pour ses compositions musicales écrites pour des ballets, mais c’est un premier prix au prestigieux Concours international de piano Busoni qui lance sa carrière d’interprète.

À partir des années 1960, on le retrouve au premier plan des scènes internationales qu’il n’aura de cesse d’occuper, en soliste ou en compagnie d’orchestres.

Lorsqu’on l’interroge sur ses aptitudes musicales, il insiste sur le fait qu’il n’a jamais été un enfant prodige. “Mes parents n’étaient pas musiciens. Il n’y avait pas de musique à la maison. Je ne suis pas un bon déchiffreur de partition, ni doué d’une mémoire phénoménale… Durant ma jeunesse, ma carrière n’était pas sensationnelle, elle progressait petit à petit“, précise-t-il.

Le tournant a lieu lors d’un concert consacré à Beethoven donné à Londres où il a élu domicile depuis 1971. Après cette soirée, trois grandes sociétés de production de disques lui offrent plusieurs contrats. Depuis, Alfred Brendel s’est hissé au rang des artistes les plus prolifiques avec des disques incluant tous les grands noms du répertoire classique, de Bach à Schoenberg. Il est un pianiste surtout connu pour avoir enregistré toutes les œuvres pour piano de Beethoven ainsi que l’ensemble des concertos pour piano de Mozart.

Titulaire d’un doctorat en mathématiques, il intervient durant les années 70 auprès de l’université de Syracuse comme enseignant dans le domaine des mathématiques et de la musique, avant de devenir, au début des années 80, le directeur de la musique à l’Opéra d’Istanbul, puis celui de la Philharmonie Georges Enesco de Bucarest jusqu’en 1990.

En 1989, Alfred Brendel est anobli par la Reine Elisabeth II, en hommage à sa brillante carrière et il reçoit en 2004 le Prix Ernst von Siemens, équivalent pour la musique du prix Nobel pour les sciences et la paix, et en 2007 le prix Une vie en musique – Arthur Rubinstein. Souffrant d’une arthrose de plus en plus tenace, il annonce la fin de sa carrière artistique pour l’année 2008.



RETRAITE ET LITTÉRATURE

Considéré comme l’un des pianistes les plus importants du 20e siècle, ses interprétations immaculées, au jeu profond et emplies de poésie sonore, ont contribué à sa notoriété. Plusieurs de ses enregistrements, dont l’intégrale des sonates de Schubert et de Beethoven, sont passés à postérité, tout comme ses concerts au Carnegie Hall de New York.

Son répertoire couvre essentiellement les grands compositeurs classiques du 17e au 19e siècle : Bach, Chopin, Liszt, et les compositeurs viennois : Haydn, Mozart, Schubert et Beethoven, plus rarement ceux du 20e siècle. Sans prétention, Alfred Brendel aura quand même accédé au club restreint des stars du piano classique, comme Aldo Ciccolini, Maurizio Pollini, Martha Argerich ou Christian Zacharias.

Alfred Brendel ne s’illustre pas uniquement dans la musique. Doté d’une excellente culture générale, il se consacre à d’autres passions, dans lesquelles il aurait pu exceller s’il avait pu vivre plusieurs vies en même temps… la peinture et surtout la littérature. Féru de philosophie, il a, à ce jour, déjà publié des recueils où il montre un réel talent fondé sur le non-sens et le paradoxe. Il a aussi écrit des poèmes d’inspiration surréaliste, poèmes qui ont été mis en musique par le compositeur Luciano Berio.

Après une pause de quelques mois, je participerai à des séances de lecture et à des séminaires. J’écrirai aussi. Je suis d’ailleurs toujours en train d’écrire quelque chose“, raconte-t-il, amusé !

par ELIAN JOUGLA (Piano Web - 10/2010)



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