DES CONSEILS POUR PRATIQUER L'IMPROVISATION JAZZ AU PIANO


LE COURRIER DES INTERNAUTES



Morzat (Nogent-sur-Marne)

J'ai commencé le piano il y a un peu plus de 6 mois et je ne prends pas de cours, je ne fais pratiquement que de l'improvisation, mais mon problème est que celle-ci est assez mécanique et beaucoup trop répétitive (sauf quand je suis très motivé ce qui n'arrive pas extrêmement souvent). Jusqu’à présent, ma main gauche est plutôt dans le style « balade » (arpège). J'aimerais me pencher sur de l'improvisation plutôt blues-jazz. Auriez-vous des astuces pour éviter cette 'routine' de l'improvisation, et me donner des morceaux classiques de jazz (pas très compliqués) que je pourrais apprendre et sur lesquels je pourrais improviser. Juste une dernière chose, je vois énormément d'impros qui ne sont pas sur une seule gamme précise, mais sur une espèce de 'mélange' de gammes. Est-ce que vous pourriez m'éclairer là-dessus ? Selon vous, une grande maîtrise de la théorie est-elle indispensable en jazz ? Merci beaucoup pour votre réponse.


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Pour faire court, je serais tenté de vous dire : « il faut prendre des cours », mais à la simple lecture de votre énoncé, il semble bien qu’il ne soit pas encore question pour vous de faire appel à un enseignant, du moins pour l’instant.

L’avantage d’un professeur est d’être normalement à votre écoute. Comprenez par là qu’il doit être en mesure de répondre à votre attente et non à la sienne. Toutefois, comme ce genre d’enseignant ne court pas les rues, en attendant, le musicien en mal d'inspiration cherche d’autres solutions.


À PROPOS DE L'IMPROVISATION JAZZ

Il existe dans le commerce des tas d’ouvrages, de méthodes (1) qui expliquent de long en large votre question sur ce que vous appelez le « mélange des gammes » et qui peut se résumer à la pratique des modes, puisque ceux-ci permettent de comprendre le lien qu’il existe entre un accord et sa correspondance avec une ou plusieurs gammes. Cependant, si je vous dis que tout ceci reste théorique et doit rentrer en pratique, mais pas trop, pour ne pas courir le risque de perdre de sa spontanéité, je ne pense pas que cela puisse vous rassurer.

L’improvisation est un vaste sujet qui ne dépend pas uniquement de connaissances ou d’une grande maîtrise de la théorie – ce serait trop facile – car l’imagination nécessite aussi une approche sur un plan personnel qui n’incombe pas à la seule responsabilité d’un enseignant, aussi brillant soit-il, ou d’une méthode, même bien pensée.

La routine est certainement l’ennemi de l’improvisateur. Ça, vous l'avez déjà compris ! Néanmoins, il ne faut pas s’alarmer quand cela arrive. Se renouveler est un exercice difficile, et il ne faut surtout pas trop se focaliser là-dessus, car dans ce cas, c'est sûrement un bon moyen pour tout arrêter.

Pour improviser, il faut y prendre goût. Si on l’aborde trop scolairement ou sur des principes courus d’avance, il est fort possible de ne pas y trouver son compte. L’improvisation, c’est certes une technique, mais c'est également une façon personnelle de la conduire et de se libérer intérieurement. Par ailleurs, la technique permet d'entrer en contact avec les sons et leurs particularités, avec une culture, un environnement. En fait, c’est très complexe, et c’est pourquoi il est difficile de transmettre son propre ‘feeling’ et de l’enseigner, si ce n’est la théorie qui n’est qu’un maillon de l’édifice, les modes étant sa clé de voûte.

Quand on connaît les rouages techniques, on met simplement de l’ordre dans ses idées. On avance plus sûrement, mais sans toutefois faire surgir l’imaginaire qui repose sur d’autres valeurs moins ‘mathématiques’. Ce n’est pas pour rien que la musique est un art et non pas un traitement sonore qui doit se reproduire à tout va (tant pis pour les interprètes de partition, même de talent, qui se reproduisent eux aussi… à tout va !).

L’avantage de l’improvisation, c’est qu’il est difficile de l’enfermer dans une boîte. Cela dérange certaines personnes qui sont plus soucieuses du rendu sonore que de l’expérience artistique. Or, c’est toujours l’expérience qui a fait avancer la musique (l’histoire est là pour nous le rappeler). Il existe certes des styles, des ‘écoles’, qui tentent de donner à l'improvisation un habillage doté de rythmes et d’harmonies ‘standardisées’, pour que vous ou moi puissions nous y rencontrer et nous comprendre musicalement. Cela nous rassure quelque part.

Mais l'improvisation est surtout un terrain avec lequel il faut faire preuve de modestie, sans pour autant mettre de côté la possession d'une bonne culture musicale et de l'autre une bonne oreille, il va sans dire. Je ne peux que vous conseiller de lire l’interview à laquelle j'ai répondu concernant l’improvisation : Apprendre l'improvisation et son langage

1 - Consulter Les méthodes de musique en question


LA PRATIQUE DES STANDARDS DE JAZZ

En ce qui concerne les standards de jazz, tout dépend de votre feeling personnel : swing, bop, funky… Quant au blues, il demeure l’idéal quand on débute. Avec cette musique, sur trois accords, on peut avoir des résultats rapidement et y trouver son compte. Sinon le ‘Real book’ est très utilisé. Cet ouvrage rassemble un peu tous les styles de jazz, même si la part belle revient au jazz des années 40/60 (+ de 400 thèmes).

Surtout ne choisissez pas un standard parce qu’il est couru par de nombreux musiciens. ‘Les feuilles mortes’ se ramassent à la pelle et les musiciens qui le jouent également ! En testant une grille, vous vous rendrez vite compte si elle est trop complexe par rapport à la maitrise instrumentale que vous avez. Il ne faut pas bien sûr renoncer à la première difficulté.

D’autre part, la simplicité harmonique d’un standard ne signifie pas pour autant que l’improvisation soit facile. Le premier contre-exemple qui me vient en tête est celui de So What de Miles Davis. La difficulté repose ici sur l’utilisation d’un riff répétitif qui est très long et qui est ensuite transposé d’un demi-ton au-dessus. Techniquement, la mise en place du riff n'est pas difficile, mais la répétition de toutes ces mesures sans variations deviennent pour l'improvisateur son pire ennemi. Le tempo participe aussi à la difficulté d’une improvisation, puisque sa vitesse régule la vivacité de la pensée tout en enjoignant une parfaite maîtrise technique des connaissances et de l’instrument. En improvisation, tout peut ainsi être très simple comme très complexe. Ce n'est qu'au moment d'agir que tout s'éclaire ou que tout s'éteint... comme la lumière.

Par ELIAN JOUGLA

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