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HISTOIRE DES PIANOS RAMEAU À PLEYEL

Pour la fête de la Musique, l'invité d'honneur dans la cour de l'Élysée a été le "Voie lactée", dernier piano en date de la marque Pleyel. Une des plus grandes figures du design, la mondialement connue Andrée Putman, a imaginé ce superbe piano de luxe à la banquette assortie, en capitonnage de flanelle grise et aux manettes de réglage en forme de boules de cristal. Proposé au prix de 89 000 euros dans sa version standard et de 200 000 euros pour les huit versions limitées, cette œuvre d'art transporte le piano au rang de l'exception.


LE PIANO 'VOIE LACTÉE'... RENAISSANCE DE LA MARQUE PLEYEL

Le must se trouve à l'intérieur du piano, qui, quand on l'ouvre, révèle une voie lactée constellée d'étoiles en nacre peintes en bleu nuit, pour laisser voguer l'inspiration du musicien et d'un pupitre à damier noir et blanc. Parmi ses autres caractéristiques, il propose une table d'harmonie et un cadre en laqué noir brillant, une mécanique aux feutres de couleur bleu nuit, un pied arrière de style Louis XV et une lyre fuselée en acier nickelé. Le modèle "Voie Lactée" est bien le symbole du renouveau de la marque.

LE RENOUVEAU PLEYEL

En 2007, la marque Pleyel est revenue s'installer au berceau historique de l'entreprise à Saint-Denis. À l'origine, Pleyel y produisait près de 3 000 instruments chaque année. La ville, en reconnaissance, a même baptisé une rue et un carrefour du nom de la marque. Il y a un an, Pleyel a décidé de transformer sa fabrication de série en une production d'exception. Pari audacieux pour cette entreprise qui a failli disparaître à plusieurs reprises, face à une concurrence des plus âpres.

Lors des journées "Designer's Days" consacrées à la "matière et couleur" et mettant en scène les dernières tendances en matière de design, la participation inédite d'un fabricant de piano a suscité un vif intérêt et une réelle curiosité par le mariage de la musique et des arts décoratifs. Pleyel renoue ainsi avec le passé des Arts décoratifs en vogue dans les années 1930. À cette époque, de grands décorateurs avaient déjà mis en œuvre leur inventivité au service de l'instrument : Jacques-émile Ruhman, Pierre Legrain, René Herbst, Paul Follot, René Prou…

(source info Valeurs Actuelles - 2008)


DE RAMEAU À PLEYEL, L'HISTOIRE

Jusqu'en 1929, le destin de la salle Pleyel et celui des pianos Pleyel sont intimement liés. La salle compte alors une cinquantaine de studios dans lesquels des pianistes viennent essayer les instruments, mais la crise de 1929 sépare les deux entités : la salle est vendue au Crédit lyonnais tandis que la manufacture dépose son bilan. Cependant, la production repart doucement, aidée par l'extraordinaire notoriété qu'ont les instruments Pleyel à l'étranger.



© Pleyel - Le modèle 'Voie Lactée'

Réunir de nouveau le destin de la salle et des pianos Pleyel

À la fin des années cinquante, le facteur de pianos, en proie à des problèmes de succession, fait face à une baisse de qualité liée à des pièces en plastique présentes dans les mécaniques de ses instruments. Pleyel est alors acheté par les fabricants Gaveau et Erard. Le premier instrument sous les trois noms est commercialisé en 1969. Deux ans plus tard, Gaveau-Erard-Pleyel transfère la fabrication en République fédérale d'Allemagne, à Braunschweig, chez le fabricant Schimmel. Jusqu'en 1994, les instruments seront vendus sous la marque Schimmel à Braunschweig.

Parallèlement, en France, la société des pianos Rameau voit le jour en 1971. Confrontée à un manque de place dans ses ateliers de Montreuil, elle décide de profiter des facilités et surtout des subventions offertes par les Charbonnages de France pour inciter les entreprises à venir sur ses sites industriels transformés en zone de reconversion. Rameau s'installe à Alès. "Il n'a pas été aisé de transformer des mineurs de charbon en fabricants de pianos", explique Arnaud Marion, directeur artistique des pianos Pleyel. C'est l'homme du redressement à partir de 2002 et du virage stratégique de la marque en 2007.

Rameau est racheté en 1986 par la Société des pianos de France. Mais par deux fois en six ans, elle dépose le bilan. Elle reprend finalement le nom de Pianos Rameau avant d'être acquise en 1996 par un holding italien. Celui-ci se porte aussi acquéreur des trois marques Gaveau-Erard-Pleyel. Un an plus tard, la totalité de la production est transférée de Braunschweig à Alès.

En 1998, Hubert Martigny, viceprésident d'Altran Technologies et fervent amateur de musique classique, rachète la salle Pleyel au Consortium de réalisation qui l'a trouvée dans les vestiges du Crédit lyonnais. Hubert Martigny a une idée en tête : réunir de nouveau les pianos et la salle Pleyel pour préserver le patrimoine culturel français. C'est chose faite en 2000 ; les quatre marques appartiennent désormais à la Manufacture française de pianos. Si Hubert Martigny a bien atteint son objectif - marier de nouveau le destin de la salle Pleyel et celui des pianos Pleyel -, assurer la rentabilité de la Manufacture française de pianos se révèle être une tout autre affaire.

Lorsque Rameau s'installe à Alès en 1971, il se vendait chaque année 40 000 pianos en France, il ne s'en vend plus actuellement que 10 000. Il faut d'abord y voir les conséquences d'un changement de mode de vie : les appartements d'aujourd'hui sont moins grands que ceux construits au début du siècle dernier, or un piano, même droit, prend de la place. Le marché a par ailleurs souffert d'une désaffection progressive des jeunes : l'instrument s'est retrouvé en concurrence avec la pratique du sport, les consoles de jeux et autres appareils multimédias qui ont progressivement envahi les foyers. "Un piano dure en général très longtemps, il n'y a pas de consommable, résume Arnaud Marion. Face au déclin du marché, le modèle économique de cet instrument est devenu de moins en moins évident."

D'autant moins que depuis le début des années soixante-dix, la France est envahie par les instruments chinois, coréens et tchèques, vendus bien moins chers que ceux qui sortaient de l'usine d'Alès. En cause, les coûts salariaux : les 7 000 à 10 000 pièces d'un piano, selon le modèle, sont entièrement assemblées à la main. "Un quart de queue demande 350 heures de montage et un demi-queue environ 700 heures", explique Sylvain Charles, chef d'atelier chez Pleyel. "Pour un piano de concert ou un piano sur mesure, la fabrication peut même dépasser 1 000 heures." "Impossible dans ces conditions de résister à nos concurrents chinois qui paient leurs ouvriers 150 dollars par mois", affirme Arnaud Marion. "Arrivé en France et en sortie de conteneur, un piano chinois coûte entre 500 et 600 euros… C'est 400 de moins que le prix du seul meuble fabriqué à Alès !". En magasin, la différence de prix est encore plus importante : un piano asiatique est vendu trois à dix fois moins cher qu'un instrument sorti des usines d'Alès !



"Les pianos sont des objets vivants"

Appelé en urgence par Hubert Martigny pour redresser l'entreprise, Arnaud Marion prend la présidence du directoire de la Manufacture française de pianos en 2002. Sa spécialité : la gestion de crise et les restructurations. Sitôt aux commandes de l'entreprise, il lance un audit. Les maux dont souffre l'entreprise sont nombreux : outil de travail vieillissant, qualité de production irrégulière, absentéisme, nombre trop important de références, et surtout répartition inadéquate du personnel compte tenu de la charge. 60 % des salariés fabriquent les instruments les plus longs à assembler, les pianos à queue, soit 20 % de la production. En trente années de présence à Alès, le facteur de pianos a toujours eu ses comptes dans le rouge ! Un premier plan social est lancé : 40% des salariés quittent l'entreprise. La productivité remonte, mais insuffisamment pour redresser les comptes face à la déferlante des produits chinois.

En octobre 2007, Arnaud Marion ferme l'usine d'Alès, qui perdait quotidiennement 10 000 euros. Il transfère la production dans la nouvelle usine de Saint-Denis ; celle-ci ne fabriquera plus que des pianos à queue de haute facture, environ une trentaine d'instruments par an. Un nouveau plan social est lancé à Alès ; seule une dizaine de compagnons ira travailler au nord de Paris.

Le patron de la Manufacture française de pianos décide également de renouer avec la tradition des arts décoratifs et des arts plastiques. Il demande donc à des designers célèbres comme Thibault Desombre, Daniel Hézan et Andrée Putman de dessiner des instruments déclinés en version de base et en série limitée. Sortant des sentiers classiques, ils créent des pianos en utilisant de nouvelles matières comme la laque, le cuir, la nacre, etc. Parallèlement, l'illustration des instruments est confiée à des artistes contemporains comme Marco Del Re, Jean Cortot et Aki Kuroda. Ces œuvres d'art sont présentées au public dans le showroom situé dans la salle Pleyel. Le destin des pianos et celui de la salle sont de nouveau réunis.

Aujourd'hui, Pleyel ne s'adresse plus uniquement au monde de la musique, mais à tous ceux qui aiment le design. "Le potentiel d'acquéreurs est plus grand", explique Arnaud Marion, devenu par la suite directeur artistique des pianos Pleyel. Et qu'importe s'ils ne sont pas de grands mélomanes… "Quand on a les moyens d'acheter une série limitée Putman à 200 000 euros, on a aussi les moyens d'embaucher un artiste pour la soirée", poursuit-il. Son objectif : atteindre l'équilibre financier dès 2009 avec un chiffre d'affaires de 2,5 millions d'euros pour une trentaine de pianos vendus annuellement, pour moitié à l'étranger. Sortis des salles de concert, les pianos Pleyel font désormais les unes des magazines de décoration et de yachting ! " Il faut remettre les pianos dans les intérieurs, ce sont des objets vivants", insiste le patron de Pleyel. "On continue donc l'histoire Pleyel tout en étant en phase avec l'ADN de la marque Pleyel."

Par PATRICK MARTIAL (Piano Web - 10/2008)



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